Rapport de la Commission Crie-Naskapie

HOMMAGEAUX BÂTISSEURS DE LA NATION

Billy Diamond

(17 mai 1949 – 30 septembre 2010)

Photographie de Billy Diamond

Billy Diamond, un Eeyou de Waskaganish, est né le 17 mai 1949 dans une tente près de Waskaganish à Eeyou Istchee. Comme jeune eeyou, il a été placé dans des pensionnats indiens à Moose Factory, Ontario et à Sault Ste. Marie, Ontario. Le 7 juillet 1970, à l’âge de 21 ans, Billy Diamond a été élu chef des Cris de la Première nation de Waskaganish. En 1971, lorsque le gouvernement du Québec a annoncé le premier projet de développement hydroélectrique de la Baie-James, les Eeyous d’Eeyou Istchee, qui n’avaient pas été consultés au sujet de ce projet qui englobait l’inondation des territoires de chasse eeyous, se sont opposés au projet. Les chefs des Eeyous ont choisi Billy Diamond à titre de porte-parole pour mener la campagne visant à mettre fin au projet de développement hydroélectrique proposé. En 1974, lors de l’établissement du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee), le chef Billy Diamond a été élu au poste de grand chef. Sous le leadership et la direction du grand chef Billy Diamond, les Eeyous sont allés devant les tribunaux et ont gagné une injonction contre le projet de développement hydroélectrique. Le grand chef Billy Diamond a aussi dirigé et participé aux négociations qui ont mené à la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois en 1975. Cette Convention a été réglée hors cours et constitue un premier traité moderne.

Comme représentant des Eeyous d’Eeyou Istchee et de l’Assemblée des Premières Nations, le grand chef Billy Diamond a participé aux conférences constitutionnelles de 1982 et de 1983. Il a joué un rôle de premier plan comme négociateur pour obtenir la reconnaissance et la protection des droits autochtones et des droits conférés par les traités dans la Loi constitutionnelle de 1982. L’inclusion et l’adoption de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 a confirmé l’appui constitutionnel fort et sans équivoque des droits de la Nation crie d’Eeyou Istchee et effectivement ceux de tous les peuples autochtones du Canada.

En reconnaissance de son leadership au cours de la négociation de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, le chef Diamond a été nommé chevalier de l’Ordre national du Québec. Plus tard, l’Université Carleton lui a décerné un doctorat honorifique. En 1997, il a reçu le Prix d’excellence national décerné aux Autochtones.

Comme chef et grand chef, Billy Diamond a été un leader visionnaire caractérisé par son engagement, sa détermination et sa persévérance.

CRÉDITS

Rédacteurs

Richard Saunders, président

Philip Awashish, commissaire

Mise en page et conception

gordongroup marketing + communications

Impression

Delta Printing

Traduction

C.I.L.F.O. (Français)

George Guanish (Naskapi)

Bill Jancewicz (Naskapi)

Louise Blacksmith (Cri)

Photographie

Gaston Cooper

gordongroup marketing + communications

Contactez

Commission Crie-Naskapie

222, rue Queen, bureau 305

Ottawa (Ontario) K1P 5V9

téléphone : 613 234-4288

télécopieur : 613 234-8102

sans frais : 1 888 236-6603

REMERCIEMENTS

La production du présent rapport a été rendue possible grâce aux contributions, commentaires et efforts de plusieurs personnes et organisations. L’information et les idées sur lesquelles les commissaires ont basé leurs constatations et recommandations n’auraient pas pu être possibles sans les aînés, les chefs et les jeunes cris et naskapis qui ont participé aux audiences spéciales sur la mise en œuvre qui ont eu lieu en février 2012. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee), la Nation naskapie et l’Association des trappeurs cris ont aussi fait des présentations détaillées et valables au cours de ces audiences. De plus, les représentants du ministère des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada nous ont fourni des réponses oralement et par écrit aux recommandations contenues dans le Rapport 2010 qui avaient trait au gouvernement fédéral. Nous remercions toutes ces personnes pour leur aide. Naturellement, les commissaires prennent la responsabilité de leur interprétation des idées et de l’information ainsi que de toute erreur ou omission. Toutes ces contributions nous permettent de présenter un examen approfondi de la mise en œuvre et des dossiers connexes au Ministre et par son intermédiaire, au Parlement.

Enfin, les commissaires tiennent à souligner l’excellent travail du personnel de la Commission, Brian Shawana, Gloria Dedam et Sandra Masson, dont le dévouement et les efforts continuels ont permis la préparation de ce Rapport sans oublier leur participation à tout le travail réalisé par la Commission.

Photographie de Philip Awashish

Philip Awashish

Commissiaire

Philip Awashish a été l’un des négociateurs cris en chef représentant la Nation crie d’Eeyou Istchee lors des négociations qui ont mené à la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Pendant une période de 40 ans, il a occupé divers postes de direction au sein de la Nation crie d’Eeyou Istchee, par exemple ceux de chef principal et de vice-président du Grand Conseil des Cris (du Québec) et de l’Administration régionale crie, de chef et conseiller de la Nation crie de Mistissini et a été membre de divers organismes et comités créés par la Convention de la Baie James et du Nord québécois. En 2009, Philip Awashish a reçu un doctorat honorifique en droit de l’université McMaster pour son travail sur les droits autochtones, la gouvernance et le droit Eeyou.

Photographie de Richard Saunders

Richard Saunders

Président

Richard Saunders détient des diplômes universitaires en sciences politiques et en administration publique de l’Université Carleton. Il a travaillé pour l’Assemblée des Premières nations, la Indian Association of Alberta, le gouvernement fédéral, ainsi que les gouvernements de l’Ontario et de l’Alberta. Au cours des trois dernières années, il a agi comme directeur des négociations pour le gouvernement de la Nouvelle Écosse, qui a récemment signé une entente cadre avec les chefs Mi’kmag et le gouvernement fédéral. Richard a été membre de la commission Crie-Naskapie pendant trois mandats consécutifs, de 1986 à 1992; il en est le président depuis 1997.

Photographie de Robert Kanatewat

Robert Kanatewat

Commissiaire

Robert Kanatewat, un Eeyou de Chisasibi, a joué un rôle-clé dans la promotion de la sensibilisation aux droits des Eeyous à titre de membre exécutif de la Confédération des Indiens du Québec à la fin des années 1960 et au début des années 1970. Il a été le principal demandeur dans l’affaire Kanatewat c. Société de développement de la Baie James, lorsque la nation crie a décidé de s’opposer à l’aménagement hydro-électrique initial d’Eeyou Istchee. En sa qualité de cadre principal, il a participé aux négociations menant à l’exécution de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Pendant de nombreuses années, il a servi les Eeyous d’Istchee comme chef exécutif du Grand Conseil des Cris (du Québec), chef de la nation crie de Chisasibi et dirigeant de diverses entreprises commerciales. À l’exception d’un mandat, Robert Kanatewat est membre de la commission Crie-Naskapie depuis 1986.

Le 30 juin 2012

Honorable John Duncan PC, député Ministre des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada

Édifices du Parlement

Ottawa (Ontario) K1A 0H4

Monsieur le Ministre,

Il nous fait plaisir de vous transmettre par la présente, le Rapport 2012 de la Commission Crie-Naskapie en français, en anglais, en cri et en naskapi conformément aux dispositions de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. C’est le treizième rapport bisannuel soumis par la Commission Crie-Naskapie.

Le rapport est fondé sur les témoignages présentés aux Audiences spéciales sur la mise en œuvre qui ont eu lieu à Montréal les 8, 9 et 10 février 2012 de même que sur des communications écrites. Au cours des audiences, nous avons entendu les présentations des leaders cris et naskapis, des aînés et des jeunes, de même que des représentants de l’Association des trappeurs cris et du gouvernement du Canada. Nous avons aussi pris en compte les problèmes soulevés au cours des deux années écoulées depuis notre rapport 2010 par des représentations officielles ainsi que des présentations et discussions informelles.

Le Rapport 2012 contient aussi un certain nombre d’éléments de discussion au moment où les leaders et les peuples cris évaluent les différentes structures et processus variés à utiliser pour le gouvernement de la Nation crie et la constitution de la Nation crie.

Nous avons hâte de vous rencontrer dans les meilleurs délais possibles afin de réviser nos constatations et recommandations, surtout celles qui découlent des enjeux identifiés par les collectivités cries et naskapies.

Respectueusement,

COMMISSION CRIE-NASKAPIE

Signature de Richard Saunders

Richard Saunders

Président

Signature de Robert Kanatewat

Robert Kanatewat

Commissaire

Signature de Philip Awashish

Philip Awashish

Commissaire

222 Queen Street, Suite 305Ottawa, Ontario K1P 5V9Tel: (613) 234-4288 Fax: (613) 234-8102Bureau 305, 222 rue QueenOttawa (Ontario) K1P 5V9Web Site: http://www.creenaskapicommission.net

TABLE DES MATIÈRES

Message du président

35. (1) « Les droits existants – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés. » 1

Le trentième anniversaire de la proclamation de « l’article 35 »

Le 17 avril 2012 a marqué le trentième anniversaire de la proclamation des modifications de 1982 à la Constitution du Canada, y compris l’article 35 qui a fait ses preuves comme outil crucial pour permettre à la Cour suprême du Canada d’appliquer les modalités et dispositions des traités. Comme la Cour l’a noté dans l’affaire Badger : « Ils [les traités] créent des obligations exécutoires, fondées sur le consentement mutuel des parties. » 2

En quelques années, d’autres modifications ont été apportées à la Constitution et on ajouté ce qui suit : 35 (3) « Il est entendu que sont compris parmi les droits issus de traités, dont il est fait mention au paragraphe (1), les droits existants issus d’accords sur des revendications territoriales ou ceux susceptibles d’être ainsi acquis. » 3 L’ancien chef Billy Diamond qui a agi comme négociateur principal de l’Assemblée des Premières Nations, avait insisté sur l’ajout de cette disposition supplémentaire. Il a ainsi non seulement réussi à garantir que la Convention de la Baie James et du Nord québécois et la Convention du Nord-Est québécois seraient protégés à titre de « traités de l’article 35 », mais aussi que les ententes de revendications territoriales à venir profiteraient de la même protection.

Donc, pendant que les Canadiens célèbrent le trentième anniversaire du rapatriement de la Constitution à juste raison et surtout la Charte des droits et libertés, nous avons aussi tous raison de célébrer l’adoption de l’article 35 qui accorde enfin un soutien constitutionnel rigoureux et sans équivoque aux droits des Nations cries et naskapies et en fait, à ceux de tous les peuples autochtones du Canada.

L’ajout de l’article 35 (3) qui reconnaît et confirme que les droits reconnus dans les traités modernes de revendications territoriales seront respectés et appliqués par les tribunaux revêt une importance particulière pour les Cris et les Naskapis. C’est une partie du legs de l’ancien chef Billy Diamond et tous ceux qui valorisent la justice dans la société canadienne doivent s’en souvenir et célébrer cette victoire.

L’avenir de la Commission Crie-Naskapie

La Commission Crie-Naskapie existe maintenant depuis 26 ans. Au moment de l’établissement de la Commission, elle était unique – la première en son genre au Canada. Aucun exemple réel ne pouvait servir à modéliser un tel organe. Malgré cela, les leaders cris et naskapis ont négocié l’établissement d’une institution qui s’est départie des responsabilités qui lui ont été conférées en vertu de la Loi pendant plus d’un quart de siècle. Au fur et à mesure que les leaders et peuples cris avancent avec le développement de la gouvernance, les commissaires présentent, dans le présent rapport, certaines idées et suggestions pour l’avenir de la Commission ou d’un organe semblable en se fondant sur leur expérience de l’application en pratique de la législation actuelle. (Des détails sont présentés au chapitre 2 et au chapitre 7.)

Enjeux des Cris et des Naskapis abordés

Le présent rapport considère aussi une variété d’enjeux soulevés au cours des audiences spéciales sur la mise en œuvre, par les leaders cris et naskapis élus, les aînés, les jeunes et d’autres membres de la collectivité au cours de présentations et de discussions moins formelles.

Même si les détails de nos constatations et recommandations sont fournis ailleurs dans le présent rapport, je tiens à noter que certaines questions tant générales que spécifiques sont soulevées par les collectivités année après année et qu’elles demeurent non réglées. Ces enjeux méritent qu’un effort spécial soit déployé de la part de nous tous pour en assurer le règlement une fois pour toutes. En voici quelques exemples généraux : les arriérés relatifs au logement, la nécessité de changer certaines exigences relatives au quorum dans la Loi et la nécessité de s’occuper des besoins d’une population grandissante de jeunes personnes. À un niveau plus précis, voici deux exemples dignes de mention : la question du transfert des terres du Bloc « D » à la Nation crie de Chisasibi qui traîne depuis des décennies et qui continue à faire l’objet de discussions à n’en plus finir; la question de permettre à la police de la Nation naskapie d’émettre des contraventions pour les infractions aux règlements administratifs a été soulevé à de nombreuses reprises et n’est pas encore réglée. Ce ne sont que quelques exemples d’un grand nombre de préoccupations qui sont soulevées année après année et que jusqu’à maintenant, peu de résultats positifs n’ont été réalisés.

Nous abordons de nombreux nouveaux problèmes émergents dans le présent rapport. Quelques exemples dignes de mention comprennent notamment l’urgence croissante de s’occuper de l’intrusion des activités récréatives et commerciales dans les territoires traditionnels qui produisent des effets nuisibles sur les lignes de trappage et l’exercice des droits connexes des bénéficiaires. Le Canada, le Québec et les Nations cries et naskapies ont tous un rôle à jouer pour réconcilier l’utilisation traditionnelle des terres avec l’utilisation et le développement non traditionnels. L’Association des trappeurs cris a présenté un certain nombre de suggestions pour régler ce problème et la Commission présente aussi des recommandations spécifiques.

Résultats positifs et développements prometteurs

Bien naturellement, plusieurs personnes qui s’adressent à la Commission y viennent pour soulever des problèmes et des préoccupations. Bien sûr, la présentation de rapports sur ces enjeux est l’une des responsabilités de la Commission. D’autre part, plusieurs développements positifs et prometteurs méritent aussi que l’on s’y attarde. En voici quelques exemples :

Ce ne sont que quelques exemples du travail fructueux qui a été réalisé sur une base quotidienne et pour assurer que les conventions et les lois entraînent des résultats tangibles pour les peuples et leurs collectivités.

NOTES DE LA FIN

Introduction et contexte

Chapitre un

Pour les peuples cris et naskapis, aucun principe de l’histoire et des relations autochtones n’est plus fondamental que le droit des peuples à l’autonomie gouvernementale et de gouverner leurs territoires conformément à leurs traditions, valeurs, buts et aspirations. Plus particulièrement, la reconnaissance mutuelle de la coexistence et de l’autonomie gouvernementale des peuples est fondamentale pour toutes les relations continues avec le Canada et le Québec.

Tout au long des années 1970, les négociations qui ont mené à l’exécution de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois se sont avérées une occasion spéciale pour les Cris et les Naskapis respectivement, d’obtenir la reconnaissance de droits particuliers, garanties et avantages pour leurs sociétés distinctes. Ces négociations et ententes subséquentes ont aussi été des moyens pour atteindre, dans une certaine mesure, la vision d’autonomie gouvernementale pour leurs peuples, communautés et terres, tout en étant contraints par les limites de l’environnement politique et juridique des années 1970.

La Convention de la Baie James et du Nord québécois a été conclue après une opposition initiale des Eeyous au développement hydroélectrique proposé à Eeyou Istchee. En avril 1971, le Québec et Hydro-Québec avaient annoncé le premier projet majeur de développement hydroélectrique sans avoir consulté les Eeyous qui devaient être profondément touchés par le projet proposé. Le litige amorcé par les Eeyous s’est terminé par voie de négociation de traité à un règlement négocié au sujet des droits des Eeyous et du développement des ressources naturelles à Eeyou Istchee. Les Eeyous ont opté pour le processus de négociation de traité afin de protéger les droits des Eeyous et redéfinir les relations avec le Canada et le Québec.

Signé le 15 novembre 1974, l’accord de principe, dont les signataires étaient des représentants des Cris, du Canada, du Québec et de certaines sociétés d’État ont transféré aux Cris, quelques 2 158 milles carrés de terres de réserves (terres de catégorie I), desquelles 1 274 milles carrés devaient être administrées en vertu de la Loi sur les Indiens. De plus, l’article 16 de l’entente de principe précisait que les « Conseils de bande auront certains pouvoirs … en plus de ceux prévus à l’heure actuelle par la Loi sur les Indiens. »

Toutefois, le leadership cri, dans le cadre des négociations menant à l’entente finale qui est la Convention de la Baie James et du Nord québécois a rejeté le régime restrictif et supervisé de gouvernement local imposé aux bandes cries par la Loi sur les Indiens.

Le 11 novembre 1975, le Grand Conseil des Cris (du Québec), l’Association des Inuits du Nouveau Québec (Société Makivik), le gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec et certaines sociétés de la Couronne comme Hydro-Québec ont signé la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ).

Dans une décision rendue le 14 mai 2010, la Cour suprême du Canada détermine ce qui suit :

« La Convention, qui constitue à la fois un accord sur les droits de peuples autochtones et un accord intergouvernemental, crée un régime complet et détaillé pour l’administration du territoire de la Baie James … . La Convention, à laquelle les parties ont clairement voulu conférer force de loi, revêt un caractère supralégislatif. Elle n’est entrée en vigueur et n’a lié les parties qu’après l’adoption des lois provinciale et fédérale l’approuvant et lui confèrent force obligatoire. Elle renferme une disposition qui prévoit clairement qu’en cas de conflit, elle a prépondérance sur les autres lois fédérales et provinciales d’application générale. Les lois provinciale et fédérale approuvant la Convention confirment toutes les deux sa prépondérance. La Convention bénéficie par ailleurs de la protection constitutionnelle et peut être considérée comme un traité moderne aux fins du paragraphe 35 (3) de la Loi constitutionnelle de 1982. » 1

La Cour suprême indique clairement que la Convention de la Baie James et du Nord québécois a un statut constitutionnel parce qu’il se qualifie comme traité moderne aux fins du paragraphe 35 (3) de la Loi constitutionnelle de 1982. »

La Convention du Nord-Est québécois (CNEQ) a été signée le 31 janvier 1978 par les Naskapis de la bande de Schefferville, le Grand Conseil des Cris (du Québec), l’Association des Inuits du Nouveau Québec, le gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec et certaines sociétés d’État comme Hydro-Québec.

L’article 9 (exercice des droits du gouvernement local pour les terres de catégorie IA) de la Convention de la Baie James et du Nord québécois précise [traduction] « qu’une législation spéciale sera recommandée au Parlement concernant le gouvernement local pour les Cris de la Baie James dans les terres de catégorie IA qui leur sont attribuées. » 2

L’article 7 (exercice des droits du gouvernement local pour les terres de catégorie IA-N) de la Convention du Nord-Est québécois prévoit des mesures semblables relatives au gouvernement local des Naskapis du Québec dans les terres de catégorie IA-N qui leur sont attribuées.

Par conséquent, conformément à l’article 9 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et à l’article 7 de la Convention du Nord-Est québécois, les Premières nations cries et naskapies et le gouvernement du Canada ont discuté des modalités et conditions de la loi spéciale concernant le gouvernement local pour les Cris de la Baie James et les Naskapis du Québec. Cette loi spéciale, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec a été adoptée par le Parlement et a reçu l’assentiment royal le 14 juin 1984.

Les représentants des Cris et des Naskapis et du gouvernement du Canada en sont arrivés à un accord sur les répercussions et les impacts de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, dans le protocole d’entente sur les principaux points convenus par le Groupe de travail sur la mise en œuvre de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, le 9 août 1984. Ce protocole d’entente précise ce qui suit :

« La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est la pierre angulaire de la réalisation du plein potentiel de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois. Les nouvelles structures qui ont été créées par les ententes visaient à faire l’interface avec les gouvernements locaux adéquatement constitués. La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est aussi la base qui servira à redéfinir la relation avec le gouvernement fédéral. Par l’entremise de la nouvelle Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, les Cris et les Naskapis pourront aller au-delà des restrictions inhérentes contenues dans la Loi sur les Indiens et assumer par ce moyen le plein contrôle de l’administration de leurs communautés et la gestion des terres des catégories IA et IA-N. » 3

Par conséquent, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec prévoit « pour les Cris et les Naskapis, un régime d’administration locale organisé et efficace, ainsi que l’administration, la régie et le contrôle par les bandes cries et la bande naskapie des terres des catégories IA et IA-N, ainsi que la protection des droits individuels et collectifs prévus aux Conventions. » 4

Ainsi, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, 1984, est la première loi au Canada qui fournit une certaine reconnaissance de l’autonomie gouvernementale autochtone. Elle redéfinit la relation entre le gouvernement du Canada et les peuples cris et naskapis.

Sauf aux fins de déterminer quels bénéficiaires cris et naskapis sont « Indiens » dans le sens de la Loi sur les Indiens, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec remplace la Loi sur les Indiens qui ne s’applique pas aux Premières nations cries et naskapies. La Loi sur les Indiens ne s’applique pas non plus aux terres de catégorie IA ou IA-N ou aux affaires des terres de ces catégories pour les bandes cries et la bande naskapie respectivement.

Le projet de loi C-28, une Loi modifiant la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, a été déposé à la Chambre des Communes le 27 avril 2009. Cette mesure législative a pour objet de mettre en œuvre les engagements du Canada contenus dans les ententes visant à régler des problèmes de longue date découlant de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ). Plus particulièrement, la législation modifie la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec en ce qui a trait aux bandes cries et aux terres de catégorie IA,

À l’exception de la Partie XII (disposition sur l’établissement, les tâches et le fonctionnement de la Commission Crie-Naskapie) de la Loi, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est entrée en vigueur le 3 juillet 1984.

La Partie XII de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec sur l’établissement, les mandats et le fonctionnement de la Commission Crie-Naskapie est entrée en vigueur le 1 décembre 1984.

Constituée conformément à l’article 158 de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, la Commission Crie-Naskapie a pour mission « dans les deux ans … (d’)établir un rapport sur l’application de la présente loi » 5 et de le présenter au ministre qui « le fait déposer devant chaque chambre du Parlement » 6.

La Commission fait aussi des rapports sur la mise en œuvre de la CBJNQ et de la CNEQ étant donné que des articles précis de ces ententes abordent les pouvoirs et responsabilités des gouvernements locaux des Premières nations cries et naskapies. La Commission présente des rapports sur la mise en œuvre de ces ententes en vertu de l’aliéna 21(j) de la Loi qui stipule qu’une des missions de la bande est « d’exercer les pouvoirs et fonctions que les lois fédérales ou leurs règlements ainsi que les conventions lui confèrent ou conféraient à la bande antérieure » 7.

La Commission a aussi organisé des audiences spéciales sur la mise en œuvre afin de préparer le rapport courant. Ces audiences qui se sont déroulées à Montréal du 8 au 10 février 2012 ont permis aux représentants des Nations cries et naskapies et au gouvernement du Canada d’exprimer leurs préoccupations et de discuter de leurs problèmes. Les constatations et le ton du Rapport de la Commission sont basés sur la compréhension et l’analyse des problèmes et préoccupations soulevés au cours de ces audiences.

Le présent rapport est le treizième (13e) rapport bisannuel présenté au Ministre conformément au paragraphe 165 (1) et conformément au paragraphe 171 (1) de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Le chapitre 2 du présent rapport fournit des réflexions sur les tâches, possibilités, défis et direction future de la Commission Crie-Naskapie au moment où les Eeyous d’Eeyou Istchee envisagent et planifient le gouvernement de la Nation crie et la constitution des Cris.

Le chapitre 3 du présent rapport décrit l’évolution de la gouvernance eeyoue par l’entremise de la construction de la nation au fur et à mesure que le sens et la pratique de la gouvernance eeyoue a été et continue d’être redéfinie par les Eeyous en se fondant sur les droits, les libertés, les valeurs, la culture, le droit traditionnel et les coutumes ainsi que sur l’intention et l’esprit de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de ses conventions connexes.

Depuis sa réponse au Rapport 2002 de la Commission, le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada continue de fournir une réponse détaillée aux recommandations de la Commission. Les réponses du ministère représentent une approche complètement différente relative à ses relations avec la Commission. Il semble que le ministère désire améliorer ses relations avec la Commission de même qu’avec les communautés cries et naskapies. Ces réponses du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada sont utiles étant donné que la responsabilité du ministre de faire des rapports sur la mise en œuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois a pris fin en 1999. (En vertu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois, entre 1978 et 1998, le ministre des Affaires indiennes et du Nord Canada devait présenter un rapport sur la mise en œuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois à la Chambre des communes.) Par conséquent, la Commission rapporte les réponses du ministère et transmet ses commentaires dans ses rapports biennaux. Le chapitre 4 du Rapport fournit les réponses du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada et autres intervenants aux recommandations de la Commission présentées dans son Rapport 2010. De cette manière, les Nations cries et naskapies sont au courant des réponses du ministère relatives à leurs problèmes et inquiétudes spécifiques.

Le chapitre 5 (Préoccupations et problèmes de la Nation Eeyou (Cris) et de la Nation naskapie de Kawawachikamach) du présent rapport souligne les problèmes et préoccupations des Nations cries et naskapies tels qu’ils ont été exprimés au cours des audiences spéciales de la Commission sur la mise en œuvre.

Depuis sa création, l’Association des trappeurs cris (ATC) a traversé une période de changements rapides du paysage et de l’environnement politiques, économiques et sociaux de la société eeyoue et d’Eeyou Istchee. La présentation de l’ATC à la Commission Crie-Naskapie le 10 février 2012 décrit le rôle de l’ATC dans le contexte de ces grands changements de la société eeyoue et fournit à la Commission des observations sur des enjeux qui devront être abordés au cours des années à venir. Le chapitre 6 du présent rapport décrit ces changements et défis.

Au fur et à mesure que les leaders et peuples d’Eeyou considèrent les différentes structures et processus variés qu’ils ont l’intention d’inclure dans le gouvernement de la Nation crie et la constitution de la Nation crie, dans le chapitre 7 du présent rapport, la Commission Crie-Naskapie présente des idées à évaluer pour la structure et le processus possibles d’un organe « indépendant » auprès duquel les membres de la Nation pourront soulever les problèmes et préoccupations, faire des suggestions, participer à une audience indépendante et obtenir des constatations et recommandations impartiales.

Les chapitres 8 et 9 du présent rapport décrivent respectivement les commentaires, recommandations et conclusions de la Commission.

NOTES DE LA FIN

Quelques réflexions sur la Commission Crie-Naskapie

Chapitre deux

Maintenant que la Nation crie d’Eeyou Istchee se penche sur des questions de gouvernance, plus particulièrement l’établissement d’une Constitution de la Nation crie, il est temps de réfléchir au travail de la Commission Crie-Naskapie au cours des dernières vingt-six années et d’examiner la façon dont cette expérience peut être utile dans le cadre du processus actuel.

Le travail de la Commission Crie-Naskapie

La Commission Crie-Naskapie poursuit son travail depuis sa création en 1986. Pendant cette période, elle a assumé les responsabilités qui lui ont été conférées par la Loi et qui ont été les suivantes :

Processus actuels de la Commission : possibilités et défis

Dans le cadre de leur travail, les membres de la Commission ont noté tant les forces que les faiblesses des mesures législatives actuelles qui régissent les tâches et pouvoirs de la Commission. Ils savent aussi à quoi correspondront les réalités du fonctionnement futur de la Commission ou d’un organe semblable qui pourra être établi.

Selon sa constitution actuelle, la Commission a la latitude voulue pour tenir compte de toute preuve, information ou opinion concernant la mise en œuvre de la Loi et des sujets connexes, de tirer les conclusions et de faire les recommandations qu’elle juge adéquates. Ces constatations, conclusions et recommandations constituent la base des rapports bisannuels et doivent, en vertu de la Loi, être soumises au ministre qui doit ensuite les déposer dans les deux Chambres du Parlement. Ceci confère à la Commission la possibilité quasiment unique de garantir qu’elle communiquera les points de vue des organisations et individus cris et naskapis qui soulèvent des questions, idées et préoccupations auprès de la Commission à l’attention du ministre et des représentants officiels mais aussi aux députés et aux sénateurs. Le fait que les ordres de renvoi, tant du Sénat que de la Chambre des communes exigent que les rapports de la Commission soient transmis aux comités adéquats et que les membres de la Commission sont souvent invités à faire des présentations à ces comités, améliore davantage la sensibilisation des sénateurs et des députés au sujet des problèmes qui existent dans les collectivités cries et naskapies.

Ceci ne veut pas nécessairement dire que les problèmes soulevés seront abordés de la façon désirée par tout le monde. Cela veut cependant dire qu’ils seront entendus et qu’il sera plus probable qu’un suivi sera effectué contrairement à si ces problèmes n’avaient pas été exposés de la sorte.

Le traitement des réclamations et des plaintes en vertu de la législation actuelle représente à la fois une possibilité et un défi. Sur une note positive, le mécanisme permet à toute personne ou organisation de soulever, à l’intérieur des paramètres des dispositions de la Loi, une représentation auprès de la Commission qui est perçue comme organisme indépendant et autonome.

« 165. (1) La Commission a pour mission… (b) sous réserve des paragraphes (2) et (3), d’enquêter sur les réclamations qui lui sont présentées concernant l’application de la présente loi, notamment l’exercice ou le défaut d’exercice de pouvoirs ou fonctions conférés sous le régime de cette loi. »

Au cours des dernières années, la Commission a reçu des représentations d’individus cris et naskapis, de gouvernements et d’organisations cries et naskapies, du ministère des Affaires indiennes (ancien nom) et d’autres intervenants. En général, la Commission a noté la bonne collaboration tant des groupes qui ont fait des représentations que ceux qui y ont répondu.

Les défis possibles du processus comprennent le fait que la Commission a seulement le pouvoir de faire des recommandations et qu’elle ne peut pas prendre de décisions exécutoires. Toutefois, en pratique ceci ne constitue pas un problème réel. Si la Commission possédait de tels pouvoirs, ses décisions seraient bien sûr, assujetties à des appels et en fait, les résultats serviraient à ajouter une autre étape au processus judiciaire. Mais surtout, si la Commission utilisait le modèle antagoniste accompagné de toutes ses protections officielles et souvent complexes du point de vue de la procédure, cela correspondrait à un processus plus lent et beaucoup plus onéreux.

Vu ces considérations, le rôle actuel de la Commission d’élaborer des recommandations plutôt que de prendre des décisions est probablement exactement le rôle qu’il faut. Le système des tribunaux peut toujours s’occuper des conflits et des plaintes pour lesquels une décision exécutoire est le résultat attendu. Les procédures de la Commission encouragent une approche non antagoniste et cette approche, selon la Commission est souhaitable surtout pour les dossiers impliquant des individus et leur communauté ou les gouvernements des Nations.

La Commission n’est pas habilitée à citer quiconque à comparaître et ne peut donc pas exiger qu’une personne comparaisse, qu’elle fournisse des preuves, qu’elle produise des documents, etc. Dans certains cas, cette situation pourrait être problématique; cependant, en pratique cet état des choses n’a pas vraiment causé de problème. Si la Commission pouvait délivrer une assignation à comparaître, etc., les individus pourraient avoir le droit de demander l’annulation de l’assignation à comparaître et par conséquent, entraîner le dépôt de procédures judiciaires formelles, l’utilisation accrue des avocats, etc. Cette situation rendrait les processus de la Commission moins informels, plus coûteux au niveau du temps, plus onéreux et moins en mesure de conserver une approche non antagoniste dans la collectivité.

En conclusion, en se basant sur leur expérience de plusieurs années, les commissaires pensent que le pouvoir actuel de la Commission de faire des recommandations plutôt que de prendre des décisions est une bonne chose et devrait continuer.

La réalité changeante du cadre de travail de la Commission

En 1986, lorsque la Commission a commencé ses activités, elle était nouvelle et était aussi un organe unique de plusieurs façons. Aucune autre Première nation n’avait ce genre d’organe « de surveillance » indépendant et enchâssé dans la législation. À ce moment-là, on ne connaissait pas les mécanismes à la disposition de la Commission pour interagir efficacement avec les groupes politiques, bureaucrates et communautaires ainsi qu’avec les personnes à titre individuel. L’expérience a permis d’en apprendre beaucoup. Certains facteurs qui influencent l’efficacité de la Commission ont changé et d’autres n’ont pas changé. La Commission elle-même a évolué et les commissaires espèrent que ces changements ont amélioré l’efficacité de la Commission.

Un facteur qui reste encore problématique est la mesure dans laquelle le ministre est capable d’être efficace, non seulement pour s’occuper précisément des recommandations de la Commission, mais aussi pour maîtriser l’étendue et la profondeur des orientations des vastes responsabilités légales, politiques, financières et de programmes de son portefeuille.

Selon notre expérience, plusieurs éléments limitent l’habileté des ministres de maîtriser efficacement l’étendue et la profondeur du contrôle de leur portefeuille :

Orientations futures

À l’heure actuelle, la Nation crie d’Eeyou Istchee est en train de développer une constitution pour la Nation. L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee dresse la liste des questions que les parties ont convenu d’aborder, y compris [traduction] « une révision du rôle de la Commission Crie-Naskapie, et plus particulièrement son droit de regard pour éviter la reproduction des processus ou organes prévus en vertu de la présente Entente ou l’Entente de gouvernance ». 1

En 1991, le Rapport de l’enquête sur la Commission Crie-Naskapie (le « Rapport Cowie ») a présenté de nombreuses recommandations détaillées pour lesquelles aucun suivi n’a été effectué. Ces recommandations devraient être révisées et il faudrait en tenir compte lorsque viendra le temps de déterminer l’avenir de la Commission Crie-Naskapie.

Si la décision prévoit de continuer d’utiliser une commission indépendante et autonome, il faudrait tenir compte d’un certain nombre de questions. En voici certains éléments :

Des discussions plus larges pourraient servir à déterminer si une commission future devrait avoir un rôle à jouer sur les questions qui impliquent la province tout comme elle l’a pour les dossiers qui touchent le gouvernement fédéral. Un tel changement exigerait soit un engagement officiel (législatif) ou informel du Québec.

Des modifications récentes à la Loi, y compris le rôle de l’Administration régionale crie pour l’adoption de lois, sont de nouveaux éléments assujettis à une évaluation de la Commission, au même titre que les règlements administratifs du conseil de bande. Il faudrait évaluer les répercussions de ce nouveau rôle.

Enfin, certaines questions techniques ayant trait aux commissions, tribunaux et conseils autochtones en général s’appliquent et doivent être évaluées au cours de la détermination de l’avenir de la Commission ou d’un organe similaire. (Le chapitre 7 discute de ces questions de façon plus détaillée.)

NOTE DE LA FIN

Chapitre trois

Construction de la Nation eeyou par l’entremise de la gouvernance eeyoue à déterminer leurs propres structures gouvernementales et la nature de leurs relations avec le Canada et le Québec.

1.Introduction

Lorsque les chefs eeyous se sont réunis à Mistissini, Eeyou Istchee, les 29 juin, 30 juin et 1 juillet 1971, ils ont pris des décisions importantes. Lors de cette réunion, pour la première fois de leur histoire, les chefs eeyous des diverses communautés eeyous se sont réunis pour discuter de leurs droits, de leurs intérêts et de leur avenir. En plus de décider de s’opposer au Projet du complexe hydroélectrique de la baie James qui venait alors d’être annoncé, les chefs eeyous ont décidé d’agir ensemble, en tant que Nation, et de parler d’une seule voix. En décidant par consensus d’adopter ce plan d’action, les Eeyous ont exercé leur autodétermination, comme pouvoir collectif de choisir. Cette décision de reconnaître et d’admettre l’importance des droits collectifs, des intérêts collectifs, des responsabilités collectives et de l’action collective en tant que Nation a donné lieu au renforcement de l’autonomie des Eeyous d’Eeyou Istchee en ce qui concerne la protection de leurs droits et de leurs intérêts. Cette action et cette expression de l’unité des Eeyous, en tant que Nation, pour la protection de leurs intérêts et de leurs droits collectifs marquaient également le début d’une forme du gouvernement de la Nation Eeyou. Cela a mené, en 1974, à l’établissement du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee).

Avant tout, les Eeyous ont exercé et continueront d’exercer leur droit à l’autodétermination, qui est désigné par l’expression « Weesou-way-tah-moo-wun » dans la langue des Eeyous d’Eeyou Istchee. Les mots « Eeyou Weesou-way-tah-moo-wun » se rendent par « détermination par les Eeyous » ou autodétermination des Eeyous, ce qui correspond au pouvoir de choisir en matière d’action.

L’autonomie gouvernementale est une des voies que les Eeyous ont suivies dans la mise en œuvre de leur droit à l’autodétermination. L’autonomie gouvernementale découle de l’exercice du droit à l’autodétermination. Essentiellement, il s’agit de la capacité d’évaluer et de répondre à ses propres besoins sans influence, autorisation ou restriction externe. Les Eeyous ont revendiqué et continueront d’exercer leur droit inhérent à l’autodétermination, lequel découle de leur statut de peuple souverain ou distinct. En vertu de ce droit, les Eeyous sont habilités

L’exercice et la pratique de la Eeyou Tapay-tah-jeh-souwin (la gouvernance eeyoue) et de l’autonomie eeyoue découlent de l’exercice de la Eeyou Weesou-way-tah-moo-wun ou autodétermination des Eeyous. Plus particulièrement, dans leurs relations avec les gouvernements non eeyou, les Eeyous ont élaboré et mis en œuvre une approche instinctive à l’égard de l’évolution de leur gouvernance. Dans certains cas, les Eeyous ont établi et déterminé leurs relations avec les gouvernements non eeyou par la conclusion de traités et d’accords avec eux. Ainsi, la Eeyou Tapay-tah-jeh-souwin (la gouvernance eeyoue) n’est pas qu’un projet pour l’avenir. Elle a déjà été mise en application, elle s’applique toujours et elle continuera de s’appliquer conformément aux lois, aux droits et aux aspirations des Eeyous.

Selon l’expérience des Eeyous et dans une large mesure, les relations des Eeyous avec le Canada et le Québec déterminent également la coexistence des Eeyous avec les gouvernements non eeyou. Néanmoins, les Eeyous ont élaboré leurs systèmes de gouvernance et leur processus directionnel.

Dans les premiers contacts et les premières relations des Eeyous avec les gouvernements non eeyou, le gouvernement du Canada en particulier a exercé une domination et un contrôle complets sur les vies et les affaires des Eeyous. Finalement, avec le consentement des autorités fédérales, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont surtout joué le rôle d’administrateurs et de gestionnaires, exécutant les programmes et assurant la prestation des services conçus par les autorités fédérales. Ainsi, dans cette relation particulière, les Eeyous étaient surtout responsables de l’administration, plutôt que de la gouvernance. Dans ce cas, comme d’autres Premières nations de partout au Canada, les Eeyous ont assumé la responsabilité et ont géré les programmes fédéraux du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (appelé actuellement Affaires autochtones et Développement du Nord Canada) et des autres ministères fédéraux.

Toutefois, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont changé ce mode de gouvernance par la négociation et la mise en application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ), un traité moderne. Par ses gouvernements régionaux et locaux, la Nation Eeyou a assumé une autorité et un pouvoir plus importants.

De plus, les Eeyous ont exercé leur forme de gouvernance en tant que Nation par le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie. Ce dernier, une autorité administrative régionale eeyoue, a été mise sur pied en vertu des dispositions de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Le peuple eeyou a assumé sa propre gouvernance, revendiquant les droits et les capacités non seulement de gérer l’exécution des programmes et la prestation des services, mais également de construire sa nation selon ses intentions, d’établir et d’exécuter des lois, d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies à long terme de développement économique et communautaire, de négocier de nouvelles relations avec les autres gouvernements, et d’exercer une compétence réelle sur ses terres et les gens qui les habitent. Les nouveaux accords de relations plus récents entre les Eeyous et le Canada et le Québec, et l’accord-cadre sur la gouvernance avec le Québec renforceront la gouvernance eeyoue au niveau local et de la Nation. En entreprenant ce cheminement, le peuple et la Nation Eeyou ont tracé la voie menant à l’autonomie gouvernementale eeyoue. Ce cheminement et le passage à l’autonomie gouvernementale constituent un aspect fondamental de la construction de la Nation, alors que les Eeyous d’Eeyou Istchee ont revendiqué de nouveau leur propre gouvernance, comme droit et activité autochtones.

Cependant, la construction de la Nation et, par le fait même, l’autonomie gouvernementale sont des activités continues qui doivent contribuer à développer et à maintenir une société eeyoue fonctionnelle sur les plans économique, social, culturel et politique.

Pour les Eeyous, entre autres buts, la construction de la Nation consiste à maintenir et à développer leur culture et leur identité, à soutenir les institutions autonomes, et à maintenir leurs façons traditionnelles et propres de gagner leur vie, et, ainsi, à déterminer leur mode de vie actuel. Il s’agit de permettre aux gens de faire leurs propres choix en ce qui concerne leur vie et de maintenir des formes appropriées de relations avec leur propre société et les autres sociétés.

Afin de bien comprendre l’évolution de la gouvernance eeyoue par la construction de la Nation, il faut d’abord examiner quel était son état avant la négociation et la signature de la CBJNQ par les gouvernements eeyou et non eeyou et les autres parties.

2. La gouvernance eeyoue avant la Convention de la Baie James et du Nord québécois de 1975

Le leadership et la vision dont les Eeyous responsables de conclure les traités ont fait preuve ont mené la Nation Eeyou dans son cheminement vers son traité moderne, la Convention de la Baie James et du Nord québécois, qui a été signée, le 11 novembre 1975, par des représentants des Eeyous, du Canada et du Québec, entre autres. Ce cheminement de conclusion de traités présente les valeurs et les principes fondamentaux du leadership : la vision, le renforcement de l’autonomie, l’unité, l’engagement, l’humilité, le respect, la confiance, la participation, la diversité, la créativité, l’intégrité et la communauté. Il s’agit d’un cheminement de leadership visionnaire fondé sur la formation et la clarification de ses propres idées et de ses propres rêves, l’échange de ces idées, la transformation de ces rêves en actions, et l’obtention de l’aide des autres pour concrétiser ces rêves et ces idées. C’est également l’histoire des jeunes de l’époque, qui ont travaillé avec les aînés et les chefs, et certains comme chefs, afin de réaliser la vision et les buts de la Nation. Ce cheminement particulier concerne le renforcement de l’autonomie du peuple, la construction de la Nation et la quête de justice sociale.

Quelle était la vision des responsables de la conclusion des traités et des chefs eeyous au début des années 1970?

Au début des années 1970, la vision des Eeyous consistait en une volonté et un désir profonds de changer leur situation et leur statut économiques, politiques et sociaux, manifestés par l’histoire, l’expérience et l’état du peuple et de la Nation Eeyou de l’époque.

Voici un résumé général et bref de l’état et de la situation sociopolitiques des Eeyous, de leurs administrations et gouvernements locaux, et de leurs relations gouvernementales au début des années 1970, avant la signature de la CBJNQ :

Par conséquent, la vision des chefs et des responsables de la conclusion des traités eeyous impliquait de changer la situation des Eeyous et de rendre le monde plus clément aux Eeyous d’Eeyou Istchee par la construction de la Nation. Les Eeyous voulaient maintenir et protéger le Eeyou Pimaatehsouwin (le mode de vie eeyou) et la Eeyou Eehdou-wun (la culture eeyoue et la façon de faire eeyoue). Les Eeyous voulaient voir leurs droits reconnus et protégés. Ils voulaient maintenir leur mode de vie traditionnel, tout en permettant à ceux qui le souhaitaient de participer à l’économie contemporaine basée sur les salaires. Les Eeyous voulaient contrôler leurs propres affaires, institutions, communautés et gouvernements, autrement dit, avoir l’autonomie gouvernementale. Ils voulaient le développement économique et communautaire, mais selon leur volonté. Ils voulaient avoir le respect et participer au développement et à la gestion des ressources naturelles d’Eeyou Istchee. Ils voulaient un développement des ressources durable et responsable qui tiendrait compte de leurs préoccupations et de leurs intérêts. Autrement dit, les Eeyous voulaient changer leur situation et rendre leur monde meilleur. Les Eeyous d’Eeyou Istchee partageaient cette vision commune. Elle a eu pour effet de les unir en une seule nation avec une seule voix. Cette unité a permis la construction de la Nation et a renforcé et rendu plus autonome la Nation Eeyou. Cependant, les Eeyous ont dû attendre patiemment les circonstances et le moment opportuns pour concrétiser ces changements.

La Convention de la Baie James et du Nord québécois de 1975 a découlé de ce qui était initialement l’opposition des Eeyous au complexe hydroélectrique proposé pour Eeyou Istchee. En avril 1971, le Québec et Hydro-Québec avaient annoncé le premier grand projet de complexe hydroélectrique sans consulter les Eeyous, sur lesquels le projet proposé aurait un impact profond. Le litige lancé par les Eeyous a débouché, suivant un processus de traité, sur un règlement négocié concernant les droits des Eeyous et le développement des ressources naturelles d’Eeyou Istchee. Pour les Eeyous, le processus de traité était la voie choisie pour faire avancer le processus de construction de la Nation, protéger leurs droits, comme celui de l’autonomie gouvernementale, et redéfinir leurs relations avec le Canada et le Québec

3. La Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions complémentaires et la gouvernance eeyoue

Les négociations qui ont eu lieu de 1973 à 1975 et qui ont mené à la signature de l’accord de principe (le 15 novembre 1974) et de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (le 11 novembre 1975) étaient une occasion rare pour les Eeyous d’obtenir la reconnaissance de bénéfices, de garanties et de droits particuliers pour leur mode de vie et leur société distincte, basés sur leur relation spéciale et centrale avec leurs territoires historiques et traditionnels, à savoir Eeyou Istchee. Ces négociations et la Convention de la Baie James et du Nord québécois ont aussi fourni aux Eeyous le moyen de réaliser, dans une certaine mesure, leur vision pour l’amélioration et l’avancement de la gouvernance eeyoue. Cependant, les Eeyous ont vu leurs efforts restreints par l’environnement politique et juridique des années 70. Ces restrictions ont donné lieu à un traité très complexe et qui laisse perplexe.

Le système juridique de pouvoirs législatifs limités et supervisés des bandes prévu par la Loi sur les Indiens était une entrave à l’exercice adéquat de l’autonomie et du gouvernement locaux. En vertu de la Loi sur les Indiens, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (dont le ministère s’appelle actuellement Affaires autochtones et Développement du Nord Canada) avait un droit de désaveu et de veto sur les décisions et les lois du chef et du conseil de chaque communauté eeyoue et des autres communautés des Premières nations du Canada. De plus, la Loi sur les Indiens représentait un obstacle grave au développement économique, étant donné qu’elle ne donnait pas aux bandes le statut de personne morale ayant la capacité d’assumer des contrats et d’autres responsabilités et obligations juridiques. En outre, la Loi sur les Indiens et le ministère des Affaires indiennes en sont venus à être considérés par les Eeyous d’Eeyou Istchee comme des instruments et des agents de domination et d’intrusion dans les affaires eeyoues et la gouvernance eeyoue.

En 1970, les Eeyous ont compris et ils continuent de comprendre que le progrès de l’autonomie gouvernementale, du développement social et économique et de l’éradication des maux sociaux qui les affligent ne peuvent et ne pourraient pas être accomplis à l’intérieur des limites imposées par la Loi sur les Indiens et par l’organe administratif dominateur du ministère des Affaires indiennes. Par conséquent, pour les Eeyous, le contrôle étendu et la domination exercés par le gouvernement fédéral sur la société eeyoue par la Loi sur les Indiens et le ministère des Affaires indiennes sont devenus les catalyseurs du changement dans les relations entre les Eeyous et le gouvernement fédéral.

Ainsi, la Nation Eeyou d’Eeyou Istchee a négocié un changement à ses relations avec le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec grâce aux modalités de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Toutefois, la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois n’a pas marqué la fin des conflits, des différends et des négociations. Elle a plutôt signalé le début d’une interaction continue entre les Cris d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada et Hydro-Québec sur la mise en œuvre de la lettre, le sens et l’esprit des modalités de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Cette interaction continue entre les Cris, le Canada et le Québec a souvent donné lieu à des confrontations et des conflits concernant le défaut du Canada et du Québec de respecter leurs engagements, responsabilités et obligations envers les Cris prévus par certaines modalités de la CBJNQ.

Afin d’améliorer et de faciliter la mise en application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, les accords suivants ont été conclus :

La Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions complémentaires ont changé considérablement et continueront de changer le paysage économique, social et politique d’Eeyou Istchee. Plus particulièrement, entre autres buts, ces accords reconnaissent et promeuvent la gouvernance eeyoue, comme la gouvernance traditionnelle des Eeyous Indoh-hoh Istchee, la gouvernance publique eeyoue, la gouvernance locale eeyoue et la gouvernance de la Nation Eeyou.

3.1 La gouvernance traditionnelle des Eeyous Indoh-hoh Istchee – Indoh-hoh Istchee Ouje-Maaooch (le système de gouvernance traditionnel eeyou des terrains de chasse)

Les Eeyous d’Eeyou Istchee se considèrent comme les gardiens, les intendants et les responsables d’Eeyou Istchee. Par conséquent, en tant que nation, les Eeyous ont établi des lois et des coutumes traditionnelles concernant l’utilisation, l’occupation et la gouvernance d’Eeyou Istchee.

En premier lieu, les Eeyous ont établi et mis en application le système des « Indoh-hoh Istchee » dans le cadre du régime foncier eeyou. Les Eeyous ont établi des unités Indoh-hoh Istchee partout dans Eeyou Istchee. (Le système des Indoh-hoh Istchee existait avant celui des terrains de trappage, lequel a été introduit pour la gestion de l’exploitation des animaux à fourrure. En fait, le plan organisationnel du gouvernement du Québec concernant ses réserves de castors et ses terrains de trappage enregistrés reprend certains éléments du système des Eeyous Indoh-hoh Istchee. Par conséquent, il ne faut pas considérer que le système de terrains de trappage enregistrés remplace ou correspond au système des Eeyous Indoh-hoh Istchee. Le système de terrains de trappage enregistrés est un outil pour la gestion des animaux à fourrure par le gouvernement du Québec. Avant la signature de la CBJNQ, les terrains de trappage enregistrés faisaient l’objet de licences sous le régime des lois du Québec régissant la chasse et la pêche.)

La CBJNQ reconnaît la continuité du système des « terrains de trappage cris ». Le système des « Indoh-hoh Istchee » des Eeyous est le système des « terrains de trappage cris » envisagé par la CBJNQ. En fait, l’alinéa 24.1.9 du paragraphe 24.1 de l’article 24 de la CBJNQ définit un terrain de trappage cri comme « tout endroit où les activités relatives à l’exploitation sont menées traditionnellement sous la surveillance d’un “maître de trappage cri” » 1. Les terrains de trappage cris envisagés par la Convention sont censés correspondre aux Indoh-hoh Istchee définis et établis par les lois et les coutumes traditionnelles des Eeyous. Actuellement, on compte plus de trois cents (300) Indoh-hoh Istchee dans l’ensemble d’Eeyou Istchee.

En deuxième lieu, afin de permettre l’exercice de la gouvernance et de l’autorité sur chaque Indoh-hoh Istchee, les Eeyous ont établi et mis en application le système des Indo-hoh Istchee Ouje-Maaooch ou Indoh-hoh Ouje-Maaooch (ci-après appelés Indoh-hoh Ouje-Maaoo). Les Indoh-hoh Ouje-Maaoo sont généralement appelés « maîtres de trappage » dans la CBJNQ.

L’alinéa 24.1.8 du paragraphe 24.1 de l’article 24 de la CBJNQ définit un maître de trappage cri comme « tout Cri reconnu par une communauté crie comme le responsable de la surveillance des activités relatives à l’exploitation dans un terrain de trappage cri » 2.

Toutefois, selon les lois et les coutumes traditionnelles, le Indoh-hoh Ouje-Maaoo a des responsabilités qui dépassent les rôles et les fonctions de surveillance. En général, le Indoh-hoh Ouje-Maaoo a l’autorité et la responsabilité de l’intendance et la garde adéquates du Indoh-hoh Istchee. En vertu des lois et des coutumes traditionnelles, les tâches et les responsabilités du Indoh-hoh Ouje-Maaoo comprennent, entre autres, ce qui suit :

Les Weenbekou Eeyou (les Eeyous de la côte) ont établi le système des Paasd-heejeh Ouje-Maaooch expressément aux fins de la gestion de la chasse à l’oie sur leur Indoh-hoh Istchee respectif. Le Paasd-heejeh Ouje-Maaoo est généralement le même Eeyou qui joue le rôle de Indoh-hoh Ouje-Maaoo ou Indoho Istchee Ouje-Maaoo.

De plus, par leurs lois et leurs coutumes traditionnelles, les Eeyous ont établi des règles et des pratiques pour un code de conduite visant les activités dans l’ensemble d’Eeyou Istchee et sur chaque Indoh-hoh Istchee.

L’article 30 (intitulé « Programme de sécurité du revenu relatif aux chasseurs et aux trappeurs cris ») de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et le chapitre 3 (intitulé « Foresterie ») de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec renforcent l’autorité des Indoh-hoh Ouje-Maaoo. Dans le cadre du Programme de sécurité du revenu, le statut d’un Indoh-hoh Istchee comme territoire d’exploitation rapproché ou éloigné peut seulement être changé avec la collaboration du Indoh-hoh Ouje-Maaoo responsable. De plus, en vertu des modalités de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec, les Indoh-hoh Istchee doivent être utilisés comme base pour la délimitation des unités de référence territoriales pour la gestion du régime forestier adapté. Les sites d’intérêt spécial pour les Eeyous doivent être identifiés et cartographiés par les Eeyous en collaboration avec le Québec. Il est interdit de réaliser des activités de gestion forestière dans ces zones sans l’autorisation du Indoh-hoh Ouje-Maaoo.

3.2 Gouvernance de conseil, gouvernance publique et régimes de cogestion

La Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions complémentaires prévoient ou envisagent la création de personnes morales et de personnes juridiques régionales. Par ces personnes juridiques, les Eeyous d’Eeyou Istchee exercent une gouvernance de conseil, puisque ces entités sont régies par un conseil d’administration ou un organe semblable.

Dans plusieurs cas où ces entités assurent l’exécution de programmes et la prestation de services par l’intermédiaire des entités principales, comme l’Administration régionale crie, la Commission scolaire crie et le Conseil Cri de la santé et des services sociaux de la Baie James, les Eeyous exercent depuis un certain temps et continuent d’exercer une forme d’administration autonome des programmes et services gouvernementaux. De plus, par la Commission scolaire crie et le Conseil Cri de la santé et des services sociaux de la Baie James, les Eeyous d’Eeyou Istchee exercent une forme de gouvernance publique sur les questions relevant de leurs compétences et de leurs responsabilités.

Les Eeyous participent également à des régimes de cogestion avec le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada par l’intermédiaire des entités ou des organes créés par la Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions complémentaires. Ces entités sont généralement des organes consultatifs pour les autorités gouvernementales provinciales, fédérales et eeyoues.

De surcroît, dans certains cas, les Eeyous d’Eeyou Istchee exercent une forme de cogestion des fonds, des programmes et des projets avec Hydro-Québec par l’intermédiaire des entités envisagées par la CBJNQ et les conventions complémentaires.

Afin de renforcer la gouvernance eeyoue et de concrétiser l’idée d’un nouveau partenariat et d’une relation redéfinie entre les Eeyous d’Eeyou Istchee et les gouvernements du Canada et du Québec, les institutions principales ci-dessous ont été établies par les dispositions législatives édictées et les accords conclus conformément aux modalités de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et des conventions complémentaires :

De surcroît, l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec et ses conventions accessoires établissent ou envisagent la création des organes ou personnes juridiques principaux suivants :

Aux fins du développement économique, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont établi les entreprises et les sociétés principales suivantes :

Aux fins du développement culturel et social, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont établi les entités et les sociétés principales suivantes :

De plus, les Premières nations eeyoues locales et leurs gouvernements respectifs ont établi d’autres sociétés et personnes juridiques pour le développement économique. À titre d’exemples, mentionnons Mistuk (Waswanipi), Tawich (Wemindji), la Wabannutao Eeyou Development Corporation (Eastmain) et Chisasibi Enterprises Reg’d (Chisasibi).

3.3 Gouvernement local eeyou

En vertu des modalités de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, Eeyou Istchee a été divisé en trois (3) catégories de terres. Les terres de la catégorie IA, relevant de la compétence fédérale, et de la catégorie IB, relevant de la compétence provinciale, ont été mises de côté à l’usage et aux bénéfices exclusifs des Cris, et sous l’administration et le contrôle des gouvernements locaux cris.

Conformément aux obligations du gouvernement fédéral envers les Eeyous en vertu de la CBJNQ, une loi fédérale spéciale, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, édictée par le Parlement et sanctionnée le 14 juin 1984, prévoit un système efficace et ordonné de gouvernement local cri et naskapi, et l’administration, la gestion et le contrôle des terres communautaires locales par les Premières nations naskapies et cries, respectivement. La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec remplace la Loi sur les Indiens pour la Nation crie d’Eeyou Istchee et la Nation naskapie de Kawawachikamach. Au cours des négociations qui ont mené à la signature de la CBJNQ, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont rejeté le régime de gouvernement local imposé, supervisé et limité de la Loi sur les Indiens. Par conséquent, sauf pour déterminer quels bénéficiaires cris et naskapis sont des « Indiens » au sens de la Loi sur les Indiens, cette Loi ne s’applique pas aux Premières nations naskapies et cries, ni ne s’applique sur ou à l’égard de leurs terres communautaires.

De surcroît, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec établit la Commission Crie-Naskapie, en lui donnant le mandat de présenter un rapport biennal sur la mise en application de ladite Loi et les questions connexes. À ce jour, conformément à son mandat, la Commission Crie-Naskapie a produit, au total, douze (12) rapports biennaux et les a présentés au ministre des Affaires indiennes, qui dépose chaque rapport devant chaque Chambre du Parlement. Les constatations et les recommandations de la Commission Crie-Naskapie concernent les questions et les préoccupations des communautés cries et naskapies, la mise en application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois, et l’exécution de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Plus particulièrement, la Commission a recommandé l’apport de modifications pertinentes à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, afin de renforcer et de promouvoir le gouvernement local eeyou. Cependant, à ce jour, la Loi n’a pas été modifiée pour renforcer et promouvoir l’administration et le gouvernement locaux eeyous. Par conséquent, depuis son édiction par le Parlement du Canada il y a environ vingt-huit (28) ans, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec demeure un instrument immuable, inflexible et rigide, étant donné qu’elle n’évolue pas en fonction des réalités et des dynamiques changeantes du gouvernement local eeyou.

Ainsi, les Eeyous d’Eeyou Istchee n’ont pas encore réalisé ou atteint le plein potentiel du gouvernement local eeyou, dont la nature est dynamique et évolutive.

L’application adéquate de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec présente des difficultés pour toutes les parties concernées, et cette Loi n’a pas encore été appliquée ou modifiée adéquatement ou en conformité avec l’esprit et le sens de la CBJNQ, ou les besoins et les aspirations des Eeyous d’Eeyou Istchee pour une gouvernance locale efficace.

D’abord et avant tout, pour un gouvernement local efficace, il faut une base économique saine. À cet égard, les Cris et le gouvernement du Canada ont conclu un accord concernant un mécanisme pour le financement de l’administration et du gouvernement locaux cris et de l’administration régionale crie de certains services et programmes. Toutefois, le gouvernement du Canada insiste sur des accords de financement qui ne tiennent pas compte des réalités et des besoins changeants liés à l’autonomie gouvernementale des Eeyous. Ces accords de financement sont souvent assortis de conditions sous forme de contraintes politiques ultérieures.

La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec crée des sociétés de bandes ayant pour mandat de servir d’autorités gouvernementales locales. Sous le régime de la loi traditionnelle, les Eeyous ou la Nation Eeyou constituent une autorité autonome actuelle, traditionnelle et historique. Les Eeyous se considèrent comme l’autorité traditionnelle et historique pour l’exercice de l’autonomie gouvernementale. En pratique, le Canada délègue ce pouvoir aux sociétés de bandes en vertu de lois fédérales. Pour les Eeyous, le droit inhérent d’autonomie gouvernementale eeyoue ne devrait pas découler de l’autorité fédérale. En fait, les communautés cries se désignent elles-mêmes par l’appellation Eeyou/Eenou ou comme Premières nations, et non comme bandes ou sociétés de bandes.

Malgré le fait que la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec découle de traités, les Eeyous subissent toujours les répercussions des lois du Parlement et des caprices des fonctionnaires fédéraux dans l’interprétation et l’application des lois. Par conséquent, le gouvernement du Canada contrôle le processus et les résultats, afin de s’assurer que l’exercice du droit à l’autonomie gouvernementale dépend de son consentement. Cet arrangement particulier a tendance à obliger les Eeyous à établir des structures de gouvernances à l’image des lois fédérales et à composer avec ces structures par la suite. Toutefois, par définition, le droit inhérent des Eeyous à l’autonomie gouvernementale est un droit antérieur à l’autorité des gouvernements fédéral et provincial, et qui devrait exister indépendamment des programmes et des politiques de ces gouvernements non eeyou.

Pour ce qui est des administrations municipales eeyoues, en vertu de l’article 10 (intitulé « Administration locale Crie de la catégorie IB ») de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, des conseils municipaux et des corporations de villages cris ont été établis par lois provinciales pour l’administration et le contrôle des terres de la catégorie IB qui étaient et sont toujours habitées de manière permanente. De plus, les administrations municipales eeyoues exercent un pouvoir législatif sur les terres des catégories II et III, à l’égard des personnes autorisées à chasser et à pêcher et des conditions de la chasse commerciale. Les terres de la catégorie IB sont des municipalités administrées par des conseils municipaux eeyous qui ne bénéficient pas de fonds pour agir comme administrations municipales. C’est là un obstacle à la gouvernance eeyoue.

Malgré le régime juridique de gouvernement local de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et les autres pouvoirs et responsabilités des Eeyous en matière de gouvernance sous le régime de la CBJNQ et des conventions complémentaires, et des lois ultérieures, les Eeyous continuent d’intégrer leurs coutumes, leurs traditions et leurs lois à l’exercice et à la pratique du gouvernement local et de la gouvernance de la Nation Eeyou. Ainsi, la CBJNQ et les conventions complémentaires, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et les autres lois habilitantes du Québec et du Canada ne constituent pas la seule source du droit inhérent d’auto-gouvernance des Eeyous.

En général, les pouvoirs de gouvernance eeyous découlent également de pratiques de longue date basées sur les coutumes, les traditions et les lois eeyoues.

3.4 Gouvernance de la Nation Eeyou

Selon le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones de novembre 1996, le gouvernement de la nation est défini par les caractéristiques clés suivantes :

Il est clair que la gouvernance Eeyou/Eenou présente ces caractéristiques clés du gouvernement de la nation.

En plus du système traditionnel eeyou de gouvernance des Indo-hoh Istchee, il existe actuellement deux ordres de gouvernement à l’intérieur de la Nation Eeyou : le gouvernement local eeyou et le Eeyou Tapaytahchehsou. (Ce serait une erreur de penser que l’expression « Eeyou Tapaytahchehsou » désigne exclusivement l’Administration régionale crie, étant donné que les Eeyous considèrent le Chisa-Oujemaakan (le grand chef) et le Katach-skouwat Chisa-Oujemaakan (le vice-grand chef) du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) et les Oujemaakanch (les chefs eeyous des communautés locales) comme le Eeyou Ouje-Maaooch et, collectivement, comme le Eeyou Tapaytahchehsou.)

Étant donné que la Nation Eeyou est l’autorité de gouvernance historique et traditionnelle, les Eeyous d’Eeyou Istchee exercent la gouvernance à un niveau national, qui dépasse la gouvernance de conseil, la gouvernance publique et l’administration autonome de programmes et de services. Bien que le « gouvernement de la Nation » n’ait pas encore été constitué sous le régime des lois contemporaines, les Eeyous d’Eeyou Istchee considèrent le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie (GCC(EI)/ARC) comme une forme de gouvernement de la Nation.

Le règlement no 13 du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee), adopté lors d’une réunion spéciale du conseil d’administration du Grand conseil tenue à Val-d’Or, Québec, le 19 juin 1996, et sanctionné par les membres de l’Assemblée générale annuelle tenue à Waswanipi le 26 juin 1996, indique que la Corporation a pour mandat d’agir comme conseil régional et gouvernement régional. Il est donc clair que les Eeyous considèrent le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie comme une forme de gouvernement régional eeyou.

Le Grand conseil des Cris du Québec a été établi par les Eeyous d’Eeyou Istchee en août 1974 comme organisation politique et constitué en personne morale conformément aux lois fédérales. C’était d’abord un organe qui représentait la Nation crie pour la protection des droits et des intérêts des Eeyous. Par conséquent, le Grand conseil des Cris du Québec a représenté les Eeyous d’Eeyou Istchee dans les négociations qui ont mené à la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec. (Veuillez prendre note que le Grand conseil des Cris a été établi conformément à la volonté expresse des Eeyous et n’as pas été créé par la Convention de la Baie James et du Nord québécois.) En plus de chaque gouvernement local eeyou, le Grand conseil a représenté la Nation Eeyou dans le litige visant à protéger les droits et les intérêts des Eeyous. Toutefois, les Eeyous revendiquent leur gouvernance en invoquant la Nation Eeyou, étant donné qu’elle constitue l’autorité historique et traditionnelle pour l’exercice de leur autonomie gouvernementale. Par conséquent, le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) exerce une forme de gouvernance nationale eeyoue pour et par les Eeyous d’Eeyou Istchee. Bien que le Grand conseil exerce une gouvernance de conseil sous le régime des lois contemporaines, il exerce une gouvernance de nation sous le régime de la loi eeyoue. Après tout, les décisions prises par le grand chef, le vice-grand chef et les chefs eeyous ensemble ont des répercussions sur tous les membres de la Nation Eeyou. De plus, le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) négocie et conclut des traités de nation à nation, et entretient des relations avec les autres nations. À cet égard, le GCC(EI) est une partie au Treaty Alliance of North American Aboriginal Nations signé à Ouje-Bougoumou, Eeyou Istchee, le 6 juillet 1986. À titre de parties à ce traité, les nations autochtones de l’Amérique du Nord ont réaffirmé leur désir de vivre en paix avec les autres peuples et gouvernements, ont déclaré leur détermination à protéger et à préserver leurs peuples, leurs terres, leurs ressources, leurs patrimoines et leurs cultures, et ont convenu d’unir leurs efforts d’auto-assistance et d’autodéfense par une aide et une assistance mutuelles.

De plus, le grand chef/président et le vice-grand chef/vice-président du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie sont élus par les électeurs eeyous d’Eeyou Istchee. Les chefs sont élus par les électeurs eeyous de leurs communautés respectives. Par conséquent, le grand chef, le vice-grand chef et les Eeyou/Eenou Ouje-Maakanch (chefs eeyous) forment le Eeyou/Eenou Ouje-Maaooch en tant que représentants et dirigeants élus pour la gouvernance de la Nation Eeyou. En fait, le « conseil » du GCC(EI) est appelé Grand conseil ou Eeyou Tapay-tah-jeh-sou.

En outre, représentant la Nation Eeyou d’Eeyou Istchee, le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) a établi et maintient une ambassade crie à Ottawa, la capitale du Canada. Le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) entretient également des relations internationales et est actif dans la communauté internationale.

Depuis l’établissement du Grand conseil des Cris, les Eeyous forment une nation plus forte et ont bénéficié de progrès et de réalisations. À cet égard, l’unité des Eeyous, en tant qu’une seule nation et une seule voix, est un facteur important et fondamental. Il ne faut pas oublier que le nom du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) dans la langue eeyoue, à savoir « Weenbaooch Nochemeweoch Ahnadamadooch », signifie « les Eeyous de la côte et de l’intérieur qui s’entraident ».

L’Administration régionale crie, sous le contrôle des Eeyous, a été établie par loi provinciale pour l’administration des programmes et des services, et l’administration des fonds d’indemnisation payables aux Cris en vertu des modalités de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Le Bureau de l’indemnité assure la gestion des fonds d’indemnisation. L’Administration régionale crie s’occupe principalement de l’administration et de l’exécution des programmes et de la prestation des services pour les communautés eeyoues. Par l’intermédiaire de l’Administration régionale crie, les Eeyous assurent l’administration autonome des programmes et services gouvernementaux. Dans une certaine mesure, l’administration autonome des programmes et services gouvernementaux a eu une incidence sur le principe de la responsabilité des autorités eeyoues envers les Eeyous, étant donné que ces programmes sont financés par des gouvernements non eeyou qui ont des exigences élevées concernant la responsabilité envers le ministère gouvernemental chargé du financement à l’égard de la dépense de fonds publics.

L’Administration régionale crie (ARC) ou son successeur est la « partie autochtone » pour les Eeyous à la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Par conséquent, le consentement des Eeyous à toutes modifications à la CBJNQ les touchant doit être obtenu par l’intermédiaire de l’Administration régionale crie. Donc, au nom des Eeyous d’Eeyou Istchee, l’ARC est le signataire de tous accords auxiliaires à la CBJNQ de ce genre.

L’Administration régionale crie nomme ses représentants ou membres aux divers organes créés par la Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions complémentaires. De plus, elle est chargée de certaines responsabilités financières en vertu des Ententes concernant une nouvelle relation. Il est clair que, dans certains cas, l’Administration régionale crie agit en tant que « gouvernement » pour les Eeyous d’Eeyou Istchee.

De surcroît, il ne faut pas oublier la crise de leadership du début des années 1980, où les Eeyous avaient deux chefs : le grand chef du GCCQ et le président de l’ARC. On a convoqué une assemblée spéciale pour régler la question du leadership. Lors de cette assemblée, on a décidé de rendre le leadership et la participation au conseil de l’ARC équivalents à ceux du GCCQ, qui est demeuré l’autorité principale. Par conséquent, le grand chef et le chef principal (actuellement le vice-grand chef) du GCC(EI) occupaient, respectivement, les postes de président et de vice-président de l’ARC. Les membres de l’exécutif du GCC(EI) sont devenus les membres du comité exécutif de l’ARC. De plus, les membres du conseil d’administration du GCC(EI) sont devenus les membres du conseil de l’ARC. En pratique, les deux principales autorités régionales eeyoues en sont venues à être désignées par l’appellation suivante : Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie. Donc il n’est pas concevable de séparer ou d’exclure le système hiérarchique actuel du leadership des Eeyous de toute évolution d’un gouvernement de la Nation Eeyou. Il est possible de faire progresser encore davantage cette gouvernance de la Nation par un processus dans lequel le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie évoluerait pour devenir la principale autorité du gouvernement de la Nation Eeyou. Quoi qu’il en soit, cette évolution semble être la tendance actuelle et l’orientation du Eeyou Tapay-tah-jeh-souwin, compte tenu de l’exercice et de la pratique passés et actuels de la gouvernance eeyoue par les Eeyous d’Eeyou Istchee.

Les Eeyous d’Eeyou Istchee ont une compétence législative et un système judiciaire eeyou. (L’élaboration et la mise en œuvre du système eeyou des Indoh-hoh Istchee sont le résultat direct de l’application du système judiciaire eeyou et de l’exercice de la compétence législative eeyoue.) En tant qu’autorité historique et traditionnelle dans l’exercice de la gouvernance, les Eeyous ont établi et continuent d’établir des lois coutumières et d’autres lois eeyoues, qui peuvent évoluer et prendre une forme moderne. Cette évolution des pratiques et des processus traditionnels ou coutumiers eeyous est une manifestation de la volonté et de la souveraineté du peuple exercés par le processus décisionnel de la Nation Eeyou.

L’inclusion d’Eeyou ou de bénéficiaires de la CBJNQ comme membres du GCC(EI)/CRA est un autre facteur déterminant pour la gouvernance de la Nation Eeyou. Les autres principales entités, comme la Commission scolaire crie et le Conseil cri de la santé, ne conservent pas ce statut de membre. (La Commission scolaire crie est une commission scolaire régie par la Loi sur l’instruction publique et le Conseil cri de la santé exerce des pouvoirs et des fonctions de conseil régional au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.) Toutefois, ces principales autorités régionales eeyoues jouent un rôle important dans l’exercice du contrôle eeyou sur l’éducation, la santé et les services sociaux dans Eeyou Istchee.

Agissant dans l’unité et en tant qu’une seule nation par l’intermédiaire du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) / Administration régionale crie, les Eeyous peuvent faire progresser encore davantage l’évolution de la gouvernance de la Nation Eeyou (et la gouvernance locale) par la mise en application appropriée de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec, de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee et de l’Accord-cadre entre les Cris d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec sur la gouvernance dans le territoire d’Eeyou Istchee–Baie-James.

3.5 L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec

Le 7 février 2002, à Waskaganish, Eeyou Istchee, le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie et le gouvernement du Québec ont signé l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec (ci-après appelée Entente concernant une nouvelle relation). L’Entente concernant une nouvelle relation a été approuvée par les Eeyous dans le cadre de référendums locaux tenus par les Eeyous d’Eeyou Istchee.

Le Québec et les Eeyous d’Eeyou Istchee ont conclu un accord de nation à nation qui promet de renforcer les relations sociales, économiques et politiques entre le Québec et les Cris.

L’Entente concernant une nouvelle relation marque une étape importante dans une nouvelle relation de nation à nation fondée sur l’ouverture, le respect mutuel et une responsabilisation accrue de la Nation crie à l’égard de son propre développement dans le contexte d’une plus grande autonomie.

L’Entente reconnaît le droit important des Eeyous de tirer profit du développement des ressources d’Eeyou Istchee. Pour la première fois au Canada, on reconnaît le droit des peuples autochtones de tirer profit du développement des ressources sur leurs propres terres.

Voici les buts de l’Entente concernant une nouvelle relation :

Pour la période de cinquante (50) ans commençant le 1 avril 2002, les Eeyous assument les obligations du Québec concernant le développement économique et communautaire en vertu de certaines dispositions de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Pour la période allant du 1 avril 2002 au 31 mars 2052, le Québec versera aux Eeyous d’Eeyou Istchee un montant annuel, afin que les Eeyous puissent assumer, pour cette période, les obligations du Québec, d’Hydro-Québec et de Société d’énergie de la Baie James envers les Cris en vertu de certaines dispositions de la Convention de la Baie James et du Nord québécois concernant le développement économique et communautaire.

La prise en charge de ces obligations par les Eeyous pour le développement économique et communautaire des Eeyous avec les paiements annuels du Québec contribuera certainement à faire progresser la gouvernance eeyoue, étant donné que les autorités et les gouvernements locaux et régionaux eeyous détermineront et contrôleront le développement économique et communautaire.

Les autorités dirigeantes eeyoues exerceront les pouvoirs et les compétences pour le développement économique et communautaire des communautés eeyoues. En fait, et plus particulièrement au cours des trois (3) dernières décennies, les gouvernements eeyous ont exercé ces pouvoirs et ces compétences pour le développement économique et communautaire. L’Entente concernant une nouvelle relation facilite et simplifie l’exercice de ces pouvoirs et de ces compétences en ce qui concerne les relations entre les Eeyous et le Québec.

L’Entente concernant une nouvelle relation fait allusion à des accords distincts entre le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) et Hydro-Québec. Ces accords distincts promettent de promouvoir et de faciliter la participation des Eeyous au développement hydroélectrique dans Eeyou Istchee par des partenariats, des emplois et des contrats.

Le gouvernement du Québec a entrepris la promotion et la facilitation de la participation des Eeyous au développement d’autres ressources naturelles, comme l’exploitation minière et la foresterie. Cette participation des Eeyous était prévue dans la CBJNQ, mais n’a pas été mise en œuvre.

Les Eeyous d’Eeyou Istchee ont consenti à suspendre leurs poursuites contre le gouvernement du Québec à l’égard de questions qui seraient réglées par l’Entente concernant une nouvelle relation. En fait, le gouvernement du Québec salue l’Entente concernant une nouvelle relation comme la « Paix des Braves ».

Toutefois, les Eeyous d’Eeyou Istchee doivent adopter et mettre en application une approche prudente et éveillée pour la mise en application adéquate de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec. Après tout, une relation de nation à nation pacifique, bénéfique et efficace ne signifie pas seulement l’absence de conflit, mais également, et surtout, la présence de justice sociale.

L’Entente concernant une nouvelle relation n’a pas de répercussions sur les obligations du Canada envers les Eeyous, y compris celles stipulées dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Dans des circonstances semblables et à des fins analogues, le Grand conseil des cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie et le gouvernement du Canada ont signé l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee.

3.6 L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee

Le 21 février 2008, à Mistissini, Eeyou Istchee, le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/Administration régionale crie et le gouvernement du Canada ont signé l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee. Le paragraphe 2.1 du chapitre 2 de cette entente stipule les principaux buts suivants :

Le chapitre 3 de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee établit l’intention du Canada et des Cris de faire en sorte que le Canada reconnaisse l’ARC et la dote des outils nécessaires pour agir comme gouvernement régional et, également, l’intention de développer davantage le gouvernement de la Nation crie à une phase ultérieure des négociations.

De plus, en vertu de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee, le Canada s’est engagé à chercher à obtenir des modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec (LCNQ), afin de réaliser les objectifs suivants :

Le projet de loi C-28 : Loi modifiant la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec a été présenté devant la Chambre des communes le 27 avril 2009. Plus particulièrement, ce projet de loi modifie la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec à l’égard des terres cries et des terres de la catégorie IA dans les buts suivants :

En assumant certaines responsabilités du gouvernement du Canada, l’Administration régionale crie a certaines obligations envers la Nation crie. Pour la durée de l’Entente, l’ARC doit assumer les responsabilités du Canada en vertu de la CBJNQ à l’égard de certains aspects de la justice, de certaines associations régionales cries, de services d’emploi et de formation, de centres communautaires, de services d’assainissement essentiels, de la protection contre les incendies et du développement économique. À cette fin, l’ARC a obtenu récemment de nouveaux pouvoirs en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Ces modifications sont entrées en vigueur le 1 février 2010.

En vertu du paragraphe 3.10 du chapitre 3 de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee, la Nation crie élaborera une constitution qui correspondra à ses valeurs et croyances, qui sera applicable comme loi fondamentale de la Nation crie et qui sera conforme à l’accord de gouvernance.

Les représentants de la Nation crie d’Eeyou Istchee participent actuellement à des discussions avec le Canada et les Naskapis, afin d’examiner certaines modifications de forme à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et à la CBJNQ, et de conclure un accord concernant le gouvernement de la Nation crie.

3.7 L’Accord-cadre entre les Cris d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec sur la gouvernance dans le territoire d’Eeyou Istchee–Baie-James

Le 27 mai 2011, à Québec, le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee) et le gouvernement du Québec ont signé l’Accord-cadre entre les Cris d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec sur la gouvernance dans le territoire d’Eeyou Istchee–Baie-James. Voici les objectifs de cet Accord-cadre :

Le gouvernement de la Nation crie exercera des compétences, des fonctions et des pouvoirs sur les terres de la catégorie II en vertu des lois du Québec tels qu’énoncés dans le présent Accord et prévus dans l’Entente finale, à l’égard, notamment, de la gestion municipale, de la gestion des ressources naturelles et de la gestion des terres.

De plus, le gouvernement de la Nation crie aura le droit d’exercer, à sa demande, certains autres compétences, fonctions et pouvoirs, avec les adaptations nécessaires pour prendre en considération le contexte des terres de la catégorie II et la capacité institutionnelle des Cris. Ces adaptations seront sujettes à une entente entre les Cris et le Québec.

La Municipalité de la Baie James (MBJ) sera abolie et remplacée par un gouvernement régional public qui sera établi par une loi du Québec et qui sera désigné sous le nom français de « Gouvernement régional d’Eeyou Istchee Baie James » et sous le nom anglais de « Eeyou Istchee James Bay Regional Government » (« Gouvernement régional »).

Le Gouvernement régional succédera, dès sa création, à la MBJ en ce qui concerne ses droits, ses pouvoirs, ses biens et ses obligations, conformément à des modalités à être prévues à l’Entente finale.

Le Gouvernement régional aura compétence sur les terres de la catégorie III actuellement comprises dans le territoire de la MBJ.

La structure de gouvernance du Gouvernement régional sera composée de représentants des Cris et des résidents des Municipalités ainsi que, durant les cinq premières années d’opération du Gouvernement régional, d’une représentation du gouvernement central du Québec. La structure de gouvernance du Gouvernement régional est une forme de gouvernance publique.

Les arrangements financiers relatifs à la gouvernance des terres des catégories II et III seront déterminés dans l’Entente finale.

4. Récapitulation et conclusion

En vertu de l’esprit et du sens de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et des conventions complémentaires, le Canada et le Québec doivent respecter le droit inhérent de la Nation Eeyou d’assurer la gouvernance de ses propres affaires et de ses propres territoires. Bien entendu, ce principe implique le droit de la Nation Eeyou d’établir des relations intergouvernementales avec le Canada et le Québec, et de tirer des bénéfices des accords ainsi conclus, et d’assumer les responsabilités et la charge de l’autonomie gouvernementale.

À cet égard, la Nation Eeyou a revendiqué et exercé son droit à l’autodétermination et a conclu un traité moderne (la Convention de la Baie James et du Nord québécois) et des conventions complémentaires avec le Canada et le Québec. En concluant ces accords de nation à nation avec les Eeyous, le Canada et le Québec ont déjà reconnu leur statut de nation autonome.

La revendication de leur droit inhérent à l’autodétermination découlant de leur statut de peuple distinct ou souverain donne aux Eeyous le droit de déterminer leur propre avenir à l’intérieur du Canada et d’assurer leur propre gouvernance au moyen d’institutions de leur choix et de leur conception.

Pour les Eeyous d’Eeyou Istchee, la CBJNQ avait pour but d’occasionner le partage des pouvoirs et des responsabilités dans la gouvernance d’Eeyou Istchee.

En ce qui concerne la gouvernance eeyoue, la vision de la Nation Eeyou consiste à ce que les Eeyous soient libres de déterminer la forme de gouvernement et d’organisation politique qui leur convienne. Afin de réaliser cette vision, les Eeyous doivent disposer des outils nécessaires pour assurer leur succès pour ce qui est de la constitution et de l’exercice de gouvernements efficaces.

Le Centre national pour la gouvernance des Premières nations définit la gouvernance comme suit :

[Traduction] La gouvernance consiste dans les traditions (les normes, les valeurs, la culture, la langue) et les institutions (les structures officielles, l’organisation, les pratiques) qu’une communauté utilise pour prendre des décisions et réaliser ses buts. Au cœur du concept de la gouvernance se trouve la création de processus et de systèmes efficaces, responsables et légitimes permettant aux citoyens d’exprimer leurs intérêts, d’exercer leurs droits et leurs responsabilités, et de régler leurs différends. 7

Les Eeyous entretiennent une relation spirituelle spéciale avec leur terre, Eeyou Istchee. De plus, les Eeyous considèrent que leur culture, leur langue et leurs traditions sont fondamentales et centrales dans leur identité collective et leurs identités individuelles. Par conséquent, la vision d’autonomie gouvernementale des Eeyous englobe deux buts distincts mais liés entre eux. Le premier consiste dans une compétence élargie sur Eeyou Istchee et ses habitants, que ce territoire soit exclusivement eeyou ou partagé avec d’autres. Le deuxième consiste dans un plus grand contrôle sur les questions qui touchent les Eeyous en question : leur culture, leur identité et leur bien-être collectif.

Par conséquent, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont choisi et pris les voies et les arrangements principaux ci-dessous pour la gouvernance d’Eeyou Istchee :

La gouvernance eeyoue consiste dans le processus par lequel les Eeyous prennent les décisions qui orientent leurs efforts collectifs. Une gouvernance efficace ne se limite pas à faire le travail. C’est particulièrement vrai pour les Eeyous, étant donné que les valeurs jouent généralement un rôle important dans la détermination de leurs buts organisationnels et de leur style de fonctionnement. Le processus et les principes qui l’appuient et l’orientent sont aussi importants que le produit final. Toutefois, une gouvernance efficace ne se limite pas à « prendre le contrôle » des questions et des affaires eeyoues, comme le développement social, communautaire et économique. Une gouvernance saine et efficace consiste à réaliser les résultats souhaités et à le faire de la bonne manière, laquelle est déterminée, dans une large mesure, par les normes et les valeurs culturelles des Eeyous d’Eeyou Istchee.

Le Centre national pour la gouvernance des Premières nations a établi les éléments et les principes de gouvernance efficace ci-dessous :

Le Centre national pour la gouvernance des Premières nations décrit l’importance égale de ces éléments et principes dans la mise en œuvre d’une gouvernance efficace de façon hiérarchique, comme suit :

[Traduction] Une gouvernance efficace passe d’abord par le peuple. Ce n’est qu’en passant par le peuple que nous pouvons commencer à façonner la vision stratégique servant de point de repère pour le travail que les communautés et leurs organisations réalisent. Une fois que le peuple a échangé les renseignements pertinents, a pris des décisions collectivement et a établi la vision stratégique, son attention se tourne vers l’endroit où il est installé : la terre. Le titre ancestral est un intérêt exclusif à l’égard de la terre et le droit de choisir l’utilisation qui en est faite. C’est alors par les lois et les compétences que les droits relatifs à la terre sont précisés clairement. Découlant des lois et des compétences et en conformité avec ces dernières, l’émergence des institutions et l’identification des ressources surviennent, nécessaires à la mise en œuvre et au maintien d’une gouvernance efficace. 9

Dans son rapport de 1996, la Commission royale sur les peuples autochtones fait l’énoncé ci-dessous sur les attributs d’une gouvernance saine :

Pour être efficace – pour faire bouger les choses – tout gouvernement doit avoir trois attributs de base: la légitimité, le pouvoir et les ressources.

La légitimité s’entend de la confiance et de l’appui que le public accorde au gouvernement. Elle dépend de facteurs comme la façon dont la structure du gouvernement a été créée, la manière dont les dirigeants sont choisis et la mesure dans laquelle le gouvernement fait progresser le bien-être public et respecte les droits fondamentaux de la personne. Lorsqu’un gouvernement ne bénéficie pas d’une grande légitimité, les dirigeants doivent essayer de venir à bout de l’apathie et de la résistance du public et dépenser plus d’énergie et de ressources pour que les choses se fassent.

Le pouvoir est la capacité juridique reconnue d’agir. Il englobe la compétence législative (le pouvoir de légiférer), la compétence exécutive (le pouvoir d’appliquer les lois et d’assurer l’administration publique) et la compétence judiciaire (le pouvoir de trancher les litiges). Le pouvoir d’un gouvernement peut découler de coutumes et de pratiques de longue date ou de sources plus officielles comme une constitution écrite, la législation nationale et des jugements des tribunaux. Cependant, le pouvoir juridique interne ne suffit pas toujours à rendre un gouvernement efficace. Un autre important facteur est la mesure dans laquelle d’autres institutions et gouvernements puissants reconnaissent et acceptent l’action du gouvernement en question. Les prétentions à la souveraineté et d’autres formes d’autorisation légale peuvent ne pas se révéler très utiles si elles ne sont pas respectées par d’autres gouvernements ayant des ressources et des pouvoirs plus étendus.

Les ressources comprennent les moyens physiques d’agir – non seulement les ressources financières, économiques et naturelles nécessaires à la sécurité et à la croissance future, mais aussi l’information et la technologie de même que les ressources humaines, sous la forme de personnes compétentes et en bonne santé. Les ressources permettent au gouvernement d’exercer son pouvoir et de répondre aux besoins et aux attentes des citoyens. En matière de ressources, les questions fondamentales concernent la nature des relations financières et commerciales entre gouvernements qui influent sur le contrôle et le niveau des ressources.

Un gouvernement à qui un ou plusieurs de ces attributs font défaut risque de fonctionner plus ou moins bien. 10

Compte tenu des discussions en cours entre les Eeyous, le Canada et le Québec sur la gouvernance du territoire visé par la Convention de la Baie James et du Nord québécois et des nombreux défis auxquels les Eeyous doivent faire face dans l’établissement de diverses formes de gouvernements comme ordre de gouvernement dans Eeyou Istchee, et l’exercice d’une gouvernance saine et efficace, les Eeyous devraient faire ce qui suit :

Plus particulièrement, il faut élaborer des stratégies et les mettre en œuvre, afin de renforcer les capacités de gouvernance des Eeyous aux fins d’une gouvernance efficace et concrète. La Commission Crie-Naskapie propose que ces stratégies comprennent les suivantes :

Afin d’assurer la responsabilisation, les gouvernements eeyous devraient prendre les mesures suivantes :

(Par exemple, la Commission est disposée à aider au développement et à la prestation de séances d’orientation destinées aux nouveaux chef et conseil du gouvernement local eeyou.)

La gouvernance eeyoue a beaucoup évolué au cours des quatre (4) dernières décennies, principalement en réaction aux changement fondamentaux dans le paysage économique, social et politique d’Eeyou Istchee. Cette évolution de la gouvernance eeyoue est naturelle et normale, étant donné que le pouvoir politique est universel et inhérent à la nature humaine. Après tout, l’autodétermination des Eeyous consiste dans le pouvoir de choisir en matière d’action. Dans plusieurs cas, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont adopté une approche instinctive.

Par conséquent, la signification et la pratique de la gouvernance eeyoue ont évolué, et ont été et continuent d’être redéfinies par les Eeyous en fonction de leurs droits, de leurs libertés, de leurs valeurs, de leur culture, de leurs coutumes et leur lois traditionnelles, et du sens et de l’esprit de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions complémentaires.

La gouvernance eeyoue consiste également dans la pratique et l’exercice de l’intendance et de la garde d’Eeyou Istchee. Pour les Eeyous d’Eeyou Istchee, le cheminement vers la gouvernance eeyoue complète commence et se termine par et sous l’autorité traditionnelle et historique qui détient le pouvoir d’autonomie gouvernementale, c’est-à-dire le peuple habitant le territoire.

La réconciliation des droits inhérents et antérieurs des Eeyous avec la souveraineté de la Couronne a posé, et pose toujours, un défi socioéconomique, juridique/constitutionnel et politique important.

Pour les Eeyous d’Eeyou Istchee, la reconnaissance mutuelle entre peuples et nations coexistants et autonomes est essentielle et fondamentale dans leurs relations continues avec le Canada et le Québec.

Ce cheminement et le passage à l’autonomie gouvernementale constituent un aspect fondamental de la construction de la Nation, alors que les Eeyous d’Eenou Istchee ont revendiqué de nouveau leur propre gouvernance, comme droit et activité autochtones.

NOTES DE LA FIN

Réponse du Canada aux recommandations 2010 de la Commission Crie-Naskapie

Chapitre quatre

Aux deux ans, la Commission effectue des audiences spéciales prévues dans la Loi en vue de préparer son rapport bisannuel sur la mise en œuvre de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Ces rapports sont ensuite soumis au Ministre qui doit les déposer au Sénat et à la Chambre des communes. La Chambre et le Sénat transmettent ces rapports aux comités permanents. Souvent, la Commission est invitée à assurer le suivi du Rapport en faisant une présentation aux comités.

Chaque rapport présenté contient des recommandations basées en grande partie sur les enjeux soulevés par le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee), les Premières nations cries à titre individuel, les aînés, les jeunes, l’Association des trappeurs cris et d’autres personnes qui font des présentations aux audiences spéciales de la Commission. Le Canada (Affaires autochtones et Développement du Nord) assiste à ces audiences et répond aux recommandations proposées par la Commission dans son Rapport précédent.

Les réponses du gouvernement fédéral aux recommandations du Rapport 2010 de la Commission Crie-Naskapie font partie intégrante de ses présentations aux audiences de 2012.

Dans le but d’assurer que les communautés cries et naskapies sont au courant des réponses du gouvernement, la Commission présente les recommandations originales, la réponse du gouvernement fédéral et un bref commentaire, le cas échéant.

Amendements a la Loi sur les Cris et Naskapis du Québec

1. Sur une base prioritaire au cours de ces discussions avec le Canada, le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie devraient distinguer des amendements à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec au sujet des dispositions sur le quorum de la Loi qui ont sérieusement entravé le processus décisionnel des gouvernements locaux et des administrations locales.

Réponse du Canada

En 2008, le gouvernement du Canada et les représentants des Cris et des Naskapis ont établi un groupe de travail pour discuter des modifications supplémentaires à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, notamment des dispositions sur le quorum. Les parties ont eu des discussions préliminaires en 2009 et ont convenu que les Cris et les Naskapis devaient étudier les amendements proposés de façon plus détaillée et développer une liste commune d’amendements.

Le Canada sait que les Cris et les Naskapis ont travaillé ensemble pour établir une liste commune qu’ils présenteront au groupe de travail. Lorsque le groupe de travail recevra la liste, les membres se rencontreront à nouveau pour étudier les amendements proposés.

Le Canada est prêt à consentir des amendements à la LCNQ pour les Naskapis et les Cris, après une étude de la liste. Nous comprenons que le Canada sera invité à discuter de cette liste pendant une réunion qui aura lieu au cours des semaines ou mois à venir.

Commentaire

La Commission continuera de surveiller ce dossier et rapportera les progrès.

Référence aux règlements administratifs de la bande dans la législation fédérale et mise en application des règlements administratifs de la bande

2. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie devraient discuter avec le Canada de certains arrangements particuliers pour l’application des règlements administratifs des bandes en vue d’atteindre les résultats suivants :

Réponse du Canada

Le Canada et les Cris ont entamé des discussions en vertu de l’article 5.9 de l’Entente sur la nouvelle relation, pour vérifier la faisabilité de déléguer certains pouvoirs fédéraux à l’Administration régionale crie. Les parties ont eu plusieurs réunions en 2010-2011. Le Canada a fourni aux Cris une quantité importante d’informations que les Cris doivent tout d’abord examiner avant que les discussions puissent se poursuivre.

En vertu de l’article 5.10 de l’Entente sur la nouvelle relation, le Canada et les Cris ont aussi établi un groupe de travail pour discuter des amendements au Code criminel et à la Loi sur la preuve au Canada. Le groupe de travail s’est réuni plusieurs fois et a convenu qu’une analyse plus approfondie devait être effectuée par les deux parties avant que les discussions puissent se poursuivre.

Commentaire

La Commission continuera de surveiller ce dossier et rapportera les progrès.

Élections de la bande

3. Le gouvernement du Canada devrait entamer des discussions avec les Nations cries pour déterminer si la décision de la Cour suprême dans l’affaire Corbiere s’applique ou non aux bandes cries. Si la décision s’applique aux bandes cries, alors le Canada et les Cris doivent discuter des amendements subséquents à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et leur mise en œuvre.

Réponse du Canada

Le Canada est d’avis que la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est le seul pouvoir en vertu duquel les gouvernements locaux cris ou naskapis peuvent déterminer l’admissibilité d’un électeur ou l’admissibilité d’un candidat de se présenter à un poste de membre du conseil à une élection, soit en vertu d’un règlement administratif local sur les élections ou conformément au Règlement sur les élections au sein des bandes cries et naskapies.

Contrairement à la Loi sur les Indiens, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec ne contient aucune stipulation exigeant qu’un membre de la bande habite dans la collectivité pour participer aux élections du conseil de bande, soit comme électeur ou candidat au conseil de la bande.

Commentaire

Cette réponse correspond à l’opinion de la Commission voulant que la décision dans l’affaire Corbiere ne s’applique pas. La Commission pense aussi que les Cris et les Naskapis peuvent se fier à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec qui, selon elle, est une législation protégée par la Constitution qui leur permet d’adopter leurs propres règlements administratifs pour aborder le sujet sans avoir à recourir à des litiges.

Bloc « D »

4. Le Bloc « D » devrait être transféré à la Nation crie de Chisasibi sur-le-champ.

Réponse du Canada

Le Canada, le Québec et Chisasibi ont convenu d’aller de l’avant avec le transfert du Bloc « D » en deux étapes. L’étape 1 du transfert concerne la portion qui est acceptable pour le Canada du point de vue environnemental et l’étape 2 est la portion restante sur laquelle le Québec doit faire des travaux d’assainissement.

Des discussions entre les représentants du Canada, du Québec et de Chisasibi se sont poursuivies sur le décret de transfert des terres de l’étape 1 du Québec à la suite de nouvelles dispositions ajoutées ensuite par le Québec dans son décret. Le Canada a bon espoir que ces questions seront réglées sous peu pour mettre la plus grande portion des terres du Bloc « D » à la disposition de Chisasibi.

Des discussions parallèles sont en cours entre le Canada, le Québec et Chisasibi pour l’étape 2 du transfert des terres du Bloc « D ». Les points de vue contradictoires du Canada, du Québec et de Chisasibi à l’égard des problèmes environnementaux et d’assainissement ne sont pas encore réglés.

Commentaire

La Commission a abordé la question du Bloc « D » pour la première fois dans son Rapport 1998. En 2012, quelque 14 ans plus tard, entendre dire « Les points de vue contradictoires du Canada, du Québec et de Chisasibi à l’égard des problèmes environnementaux et d’assainissement ne sont pas encore réglés. » est à tout le moins, source de déception. La Commission étudiera quelle action supplémentaire peut être entreprise pour inciter une solution ponctuelle.

Rapports financiers des bandes

5. Le Canada et le Québec devraient amorcer des discussions avec les bandes cries et/ou l’Administration régionale crie pour conclure des ententes de financement adéquates qui permettraient de couvrir les coûts encourus par les bandes afin de se conformer aux exigences des gouvernements relatives aux rapports financiers.

Réponse du Canada

À l’heure actuelle, le Bureau de la mise en œuvre de la Baie-James et l’Administration régionale crie travaillent sur la consolidation d’un certain nombre de mécanismes de financement et la rationalisation des exigences d’établissement de rapports en vertu d’un nouveau mécanisme consolidé de financement.

D’autres discussions sur les coûts encourus pour l’établissement des rapports pour les différents programmes fédéraux pourraient être référées à la Table ronde Cris-Canada. Il est toutefois important de noter que la plupart des paiements de transfert englobent des fonds affectés à l’administration, y compris pour établir des rapports.

Commentaire

La Commission discutera de cette question avec les parties cries et révisera les progrès.

Logement des Cris

6. Les autorités fédérales, des Cris d’Eeyou et des Naskapis devraient déterminer et s’entendre sur les besoins actuels et à venir des communautés cries et naskapies en matière de logement et mettre en œuvre un plan directeur stratégique, à court et à long terme, pour s’attaquer à ces besoins.

Réponse du Canada

Le logement est un problème complexe auquel toutes les Premières nations sont confrontées. Il est difficile d’évaluer l’étendue du problème étant donné qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas d’inventaire cri-naskapi, ni d’évaluation des besoins en matière de logement.

Chaque année, il y a une conférence des Premières nations sur le logement et les Cris participent à cette conférence.

Il existe aussi un comité tripartite sur le logement auquel les Cris ont été invités mais auquel ils ne participent pas.

Nous encourageons à nouveau les bandes à présenter l’enjeu à l’Administration régionale crie et ensuite à la Table ronde Cris-Canada pour poursuivre les discussions.

Commentaire

En 2006, le chef Billy Diamond a effectué un travail exhaustif sur la nature et l’étendue du problème de logement ainsi que sur la façon dont il devrait être réglé. Les résultats de son travail ont fait partie intégrante du Rapport 2006 de la Commission Crie-Naskapie. De plus, la question du logement est une priorité des collectivités au cours de chaque audience spéciale sur la mise en œuvre et un sujet abordé dans chaque rapport de la Commission au cours des 26 dernières années. Pour cet enjeu aussi, la Commission va tenter de trouver des approches plus efficaces pour assurer que les besoins cruciaux en matière de logement seront mieux réglés à l’avenir qu’ils ne l’ont été au cours des dernières 26 années.

Services policiers et administration de la justice

7. Le Canada, le Québec et l’Administration régionale crie devraient identifier et s’entendre sur les besoins actuels et à venir des communautés cries en matière de services policiers et système de justice cri et mettre en œuvre un plan stratégique directeur pour s’attaquer à ces besoins.

Réponse du Canada

Le Canada utilise différentes façons pour s’occuper de la question des services policiers et du système de justice cri.

Le Canada, le Québec et l’ARC ont signé la Convention complémentaire no 19 à la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Entré en vigueur le 28 mai 2009, cet accord a fusionné les services de police locaux des Cris en Service de police régional cri. Entre autres choses, cette convention trilatérale établit une proportion de résidents par agent de police et détermine une façon de calculer cette proportion à l’avenir.

En vertu du paragraphe 5.10 de l’Entente sur la nouvelle relation, le Canada et les Cris d’Eeyou Istchee ont commencé à discuter des amendements à l’alinéa 18.0.19 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ) au sujet du Code criminel et de la Loi sur la preuve au Canada. Une table interministérielle du ministère de la Justice et d’AADNC a été établie pour discuter de la question. Le Canada et les Cris ont aussi établi un groupe de travail technique.

Nous comprenons que l’ARC consulte les communautés cries sur la question de la justice et du maintien de l’ordre. Nous nous attendons à ce que lorsque le processus de consultation sera terminé, les discussions reprendront.

Commentaire

La Commission continuera de surveiller ce dossier et rapportera les progrès, le cas échéant.

Nations Cries et développement économique

8. Le Canada et l’Administration régionale crie devraient réviser l’article 21 et l’article 22 de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec dans le but de demander des amendements à la Loi afin d’améliorer et de promouvoir le développement économique local.

Réponse du Canada

À l’heure actuelle, le Canada, l’Administration régionale crie et le Québec sont en négociation en vue d’une entente sur la gouvernance qui pourra inclure des amendements possibles à la Convention de la Baie James et du Nord québécois et à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec concernant un gouvernement de la nation crie qui aurait des pouvoirs et autorités dépassant l’étendue de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Nous suggérons que les Cris d’Eastmain fassent part de leurs préoccupations à l’Administration régionale crie s’ils veulent que la question du développement économique local soit abordée à la table ronde sur la gouvernance.

Commentaire

La Commission assurera que le chef et le conseil d’Eastmain sont au courant de cette réponse et du suivi nécessaire s’il est adéquat ou requis.

Collecte des loyers

9. Le Canada et l’Administration régionale crie (en collaboration avec les bandes cries) devraient identifier des mesures novatrices pour assurer la collecte efficace des loyers pour les maisons et les résidences des bandes.

Réponse du Canada

Même s’il n’y a pas de politique locale parmi les bandes cris sur la collecte des loyers, les représentants du Canada seront heureux de partager des pratiques exemplaires et histoires de succès qui ont été portées à leur attention par d’autres collectivités des Premières nations.

Par exemple,

De plus, la SCHL peut offrir des conseils à ce sujet. Il fera plaisir à la Direction de la mise en œuvre d’organiser une présentation à ce sujet.

Commentaire

La Commission assurera que l’Administration régionale crie est au courant de cette réponse et du suivi nécessaire s’il est adéquat ou requis.

Nation Crie de Washaw Sibi

10. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie et la Nation crie de Washaw Sibi devraient établir un processus de discussion et de planification pour permettre l’atteinte de l’objectif de la Nation crie de Washaw Sibi visant l’établissement d’une communauté crie distincte avec ses propres terres de catégorie I afin de pouvoir jouir des programmes et services au même titre que les Cris dans les neuf autres communautés. Le Canada et/ou le Québec devraient être invités à faire partie de ce processus pour les dossiers faisant partie de leurs responsabilités et compétences respectives.

Réponse du Canada

L’article 5.4 de l’Entente sur la nouvelle relation prévoit que si l’Administration régionale crie et les Eeyous de Washaw Sibi décident d’aller de l’avant et de négocier sur la reconnaissance des Eeyous de Washaw Sibi comme bande distincte, le Canada et le Québec seront invités à participer. Le Canada est donc ouvert à l’établissement d’un dialogue à ce sujet si les Cris le lui demandent.

Commentaire

La Commission assurera que le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie ainsi que la Nation crie de Washaw Sibi sont au courant de cette réponse et qu’ils feront un suivi le cas échéant.

Incompatibilité de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec avec l’Eeyou Eehdou-wun

11. Le Canada et l’Administration régionale crie (en collaboration avec les bandes cries) devraient réviser les modalités et dispositions actuelles de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec dans le but de demander des amendements à la Loi pour assurer, lorsque c’est pratique, la compatibilité avec l’Eeyou Eehdou-wun ou la méthode crie de faire les choses qui ont trait à la gouvernance et à l’administration.

Réponse du Canada

À l’heure actuelle, le Canada, l’Administration régionale crie et le Québec sont en négociation en vue d’une entente de gouvernance qui pourra comprendre des amendements possibles à la Convention de la Baie James et du Nord québécois et à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Commentaire

La Commission comprend que l’Administration régionale crie s’occupe de cette question.

Connaître et comprendre la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

12. En collaboration avec la Commission Crie-Naskapie, le Canada et l’Administration régionale crie devraient développer et mettre en œuvre un programme d’orientation qui encouragerait la connaissance et la compréhension des modalités et dispositions de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec parmi les membres des conseils de bande, les employés de la bande et les membres de la bande.

Réponse du Canada

Le Canada croit que la promotion, l’explication et la mise en œuvre de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec fait partie du mandat de la Commission Crie-Naskapie auprès de ses différents bénéficiaires.

Le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada est ouvert à une discussion à ce sujet si la Commission et l’Administration régionale crie jugent qu’il serait utile que le Canada participe à cette initiative.

Commentaire

La Commission comprend les points de vue du ministère sur l’étendue de son mandat comme il l’a expliqué au cours des audiences spéciales 2012 sur la mise en œuvre. Nous discuterons du sujet en détail avec l’Administration régionale crie et ferons un suivi avec le ministère et l’ARC selon les besoins.

Jeunes (Cris) d’Eeyou

13. Dans le cadre du processus actuel pour les négociations et l’établissement du gouvernement de la Nation crie, le GCC(EI)/ARC devrait consulter les jeunes Cris d’Eeyou en vue de les inciter à participer à la gouvernance et aux affaires des Cris de la Nation crie d’Eeyou Istchee.

Commentaire

Cette recommandation ne s’adressait pas au gouvernement du Canada, une réponse n’est donc pas proposée par l’administration fédérale.

La Commission continue de recevoir des commentaires des jeunes Cris concernant leurs préoccupations. Des questions telles que la nécessité d’avoir des programmes et des fonds communautaires pour leurs jeunes sont soulignées. La Commission croit que la meilleure approche est d’assurer que les jeunes Cris jouent un rôle continuel à l’intérieur des structures et processus de gouvernance des Cris.

Octroi d’un droit de superficie

14. Le Canada et l’Administration régionale crie (en collaboration avec les bandes cries) devraient examiner les modalités et conditions actuelles de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec dans le but d’obtenir des amendements à la Loi afin de responsabiliser les bandes en leur confiant l’autorité législative d’adopter un règlement administratif sur l’octroi d’un droit de superficie d’une façon plus efficace. (Ce règlement administratif serait assujetti à l’approbation des membres de la bande.)

Réponse du Canada

À l’heure actuelle, le Canada, l’Administration régionale crie et le Québec sont en négociation en vue d’une entente de gouvernance qui pourrait englober des amendements possibles à la Convention de la Baie James et du Nord québécois et à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec concernant un gouvernement de la Nation crie qui aurait des pouvoirs et autorités dépassant l’étendue de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Commentaire

La Commission discutera de cette question avec l’Administration régionale crie pour déterminer l’état actuel.

Impacts de la dérivation de la rivière Rupert

15. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie et la Première nation de Waskaganish devraient entamer des discussions avec Hydro-Québec/la Société d’Énergie de la Baie James (SEBJ) sur la nécessité de réaliser des études d’impact sur les incidences de la dérivation de la rivière Rupert sur les terres de catégories IA et IB de la Première nation de Waskaganish.

Commentaire

La Commission Crie-Naskapie discutera des progrès sur cette question et rapportera les résultats selon les besoins. Les gouvernements locaux cris seront aussi impliqués dans le processus.

Transfert des terres de la Mission catholique romaine à la Première nation de Waskaganish

16. Le Canada et l’Administration régionale crie, en collaboration avec la Première nation de Waskaganish devraient amorcer des discussions pour assurer le transfert adéquat et efficace de ladite terre de la Mission catholique romaine à la Première nation de Waskaganish comme partie intégrante des terres de catégorie IA de Waskaganish.

Réponse du Canada

Le Canada, l’Administration régionale crie et le Québec ont entamé des discussions sur ce dossier dans le contexte de l’alinéa 5.8 a) (iii) de l’Entente sur une nouvelle relation entre le Canada et les Cris. Le principal sujet porte les titres fonciers et des discussions supplémentaires devront avoir lieu pour aider à trouver des méthodes pratiques pour intégrer cette terre dans les terres de la catégorie IA de Waskaganish.

Le Canada tente d’élaborer une approche intégrée pour terminer les descriptions du territoire. Il est important de noter que des transferts de terres semblables à celui demandé par Waskaganish auront lieu dans chaque collectivité crie.

Dans le cas de Mistissini, nous sommes en train de développer une approche pour terminer les descriptions du territoire. Cette approche sera utilisée à grande échelle.

Commentaire

Ce progrès semble être un développement positif. La Commission continuera de surveiller la situation et de produire des rapports.

Suivi des rapports de la Commission de la Crie-Naskapie

17. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie devraient établir un groupe de travail spécial sur la mise en œuvre ou un groupe de travail afin d’examiner à nouveau les problèmes et inquiétudes en suspens des communautés cries, tels qu’ils sont décrits dans les rapports biennaux de la Commission depuis 1986 et en vue d’élaborer un plan d’action concret pour régler ces dossiers.

Le Canada n’a pas fourni de réponse à cette recommandation parce que la recommandation ne touche pas le gouvernement fédéral.

Commentaire

La Commission continue d’encourager le suivi sur ces problèmes et préoccupations communautaires.

Cris de Senneterre

18. Le Canada et Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie, en collaboration avec la Première nation Crie de Waswanipi devraient établir un processus de dialogue et une table de négociation pour discuter du problème des Cris de Waswanipi qui résident à Senneterre et régler ce dossier.

Réponse du Canada

Comme le Canada n’a pas été informé officiellement de la question des Cris de Senneterre par l’Administration régionale crie, le gouvernement préfère ne pas fournir de commentaire à l’heure actuelle. Toutefois, le Canada est ouvert à l’établissement d’un dialogue sur la question si l’Administration régionale crie lui demande.

Commentaire

Cette réponse sera transmise au chef et conseil de Waswanipi et la Commission abordera leurs désirs concernant des actions futures.

La réponse du Canada expliquant que le gouvernement est disposé à aller de l’avant si l’Administration régionale crie lui demande est raisonnable en elle-même. Toutefois, la réponse soulève une autre question de principe importante. Lorsqu’un chef et conseil font une présentation à la Commission, créée par une législation fédérale, que la Commission soumet ensuite un rapport au Ministre qui le dépose dans les deux Chambres du Parlement (actions dictées par la législation), il est raisonnable de supposer que le gouvernement a été « officiellement informé ». La Commission a abordé cette question à de nombreuses reprises surtout parce qu’elle croit qu’en créant la Commission et qu’en exigeant des rapports sur la mise en œuvre, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec visait à créer un processus qui permettrait aux chefs et conseils des Cris et des Naskapis, à leurs communautés et à leurs peuples de faire entendre leurs voix et d’assurer que les points de vue sont communiqués aux décideurs appropriés.

Assoociation des trappeurs Cris

19. L’Administration régionale crie devrait accepter et reconnaître l’importance actuelle et à venir du rôle de l’Association des trappeurs cris et fournir des ressources financières suffisantes pour permettre à l’ATC de jouer son rôle important conformément à l’intention et à l’esprit de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, des ententes concernant une nouvelle relation entre le Canada, le Québec et les Cris et l’Accord entre les Cris d’Eeyou Istchee et Sa Majesté la Reine du chef du Canada sur la Région marine d’Eeyou.

Le Canada n’a pas fourni de réponse à cette recommandation parce que la recommandation ne touche pas le gouvernement fédéral.

Commentaire

L’importance et le rôle de l’Association des trappeurs cris continuent d’être des priorités et la Commission continuera de surveiller les progrès à ce sujet.

Préoccupations et problèmes de la Nation Eeyou (Cris) et de la Nation Naskapie de Kawawachikamach

Chapitre cinq

Les 8, 9 et 10 février 2012, la Commission Crie-Naskapie a tenu des audiences spéciales sur la mise en œuvre à Montréal, Québec afin de permettre aux représentants des administrations cries et naskapies et du gouvernement fédéral de faire des présentations à la Commission en préparation au présent rapport. Ce chapitre décrit les principaux problèmes et préoccupations soulevés par les représentants des Cris et des Naskapis.

1. Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)

Datée du 9 février 2012, la présentation du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) se concentre sur les négociations actuelles avec le Canada qui portent sur la gouvernance, les biens immobiliers matrimoniaux sur les terres de la catégorie IA et la mise en œuvre de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee.

A. Gouvernance locale et régionale progressive

Depuis la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ), les Cris travaillent en vue d’obtenir la reconnaissance par le Canada et le Québec de la consolidation et de la mise en œuvre de la gouvernance progressive de la Nation crie.

La promulgation et l’entrée en vigueur de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est une étape importante pour la reconnaissance des bandes locales de la Nation crie qui leur conférera les pouvoirs d’administration locale pour leurs collectivités et terres.

En 2008, la signature de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee a représenté un autre jalon important pour la gouvernance de la Nation crie. Cette Entente a établi une nouvelle relation entre la Nation crie et le Canada. Elle constitue une méthode novatrice pour améliorer la mise en œuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ) en confirmant la responsabilité de transférer certains pouvoirs législatifs du Canada en vertu de la CBJNQ à l’Administration régionale crie (ARC) et ensuite au gouvernement de la Nation crie.

Subséquemment, le Parlement a modifié la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec pour fournir à l’ARC le pouvoir d’adopter des règlements semblables à celui conféré aux administrations locales cries. Ces modifications à la Loi sont entrées en vigueur le 1 février 2010. Depuis ce moment-là, l’ARC travaille sur le renforcement des compétences de ses institutions et sur le développement de plusieurs règlements régionaux, comme :

B. Entente sur la gouvernance de la Nation crie

L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee explique le processus utilisé pour les négociations entre la Nation crie d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Canada pour une entente et la législation connexe concernant un gouvernement de la Nation crie pour lui attribuer des pouvoirs et autorités plus étendus que ceux conférés par la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec (LCNQ) et les modifications corrélatives à la CBJNQ et la LCNQ.

« Le but de ces négociations est d’élargir la gouvernance crie au-delà des pouvoirs conférés par la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et d’établir les structures et pouvoirs d’un gouvernement de la Nation crie et la relation de ce gouvernement avec les bandes cries et les gouvernements fédéral et provincial. L’objet principal de l’Entente sur la gouvernance de la Nation crie avec le Canada sera de consolider l’établissement d’une administration de la Nation crie et de raffiner et d’étendre ses pouvoirs et autres responsabilités. Pour les Cris, la mission du gouvernement de la Nation crie sera d’exercer les fonctions et pouvoirs gouvernementaux de nature régionale ou de la Nation crie. À ce titre, on s’attendra à ce que le gouvernement de la Nation crie assume deux responsabilités primordiales :

Nous envisageons un gouvernement de la Nation crie bâti sur le modèle de l’ARC tout en élargissant ses pouvoirs. Le gouvernement de la Nation crie sera distinct de celui du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) et de ceux des bandes de Cris. » 2

Les négociations entre la Nation crie d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Canada pour conclure une entente concernant un gouvernement de la Nation crie ont été lentes à cause des facteurs suivants :

Conformément à l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee, et avec la participation du Québec, la Nation crie et le Canada sont engagés à déployer tous les efforts nécessaires pour conclure les négociations afin d’en arriver à un accord de principe dans un délai de trois (3) ans après l’entrée en vigueur dudit accord et à un accord sur la gouvernance dans un délai de cinq (5) ans après l’entrée en vigueur dudit accord, ou sur une période plus longue déterminée par écrit par le Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie, le Canada. Le 29 mars 2011, les parties ont convenu d’étendre la période jusqu’au 31 mars 2012 pour conclure un accord de principe sur la gouvernance. Toutefois, les parties restent engagées à conclure les négociations pour un accord final sur la gouvernance d’ici mars 2013.

C. Modifications à la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ)

Le 25 octobre 2011, les Cris et le Canada ont terminé les discussions concernant les modifications suivantes à apporter à la CBJNQ :

Ces modifications proposées sont à l’étude à l’heure actuelle par le Québec.

En outre, une série de modifications à l’article 4 de la CBJNQ concernant les descriptions territoriales finales des terres de la catégorie I des Cris font l’objet de discussions avec le Québec et le Canada.

D. Consolidation des mécanismes de financement de base

Le 3 novembre 2010, les Cris ont soumis une proposition au Canada pour la consolidation de certains mécanismes de financement fédéral de base. Au début, le financement fourni à l’ARC et aux bandes cries en vertu de l’Entente sur le fonctionnement et l’entretien des collectivités cries et de l’Entente sur les subventions d’immobilisations et le financement régulier aux associations régionales devaient être consolidés en vertu d’une entente unique de financement à long terme entre le Canada et l’ARC. Cette proposition visait aussi qu’il serait aussi entendu qu’à l’avenir, il serait aussi possible d’incorporer d’autres sources de financement fédéral à ces ententes. À l’heure actuelle, le Canada est en train d’étudier cette proposition.

E. Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux (projet de loi S-2)

La société crie change étant donné que les Cris dans les collectivités possèdent des biens à valeur plus élevée comme des résidences privées et il y a plus de relations conjugales entre les Cris et les non-Cris. Ces changements soulèvent des questions au sujet des droits et des intérêts liés à l’utilisation, l’occupation et la possession des résidences familiales et la division des biens et de ces résidences familiales situées sur les terres de la catégorie IA.

Lorsque des couples mariés divorcent, la division des biens matrimoniaux, tant réels (par exemple, terre et maisons) que personnels est déterminée conformément aux lois provinciales en raison de l’alinéa 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867. Toutefois, en raison de l’alinéa 91(24) de cette Loi qui précise que le Parlement du Canada a le pouvoir législatif exclusif en ce qui a trait aux « Indiens et terres réservées pour les Indiens », les lois provinciales ne s’appliquent pas à la division des biens immobiliers sur les terres des réserves. Dans Derrickson c. Derrickson, la Cour suprême du Canada a statué que les tribunaux ne peuvent pas se fonder sur la loi provinciale pour ordonner la division des biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves.

L’absence de dispositions dans la Loi sur les Indiens ou ailleurs pour gérer la division des biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves a créé ce que l’on nomme « un vide juridique ». En conséquence, les personnes qui habitent dans les réserves n’ont pas pu utiliser le système juridique canadien pour régler les dossiers concernant la division des biens immobiliers après la rupture des relations conjugales.

De plus, le droit familial des Cris ne traite pas de ces dossiers à l’heure actuelle.

En conséquence, les personnes qui habitent dans les terres de la catégorie IA n’ont pas pu utiliser le système juridique canadien pour régler les différends sur la division des biens immobiliers.

Pour d’autres Premières nations assujetties à la Loi sur les Indiens, le Canada a essayé de combler ce vide juridique par l’intermédiaire de la Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux (projet de loi S-2). Le projet de loi S-2 traite des questions liées aux biens immobiliers familiaux dans les réserves pourvu qu’une Première nation ait le pouvoir d’adopter des lois qui ont trait à l’utilisation, l’occupation et la possession de résidences familiales dans ses réserves et que la division de la valeur des intérêts ou droits détenus par les conjoints ou conjoints de fait dans les structures et terres dans ses réserves.

Les règles des dispositions comprises dans le projet de loi fédéral seront en vigueur jusqu’à ce qu’une Première nation adopte l’entrée en vigueur de lois.

S’il est adopté, le projet de loi S-2 s’appliquera aux Premières nations assujetties à la Loi sur les Indiens et comblera le vide juridique qui existe en ce qui a trait aux biens immobiliers matrimoniaux dans le contexte des terres des réserves de la Loi sur les Indiens. Toutefois, les bandes cries et les terres de la catégorie IA ne sont pas gouvernées par la Loi sur les Indiens et en raison de cela, le projet de loi S-2 ne s’appliquera pas aux bandes cries ni aux terres de la catégorie IA. Ainsi, le vide juridique sur la division des biens immobiliers matrimoniaux situés à l’intérieur des terres de catégorie IA ne sera pas réglé.

Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) propose que les négociations actuelles avec le Canada traitent du pouvoir législatif du gouvernement de la Nation crie afin d’adopter des lois et des règlements qui s’appliqueront uniformément à toutes les collectivités cries et qui gouverneront les dossiers familiaux comme certains aspects des biens immobiliers matrimoniaux dans les terres de la catégorie IA.

F. Interprétation et application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Un représentant du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) a soulevé plusieurs problèmes et questions sur l’interprétation et l’application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec : 3

Les problèmes et questions soulevés par ce représentant doivent être discutés par les représentants du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) et le gouvernement du Canada.

G. Modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Selon les représentants du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee), des négociations sont en cours avec le Canada pour discuter des modifications possibles à la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ) et à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec concernant un gouvernement de la Nation crie envisagé dans l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee. Toutefois, les représentants du gouvernement fédéral ont déterminé qu’ils n’ont pas le mandat de discuter de modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec autres que celles décrites ou requises dans ladite Entente sur la nouvelle relation. En conséquence, il faut confier un mandat élargi aux représentants du gouvernement fédéral pour qu’ils puissent discuter d’autres modifications à la Loi afin de répondre aux préoccupations actuelles et aux besoins des gouvernements locaux et des administrations locales cries.

2. Première Nation Crie de Waswanipi

Les représentants de la Première nation crie de Waswanipi ont soulevé les problèmes et préoccupations ci-après : 4

A. Dialogue ouvert et enquête publique sur le développement des ressources

La Première nation crie de Waswanipi a exprimé des inquiétudes au sujet des impacts du développement des ressources et la nécessité de tirer profit de ce développement. Ses membres constatent la nécessité d’avoir un dialogue ouvert pour déterminer les impacts et les avantages du développement des ressources à l’intérieur de leurs territoires. Une enquête publique par le Canada et le Québec est nécessaire pour étudier la situation des terres des peuples de Waswanipi et de ses forêts et ressources naturelles. De plus, la population de Waswanipi veut que le gouvernement du Québec applique un moratoire de cinq (5) à sept (7) ans sur le développement de la foresterie commerciale pour permettre la tenue d’un audit, d’une évaluation et de l’attribution de la responsabilisation du développement des ressources à l’intérieur de leurs terres.

B. Déclaration eeyoue

La Première nation crie de Waswanipi soulève la nécessité de définir les principes clés d’une Déclaration eeyoue qui gouvernera et contrôlera le développement et la gestion de leurs terres.

C. Gouvernance eeyoue

La Première nation crie de Waswanipi est depuis toujours, un peuple autonome qui s’occupe de la gestion de ses terres et de la vie des ses membres. Le Waswanipi Eenouch avait établi la base de leur gouvernance au « vieux poste de traite » de Waswanipi. La Première nation crie de Waswanipi demande donc au gouvernement du Canada et au gouvernement du Québec de reconnaître le « vieux poste » comme site patrimonial historique et de le désigner à ce titre. La Première nation crie de Waswanipi se chargera ensuite de la développer comme lieu qui servira aux fins suivantes :

D. Vieux poste de traite

La Première nation crie de Waswanipi veut présenter une revendication légitime pour négocier une entente de revendication territoriale complète sur le déplacement et la réinstallation des peuples de Waswanipi de 1964 à 1975.

E. Les Cris de Waswanipi (à Senneterre)

La Première nation crie de Waswanipi favorise grandement le règlement de la question et de la situation des Cris de Senneterre par voie d’un référendum spécial. Il existe depuis longtemps le besoin d’aborder et de régler la situation des Waswanipi Eenouchs qui habitent à Senneterre et dans les régions avoisinantes du territoire défini dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ). Une base de terres pour la communauté serait peut-être nécessaire pour les Cris de Waswanipi qui vivent à Senneterre.

F. Consortium cri

La Première nation crie de Waswanipi veut établir son consortium cri afin de profiter du développement du territoire des Cris et du Plan Nord du Québec. À cette fin, elle veut négocier une entente pour l’établissement et le fonctionnement du consortium cri.

G. Groupe de travail tripartite sur les questions et préoccupations de Waswanipi

Les représentants de Waswanipi veulent l’établissement d’un groupe de travail tripartite composé de représentants de Waswanipi, de la Commission Crie-Naskapie et du Canada dont le mandat sera d’aborder les questions et préoccupations, passées et présentes, de Waswanipi comme les représentants de Waswanipi l’ont demandé à la Commission au cours des années antérieures.

H. Logement

À cause de la population à la hausse et de l’expansion continuelle de la communauté, la Première nation crie de Waswanipi fait face à des demandes relatives à de nouveaux logements et à des rénovations aux logements actuels.

I. Changements proposés aux limites des terres de catégorie I et II de Waswanipi

À cause de l’annulation du projet hydroélectrique Nottaway-Broadback-Rupert (NBR), il n’est plus nécessaire de maintenir la configuration actuelle des terres de catégorie I et de catégorie II de Waswanipi; la désignation des terres devrait donc être modifiée par l’entremise de négociations avec le Québec et le Canada pour refléter les besoins et les aspirations des peuples de Waswanipi. Ces négociations sont envisagées dans l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement le du Québec et les Cris du Québec.

De plus, le corridor actuel de cinq cents (500) pieds qui est parallèle des deux côtés de la route 113 (autoroute provinciale) constitue un obstacle pour le développement communautaire de Waswanipi. Plus particulièrement, le corridor directement de l’autre côté de la communauté empêche l’expansion communautaire et le développement à cause de son statut et de sa catégorie actuelle en vertu du régime foncier de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ).

J. Modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Le paragraphe 97 (2) de la Loi précise qu’un règlement pour autoriser les emprunts à long terme doit être approuvé par les électeurs de la bande au cours d’une réunion extraordinaire ou d’un référendum de la bande auquel au moins vingt (20) pour cent des électeurs exercent leur droit de vote à ce sujet.

Le paragraphe 193 (3) de la Loi précise qu’une bande peut, par écrit, renoncer à l’exemption conférée par le paragraphe 190 (2) en faveur de toute personne, en vertu de modalités et conditions convenues par les parties, et assujetties à l’approbation de la renonciation et des modalités et conditions de la part des électeurs de la bande au cours d’une réunion extraordinaire ou d’un référendum auquel au moins vingt-cinq (25) pour cent des électeurs exercent leur droit de vote à ce sujet.

La Première nation crie de Waswanipi explique qu’il est de plus en plus difficile de se conformer aux dispositions sur le quorum de ces articles de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. En outre, la tenue d’un référendum implique des coûts supplémentaires pour la bande et prolonge de façon inutile les délais pour obtenir un prêt d’une institution financière. De plus, à l’heure actuelle, les institutions financières exigent la renonciation à la saisie des biens conférée au paragraphe 190 (2) de la Loi avant de consentir un prêt à la bande.

K. Améliorer la qualité de la vie des aînés

Le département du développement social de la Première nation crie de Waswanipi a soumis un projet pour « l’Entente spécifique sur l’adaptation des services régionaux et des infrastructures afin d’améliorer les conditions de vie des aînés dans la région de l’Administration régionale crie et le Nord du Québec. » Les fonds négociés par l’Administration régionale crie aideront Waswanipi à développer et à mettre en œuvre un programme qui profitera aux aînés de la communauté en améliorant leur qualité de vie.

L. Les jeunes de Waswanipi

Le représentant des jeunes de Waswanipi a parlé de l’absence de programmes et de services pour les jeunes dans la communauté. Cette population veut un programme de stages pour les jeunes sur l’établissement et l’exploitation d’une entreprise et elle désire obtenir des programmes de formation sur la façon de s’occuper des problèmes sociaux et des problèmes des jeunes dans la communauté. Le groupe veut aussi apprendre et conserver le mode de vie traditionnel cri basé sur la chasse, la pêche et le trappage.

3. Cris de la Première nation de Waskaganish

Dans une présentation à la Commission datée du 24 février 2012, les Cris de la Première nation de Waskaganish ont soulevé les questions et préoccupations suivantes : 5

A. Dispositions sur le quorum dans la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Une importante portion des membres des Cris de la Première nation de Waskaganish réside à l’extérieur de la collectivité de Waskaganish. En conséquence, le respect de certaines dispositions sur le quorum contenues dans la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec complique le processus décisionnel local comme celui sur l’approbation des règlements. Les Cris de la Première nation de Waskaganish recommandent que les dispositions de la Loi sur le quorum soient révisées et que les quorums soient ajustés pour tenir compte de la population qui réside dans la communauté plutôt que de la population totale de la collectivité.

B. Logement

Comme les autres communautés cries, le logement est un problème majeur non réglé qui doit être abordé d’une façon adéquate par le gouvernement du Canada. Avec une population qui augmente rapidement, les Cris de la Première nation de Waskaganish vivent une grave pénurie de logements pour ses membres et familles.

C. Récoltes des non-Autochtones sur le territoire des Cris

À l’intérieur des zones de chasse désignées pour la chasse sportive, la plupart des chasseurs non-autochtones chassent le long et à partir des routes principales et les routes d’accès. Cette pratique sert non seulement à mettre les chasseurs cris en danger mais elle sert aussi en réalité à faire peur aux caribous et orignaux des zones désignées de chasse mais aussi à les en éloigner. Ce dossier doit être réglé et les règlements de chasse révisés et modifiés pour ajuster les zones désignées de chasse à l’extérieur des routes à des fins de sécurité.

4. Nation crie de Chisasibi

Au cours des audiences spéciales de la Commission sur la mise en œuvre, les représentants de la Nation crie de Chisasibi ont soulevé les préoccupations et problèmes suivants : 6

A. Police de Chisasibi

Le chef de la Nation crie de Chisasibi explique la décision prise par le chef et le conseil sur la mise en œuvre et la conformité qu’ils ont transmise à la police locale de Chisasibi. Toutefois, la police locale a refusé cette décision parce qu’ils font maintenant partie du Service régional de police Eeyou/Eenou. Le chef explique que le conseil a pris la décision pour le bien-être de la communauté et que le Service de police devrait s’y conformer. S’il y a un problème au sujet de la responsabilisation, le conseil de Chisasibi devrait en être informé.

B. Gouvernance et lois

Un aîné a parlé de l’intrusion des lois de l’extérieur sur la gouvernance de la communauté. Il semble que le chef et le conseil ne peuvent pas gouverner efficacement à cause de l’application des lois d’autres gouvernements. Ces lois interfèrent, empiètent et constituent aussi des obstacles lorsque le chef et le conseil agissent dans les meilleurs intérêts des gens, surtout lorsqu’il s’agit de problèmes sociaux.

C. Règlements de la municipalité de la Baie-James (MBJ)

Les chasseurs cris sont accusés d’activités illégales de chasse présumées qui enfreignent supposément un règlement de la municipalité de la Baie-James. Le chef s’inquiète de la reconnaissance et de la protection des droits de chasse des Cris en vertu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ), un traité moderne conférant des droits qui sont reconnus et protégés par la Loi constitutionnelle de 1982.

D. Programmes pour les jeunes

Un représentant des jeunes de Chisasibi explique la nécessité de programmes pour les Jeunes et le manque de financement pour ces programmes.

E. Bloc « D »

Conformément à l’Annexe D de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec, le Québec transférera l’administration, la gestion et le contrôle des terres dites du Bloc « D », y compris la piste d’atterrissage, au gouvernement du Canada pour l’usage et le bénéfice exclusif de la Nation crie de Chisasibi, conformément à certaines conditions. (Le Bloc « D » fera alors partie des terres de la catégorie IA de Chisasibi.) Les parties déploieront tous les efforts nécessaires pour faire en sorte que le transfert final par le Québec soit complété au plus tard le 30 septembre 2002.

Le chef poursuit sa présentation en précisant que dix (10) ans après la signature de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec, le Bloc « D » n’a pas encore été transféré pour l’usage et le bénéfice exclusif de la Nation crie de Chisasibi.

F. Logement

Selon le chef de la Nation crie de Chisasibi, les arriérés et la surpopulation dans les logements à Chisasibi constituent des problèmes et enjeux sérieux qui doivent être réglés de façon ponctuelle et adéquate par le Canada.

G. Législation sur le contrôle des armes à feu

Le chef de la Nation crie de Chisasibi précise que la législation fédérale sur le contrôle des armes à feu n’est pas nécessaire parce que les Cris utilisent leurs propres règles et pratiques en matière de sûreté.

5. Nation crie de Washaw Sibi

Les membres de la Nation crie de Washaw Sibi sont bénéficiaires de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ). Toutefois même comme bénéficiaires de la Convention, ils ne reçoivent pas certains nombreux bénéfices dont profitent d’autres communautés cries.

La préoccupation principale de la Nation crie de Washaw Sibi est l’établissement d’une communauté crie distincte avec ses propres terres de catégorie I afin de lui permettre de profiter des programmes et services au même niveau que les Cris dans les neuf autres collectivités. À cette fin, la Nation crie de Washaw Sibi a choisi un emplacement pour installer sa communauté à l’intérieur des limites municipales de la Ville d’Amos au Québec. Les représentants de la Première nation crie de Washaw Sibi rapportent que des progrès sont réalisés en vue de mettre la touche finale à l’emplacement pour leur communauté. 7

6. Nation naskapie de Kawawachikamach

Le 9 février 2012, la Nation naskapie de Kawawachikamach a soumis une présentation à la Commission. Dans cette présentation, la Nation naskapie de Kawawachikamach soulève les questions suivantes : 8

A. Exploitation minière dans la région de Kawawachikamach – Schefferville

La Nation naskapie fait face et est témoin d’une résurgence du secteur minier dans la région de Kawawachikamach – Schefferville. Plusieurs sociétés minières impliquées dans des activités d’exploration et deux entreprises, Labrador Iron Mines et Tata Steel Minerals Canada, sont bien avancées dans leurs activités de développement. La Nation naskapie a en main des ententes sur les répercussions et les avantages (ERA) qui font présentement l’objet d’un examen avec ces deux compagnies.

Le conseil de la Nation naskapie concentre ses efforts dans quatre secteurs d’activités : l’opération et la location de machinerie lourde, y compris le concassage de roches, la gestion des déchets, la restauration, la distribution des carburants et les télécommunications. Sauf pour le secteur de la restauration, toutes les entreprises mentionnées ci-dessus sont soit opérationnelles ou seront opérationnelles dans un avenir rapproché.

La Nation naskapie est aussi en train d’établir des entreprises communes dans d’autres domaines à l’intérieur desquels le développement des compétences et l’emploi occupent une place prépondérante.

De plus, la Nation naskapie place l’accent sur des programmes de formation pour ses membres afin de leur permettre de pouvoir entrer dans le secteur minier de la région et d’y progresser. Afin de répondre aux besoins relatifs à l’accès à la formation sur une base continuelle, la Nation naskapie préconise l’établissement d’un centre de formation en exploitation minière à Kawawachikamach.

B. Plan Nord – développement et mise en œuvre

La Nation naskapie a joué un rôle actif dans les discussions avec le Québec qui ont mené au Plan Nord et sa planification stratégique. Une table naskapie sera établie sous peu et sera responsable des communications continuelles et régulières entre la Nation naskapie et le Québec au fur et à mesure de la progression du développement et de la mise en œuvre du Plan Nord.

C. Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec – modifications techniques

La Nation naskapie demande que des modifications techniques soient apportées à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec au sujet des dispositions suivantes de la Loi et d’autres sujets :

La Nation naskapie a confirmé au Canada son désir d’aller de l’avant pour discuter de ces modifications en collaboration avec la Nation crie d’Eeyou Istchee.

D. Logement

La Nation naskapie, comme les communautés cries, a des problèmes et préoccupations similaires sur le logement, surtout le besoin de financement pour :

E. Traitement des eaux usées

La Nation naskapie de Kawawachikamach dépasse la capacité de traitement des eaux usées de la collectivité et a besoin de financement pour augmenter sa capacité de traitement. Toutefois, le Canada traite la Nation naskapie comme communauté de l’Entente et répond donc qu’il n’a pas de fonds des programmes pour mettre à la disposition d’autres Premières nations. En conséquence, la Nation naskapie ne semble pas obtenir sa part équitable ni aucune part du financement des programmes réguliers à la disposition des Premières nations.

NOTES DE LA FIN

L’association des trappeurs cris

Chapitre six

1. Introduction

L’Association des trappeurs cris (ATC) a été créée, il y a 35 ans, comme organisme à but non lucratif conformément au paragraphe 28.5 de l’article 28 de la Convention de la baie James et du Nord québécois (CBJNQ). Elle a été incorporée le 10 mars 1978. Depuis ce temps, elle joue un rôle très actif pour protéger et promouvoir les intérêts des chasseurs et trappeurs cris et pour appuyer leurs activités de récolte faunique en général, à l’aide de la prestation de programmes et de services.

Depuis sa création, l’ATC a traversé une période de changements rapides du paysage politique, économique et social et environnemental de la société eeyoue et d’Eeyou Istchee. La présentation de l’ATC à la Commission Crie-Naskapie le 10 février 2012 vise à décrire le rôle de l’ATC dans le contexte de ces grands changements à la société eeyoue et de fournir à la Commission des observations sur les enjeux qui exigeront fort probablement une attention particulière dans les années à venir.

2. La mission et le rôle de l’Association des trappeurs cris

Les leaders, les individus et le peuple eeyou ont toujours exprimé le besoin de protéger, de préserver et de maintenir les traditions, pratiques et valeurs eeyoues ou Eeyou Eehdou-wun. Les chasseurs et les trappeurs eeyous assument un rôle fondamental dans la protection, la préservation et le maintien de l’Eeyou Eehdou-wun. Par conséquent, l’ATC, à titre de groupe représentatif des trappeurs et chasseurs eeyous, protège et fait la promotion du mode de vie traditionnel et des valeurs fondamentales, des traditions et des lois des chasseurs et trappeurs eeyous et, en réalité, de la Nation Eeyou d’Eeyou Istchee.

3. S’adapter au changement

Comme l’un des objectifs fondamentaux, la Convention de la baie James et du Nord québécois a été négociée par les Eeyous afin de protéger et conserver le mode de vie traditionnel eeyou et sa culture. Cependant, les Eeyous ont reconnu que l’utilisation et l’occupation d’Eeyou Istchee seraient maintenues et poursuivies dans le contexte de changements politiques, sociaux et économiques de la société eeyoue et d’Eeyou Istchee.

Le développement hydroélectrique d’Eeyou Istchee a servi à faire grandement augmenter l’accès aux communautés eeyoues et aux territoires de chasse eeyous. Les Eeyous et les non-autochtones partagent l’occupation d’Eeyou Istchee et partagent l’utilisation de ses ressources fauniques.

D’autres développements industriels comme les activités de foresterie commerciale ont eu un impact et continuent d’avoir un impact sur l’utilisation des territoires de chasse par les chasseurs et les trappeurs eeyous.

La population eeyoue a plus que doublé depuis 1975 et les Eeyous se sont adaptés et continuent à faire face au défi de s’adapter à ces changements à la société eeyoue et à Eeyou Istchee.

4. Maintenir la vitalité d’une société de chasse

L’Association des trappeurs cris fait face à une série d’enjeux et d’inquiétudes en raison des changements actuels et ceux à venir. En particulier, les chasseurs et trappeurs eeyous sont affectés par les changements politiques, sociaux et économiques de la société eeyoue et d’Eeyou Istchee. Les changements climatiques et leurs impacts constituent des préoccupations supplémentaires. De plus, les Eeyous sont affectés par le libre accès et la concurrence entre les chasseurs et pêcheurs eeyous et non-autochtones pour les mêmes ressources fauniques. La saine gestion et la protection adéquate des ressources fauniques représentent un défi sérieux. La protection, le maintien et la continuité de la vitalité de la société de chasse eeyoue sont devenus et demeurent le défi le plus important à relever pour les Eeyous d’Eeyou Istchee.

5. Accès grandissant au territoire

La construction et l’utilisation de routes, de pistes de VTT et de motoneiges ont entraîné l’ouverture du territoire dont l’accès n’est pas contrôlé. Les Eeyous, surtout les chasseurs eeyous, ont exprimé de grandes inquiétudes quant aux répercussions de l’accès non contrôlé aux territoires de chasse eeyous. Cependant, le Québec ne modifie pas ses politiques relatives à la nature publique et le libre accès aux routes y compris les routes d’accès en forêt. Cet accès non contrôlé change la nature des territoires de chasse des Eeyous et entraîne de sérieuses répercussions sur la gestion de la faune. Les chasseurs non-autochtones et les autres utilisateurs ont tendance à considérer les pistes de VTT et de motoneiges comme propriété privée. Les chasseurs et trappeurs eeyous ont été contestés alors qu’ils utilisaient ces pistes. Il existe donc un besoin croissant de régler ces problèmes.

6. Menace pour les abris et la sécurité

Les Eeyous ont établi des camps de chasse à l’extérieur de leurs communautés. C’est un élément intégral de l’utilisation eeyoue d’Eeyou Istchee. L’établissement des camps comporte un élément de sécurité – les chasseurs se fient à un code de déontologie commun qui assure que l’équipement essentiel laissé dans les camps ne sera pas enlevé de façon arbitraire et sans que les chasseurs ne le sachent. Mais souvent, ce n’est pas le cas : de l’équipement de chasse clé se fait voler et le camp est saccagé. Les chasseurs aimeraient être en mesure de régler et de rectifier cette situation.

7. Situation coûteuse de l’entretien de deux habitations

En plus de maintenir une résidence dans les collectivités, les chasseurs eeyous entretiennent aussi des camps de chasse. Les dépenses liées à l’entretien d’une habitation dans la communauté et un camp de chasse dans le territoire de chasse sont élevées pour les chasseurs eeyous qui doivent aussi débourser des frais supplémentaires pour le carburant, l’équipement de chasse et le transport pour poursuivre leurs activités traditionnelles et assurer leur subsistance. Il est de plus en plus difficile pour les chasseurs à titre individuel d’absorber ces coûts qui commencent à augmenter.

8. La vie après le développement hydroélectrique

Les projets de développement hydroélectrique à Eeyou Istchee ont eu et continuent d’avoir un impact social et économique majeur sur les Eeyous, leurs communautés et leurs territoires de chasse. L’implication économique eeyoue s’est faite de façon progressive et a eu des répercussions majeures pour l’économie de chasse eeyoue. Plusieurs chasseurs font du travail saisonnier en construction et plusieurs pointeurs participent directement à la planification et à la mise en œuvre de travaux d’entretien des projets de développement hydroélectrique. Après près de 40 ans de construction, le complexe La Grande et ses composantes de développement hydroélectrique seront bientôt complétés. Les chasseurs eeyous, comme d’autres Eeyous des communautés, devront trouver d’autres sources d’emplois dans des activités industrielles et économiques prévues à l’intérieur d’Eeyou Istchee comme les secteurs de foresterie commerciale ou d’exploitation minière. En conséquence, des possibilités d’emplois et des programmes de formation sont nécessaires.

9. Loi traditionnelle eeyoue sur la chasse

L’Association des trappeurs cris a produit un document écrit sur la loi traditionnelle et coutumière eeyoue de chasse qui respecte la gouvernance des territoires de chasse eeyous et la gestion des ressources fauniques correspondantes. Comme objectif principal, la loi eeyoue de chasse décrit la façon dont les territoires de chasse familiaux sont gouvernés et gérés par les pointeurs eeyous et les familles. Ce document explique la procédure de transfert des territoires de chasse et fournit aussi une procédure pour le règlement des différends au sujet des limites et frontières des territoires de chasse familiaux. Les limites et frontières des territoires de chasse familiaux sont d’une importance cruciale pour les chasseurs eeyous parce que les promoteurs de projets de développement des ressources comme les projets de foresterie commerciale, les projets miniers et les routes doivent tenir compte des impacts sociaux et environnementaux de leurs projets sur les territoires de chasse et les chasseurs lorsqu’ils préparent leurs énoncés sur les impacts. L’ATC s’implique activement dans les activités suivantes :

L’ATC a besoin d’un soutien financier et politique fort pour poursuivre ces activités importantes.

10. Registre fédéral des armes d’épaule

Le 25 octobre 2011, le gouvernement fédéral a présenté une loi afin d’abroger le registre des armes d’épaule. L’Association des trappeurs cris soutient cette initiative fédérale parce que le registre des armes d’épaule a toujours été une question épineuse pour les chasseurs eeyous. Il appert que le gouvernement du Québec songe peut-être à mettre sur pied son propre registre des armes à feu. L’ATC s’oppose à toute initiative de ce genre qui affecte le mode de vie eeyou et ses pratiques.

11. Pouvoir de réglementation des gouvernements eeyous

Les autorités et gouvernements locaux et régionaux eeyous ont des pouvoirs de réglementation définis au sens large dans l’article 24 de la Convention de la baie James et du Nord québécois en ce qui a trait à l’utilisation et la gestion des ressources fauniques dans les terres des catégories I et II et, dans une certaine mesure, dans les terres de catégorie III. Ces pouvoirs s’ajoutent aux lois et pratiques coutumières eeyoues quant à la gestion des ressources fauniques et les territoires de chasse. Selon ce que l’ATC pense, les gouvernements eeyous n’ont pas utilisé ces pouvoirs de réglementation. L’ATC encourage la Commission à soutenir et à encourager l’action dans cet aspect de la mise en œuvre de la CBJNQ.

12. Rôle de l’Association des trappeurs cris en ce qui a trait à la gouvernance eeyoue

L’Association des trappeurs cris est une organisation qui protège les droits et les intérêts des « Indoho-suu » et qui fait la promotion du bien-être des « Indoho-suu » de la société crie. (Les « Indoho-suu » sont les Cris traditionnels qui vivent principalement de la chasse, de la pêche, du trappage et des activités connexes.) Ces activités continuent de constituer un rôle et une nécessité pour la perpétuation de la culture crie et du mode de vie traditionnel des Cris.

En ce qui a trait à la relation avec les Premières nations cries et l’Administration régionale crie, l’Association des trappeurs cris est d’avis que son mandat est le suivant :

En conséquence, le travail de l’ATC, tant au niveau régional que local, est pertinent par rapport à la mise en œuvre d’un régime de gestion faunique conformément à l’article 24 de la CBJNQ et aux procédures d’évaluation des impacts environnementaux et sociaux de l’article 22 de la Convention. Afin de jouer un rôle efficace, l’ATC doit être représentée au sein des organismes consultatifs envisagés pour la gestion faunique et l’évaluation et l’examen sociaux et environnementaux.

13. Conclusion

Les Eeyous d’Eeyou Istchee traversent une période intéressante alors que la gouvernance évolue au niveau régional avec l’officialisation d’un gouvernement de la Nation crie et ses institutions. L’ATC prévoit faire partie de cet important développement et cherchera activement des moyens pour assurer que les intérêts des chasseurs eeyous sont adéquatement pris en compte. L’ATC croit fermement que la loi traditionnelle eeyoue, dont le noyau repose sur les activités et les valeurs de chasse, est un élément fondamental de la gouvernance eeyoue d’Eeyou Istchee.

Conseils, commissions et tribunaux (CCT) autochtones : quelques réflexions sur l’expérience de la Commission Crie-Naskapie

Chapitre sept

« La plupart des institutions régissant la vie autochtone aujourd’hui se trouvent à l’extérieur des collectivités autochtones. Dans la plupart des cas, elles fonctionnent suivant des règles qui ne tiennent pas compte des valeurs et des préférences autochtones. Il faut faire place aux institutions autochtones dans tous les secteurs de la vie publique. » « … ces institutions devraient être conçues pour compléter les structures des nations et non pas les concurrencer. » 1

(Commission royale sur les peuples autochtones (CRPA), 1996)

Introduction

Alors que le leadership et le peuple des Cris envisagent les différentes structures et différents processus à inclure dans l’officialisation du gouvernement de la Nation crie et de la constitution de la Nation crie, la Commission Crie-Naskapie offre certaines idées à évaluer sur la structure et le processus possible en vue d’établir un organe « indépendant » auprès duquel les membres de la Nation pourront soulever leurs problèmes et préoccupations. Cet organe pourrait aussi tenir des audiences indépendantes et présenter des constatations et recommandations impartiales.

Nous croyons qu’un tel organisme (que ce soit la continuation de la Commission actuelle ou un organe complètement nouveau) doit être fondé sur cinq principes :

L’objet du présent chapitre est d’expliquer les raisons pour lesquelles ces principes sont importants ainsi que la façon dont ils pourraient être mis en œuvre. Nos propositions sont basées sur les plus de 25 années d’expérience de la Commission Crie-Naskapie en ce qui a trait à la législation actuelle qui gouverne son rôle et ses responsabilités. Les commissaires ont aussi eu la possibilité de tenir compte de l’expérience d’un certain nombre d’autres conseils, commissions et tribunaux autochtones (CCT) qui ont été établis plus récemment.

Contexte

Les observations de la Commission royale sur les peuples autochtones citées plus haut peuvent s’appliquer aux organes indépendants que nous suggérons. Selon notre expérience ainsi que celle des organismes semblables, il est devenu évident que la tendance est d’adopter les structures et les processus des tribunaux administratifs « traditionnels » basés sur les idées euro-canadiennes des définitions de l’équité, de l’indépendance, etc., et dont les termes sont codifiés dans le droit administratif canadien. Certes, il y a de bonnes choses à dire de ce droit. En général, il sert bien les Canadiens non-autochtones. Notre expérience démontre que la question, bien exprimée par la citation de la CRPA présentée plus haut est que toutes les commissions et tous les tribunaux et conseils créés comme partie intégrante de la gouvernance d’une nation doivent d’abord être fondés sur les valeurs et les préférences de cette nation plutôt que de simplement copier l’approche utilisée par une autre nation. De même, les processus utilisés doivent provenir de la nation touchée et non des procédures utilisées par d’autres. Enfin, les lois gouvernantes actuelles doivent être cohérentes par rapport aux droits autochtones et aux droits issus des traités, au droit coutumier, aux valeurs et aux traditions. Comme deuxième élément d’étude, il est toujours possible d’adopter certaines structures et certains processus utilisés par d’autres, tant et aussi longtemps que la nation garde le droit de changer ces éléments au fur et à mesure des besoins.

Au fil du temps, le droit administratif au Canada s’est développé comme partie intégrante de la tradition juridique canadienne plus large. Ses racines incluent le common law de l’Angleterre, les concepts européens de « justice naturelle », une certaine législation sur la procédure administrative ainsi que des dispositions précises dans plusieurs lois qui créent des conseils, commissions et tribunaux « traditionnels ». Tous ces éléments sont tissés dans un ensemble cohérent de lois, encadré par un certain nombre de décisions judiciaires. Malheureusement, cet ensemble de lois a évolué grandement sans que l’on considère les lois sur les droits autochtones et les droits issus des traités sans mentionner le droit traditionnel et coutumier. On peut argumenter que le droit administratif a été développé avant que l’article 35 sur les droits autochtones et les droits issus des traités soit enchâssé à la Loi constitutionnelle de 1982 et que la plupart des organes de droit administratif s’occupaient surtout de questions qui ne touchaient pas les Autochtones. Il est toutefois important de noter que la Proclamation royale de 1763 reconnaissait les nations et gouvernements autochtones, que de nombreux traités assuraient la même reconnaissance, mais que lorsque le droit administratif était appliqué aux Nations autochtones, ces garanties étaient grandement ignorées.

Les principes directeurs des conseils, commissions et tribunaux canadiens « traditionnels » gravitent surtout autour du concept d’équité. Bien sûr, ce concept constitue une valeur fondamentale dans les communautés autochtones aussi. Le problème survient plutôt parce que l’application euro-canadienne de ce concept dans la pratique est incompatible avec les collectivités autochtones.

Les concepts d’équité englobent certains critères précis comme : personne ne peut devenir juge dans sa propre cause (y compris une cause touchant une personne unie par les liens du sang, le mariage, une relation professionnelle, une amitié étroite, etc.), personne ne devrait faire l’objet d’une constatation négative sans avoir eu la possibilité d’être au courant des questions faisant l’objet des décisions et le droit d’être entendu pour se défendre, tout le monde a le droit à des conseils juridiques, etc. Les décideurs eux-mêmes doivent suivre les lois, considérer la preuve, ils ne doivent pas arbitrairement exercer leur pouvoir discrétionnaire, etc. Ces critères et d’autres assurent en général, l’équité du travail de littéralement des centaines de commissions, tribunaux et conseils « traditionnels ». Les Canadiens connaissent ces organes comme le CRTC, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, la Commission des affaires municipales de l’Ontario, différentes entreprises de services publics, les commissions sur l’industrie du taxi, etc. Dans les situations où une personne pense que justice ne lui a pas été rendue, elle peut, dans certains cas, en appeler auprès d’un organisme d’appel et dans pratiquement tous les cas, faire appel aux tribunaux pour une révision judiciaire ou un autre redressement juridique.

Au cours des derniers 25 à 30 ans, un ensemble considérable de lois sur les droits autochtones et les droits issus des traités a commencé à se développer au Canada, surtout à la suite de la jurisprudence qui a servi à interpréter et à appliquer les dispositions de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Au cours des années à venir, cette jurisprudence touchera de plus en plus les activités et les processus des CCT autochtones ainsi que les CCT « traditionnels » qui traitent des questions autochtones.

Lorsque la Commission Crie-Naskapie a commencé son travail en 1986, il y avait peu de raisons de penser à la nécessité d’aborder ces questions. Les modifications de l’article 35 étaient en vigueur depuis seulement environ quatre (4) ans et la Commission était parmi un nombre restreint d’organes autochtones de ce genre au Canada. Les Cris et les Naskapis avaient négocié l’ajout à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, des articles pour établir la Commission et déterminer ses tâches et ses pouvoirs. Il fallait attendre pour savoir comment ces articles fonctionneraient en pratique. Il est maintenant possible de tirer des leçons de l’expérience de plus d’un quart de siècle. Pendant à peu près la même période de temps, avec l’arrivée des autres règlements de revendications territoriales, des traités modernes et des lois sur l’autonomie gouvernementale, il y a une prolifération du nombre de CCT autochtones. (Il y en a maintenant plus de 60 qui fonctionnent partout au pays.)

De plus en plus, les CCT font face à la nécessité de réconcilier le droit traditionnel et coutumier autochtone avec le droit administratif canadien qui gouverne grandement leurs activités de tous les jours. La Commission Crie-Naskapie a certainement eu un avantage à cet égard. La loi qui mandate notre travail nous confère une grande mesure de flexibilité et les commissaires actuels sont d’avis que le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale est protégé par la Constitution et que ce droit inhérent inclut l’obligation de respecter le droit traditionnel et coutumier dans tous les aspects du travail de la Commission. Jusqu’à maintenant, aucun défi n’est venu remettre ce point de vue en question. Au fur et à mesure que la Nation crie développera sa constitution, nous espérons que le droit traditionnel et coutumier ainsi que le droit contemporain des Cris auront priorité sur le droit administratif « général » contradictoire.

La question de l’indépendance des CCT autochtones

La plupart des CCT, tant « traditionnels » qu’autochtones, sont établis pour assurer l’application de la législation ou des règlements, le règlement des différends et la prise de décisions ou recommandations de façon « indépendante et autonome » du gouvernement qui les a créés. La majorité des CCT doivent interpréter et défendre cette indépendance sur une base régulière. Les ministères du gouvernement vont, dans la nature des choses, essayer de garder sous leur contrôle, le plus grand nombre possible des activités qui ont trait à leur mandat fondamental. Bien que ces tendances contradictoires s’appliquent à petite ou à grande échelle à la plupart des CCT et des gouvernements, elles sont particulièrement importantes pour les CCT autochtones qui sont assujettis à un mécanisme quelconque de contrôle de la part des gouvernements fédéral ou provincial. Le gouvernement fédéral possède un contrôle sans entrave sur les activités fondamentales de gouvernance dans les collectivités autochtones, surtout en raison de la Loi sur les Indiens, et ce, depuis près de deux siècles. Maintenant que des pouvoirs de gouvernance de plus en plus étendus sont assumés par les gouvernements des Premières nations, il est particulièrement important d’assurer que les CCT autochtones ne sont pas si indépendants qu’ils entravent le fonctionnement de la vraie autonomie gouvernementale. Dans ce contexte, la question doit être étudiée par les gouvernements autochtones à travers le pays.

Dans le cas de la Nation crie d’Eeyou Istchee, il s’agit de l’équilibre qui doit être atteint entre l’indépendance nécessaire pour leurs CCT et le besoin qu’a sagement reconnu la Commission royale sur les peuples autochtones voulant que « … ces institutions … devraient être conçues pour compléter les structures des nations et non pas les concurrencer. »

En envisageant l’établissement d’un CCT indépendant de la Nation crie, plusieurs décisions doivent être prises :

Chacune de ces questions soulève des enjeux importants. Le Canada et le Québec s’attendront manifestement à avoir un certain degré d’intrant si leur législation, règlements et politiques doivent être touchés. La Commission Crie-Naskapie actuelle pourrait être responsabilisée par une loi provinciale pour effectuer les mêmes fonctions qu’elle effectue vis-à-vis du gouvernement fédéral. Cette option aurait l’avantage d’avoir des résultats prévisibles.

D’autre part, la constitution de la Nation crie pourrait prévoir toutes les dispositions pour un CCT cri indépendant en lui attribuant les fonctions de son choix. Cela aurait l’avantage d’être l’exercice d’un droit inhérent et pourrait inclure des fonctions dépassant de beaucoup les fonctions possibles en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Si l’option retenue est d’utiliser la loi en vigueur ou une loi fédérale amendée, avec ou sans loi provinciale concurrente, les limites touchant la loi actuelle devront être éliminées dans la mesure du possible.

Certains changements simples aux articles actuels de la Loi qui traitent de la Commission pourraient englober les points suivants :

Base juridique de l’établissement et de la dissolution de CCT autochtones

La méthode utilisée pour créer un CCT autochtone ainsi que le processus permettant de le dissoudre sont des facteurs importants qui touchent son indépendance surtout lorsque ses décisions sont controversées.

Clairement, un organe créé par un traité ou une convention en vertu de « l’article 35 » a des garanties fortes de son existence continuelle. En général, le processus pour amender les traités ou les conventions assure que le consentement de la Première nation (des Premières nations) ou d’une autre collectivité autochtone est nécessaire.

Un CCT créé par une mesure législative spécifique veut dire qu’un amendement législatif est essentiel pour modifier son mandat ou permettre sa dissolution. Ceci ne garantit certes pas le consentement des Autochtones, mais constitue un processus ouvert et public et comporte, en général, la possibilité pour les parties intéressées de fournir leur intrant. Lorsqu’une loi du gouvernement est exigée par les dispositions d’un traité ou d’une autre entente en vertu de « l’article 35 », elle est en bien meilleure position qu’une autre mesure législative. (La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est certainement un bon exemple de ce genre de mesure législative.)

Certains CCT sont créés par décret. L’habileté du gouvernement du jour de simplement révoquer le décret constitue une restriction très importante sur l’indépendance. De plus, la création de certains CCT est basée seulement sur une lettre ou directive du ministre. Ces organes sont donc entièrement vulnérables à la volonté du ministre.

Enfin, le renouvellement de certains types de CCT est assujetti explicitement à la discrétion du gouvernement.

Les leaders et négociateurs autochtones et leurs conseillers juridiques doivent aborder la question du fondement juridique de l’établissement du CCT et de sa dissolution possible pour évaluer le degré d’indépendance voulu pour ces organes.

Dans le cas des Cris et des Naskapis, ces questions semblent avoir été abordées dans la Loi actuelle sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Méthodes de nomination et de révocation des membres des CCT

La méthode par laquelle les membres des CCT sont nommés est presque aussi fondamentale pour l’indépendance des CCT que l’autorité en vertu de laquelle ils sont établis. Dans certains cas, différents membres sont nommés par les différentes parties intéressées qui parrainent le CCT et les membres choisis représentent ces parties. La British Columbia Treaty Commission est peut-être l’exemple le mieux connu de cette approche.

La nomination des membres de la Commission Crie-Naskapie est prévue dans la législation qui exige que les membres soient « … nommés par le gouverneur en conseil sur recommandation de l’Administration régionale crie et de la bande naskapie. » Il est donc clair que le gouvernement peut seulement nommer comme membres des personnes qui ont des recommandations. À ce jour, cette approche a raisonnablement bien fonctionné.

D’autres méthodes utilisées pour les nominations sont les décrets (avec ou sans consultation), la nomination par un ministre spécifique ou la nomination d’office en raison d’un autre poste occupé. Chacune de ces approches comprend des restrictions réelles sur l’indépendance.

Contrôle du financement

À l’heure actuelle, le financement de la plupart des CCT provient du gouvernement et est contrôlé par ce gouvernement par l’entremise de tous les processus de gestion financière liés à l’établissement des budgets, au contrôle des dépenses ou autres mécanismes. Étant donné que le contrôle des dépenses publiques est jugé être l’un des pouvoirs les plus importants et essentiels du Parlement et des législatures, la garantie de financement à long terme des CCT représente tout un défi. La menace de retenir, retarder ou réduire les fonds ou de changer unilatéralement les modalités et conditions de financement est un problème pour l’autonomie gouvernementale dans son ensemble et constitue aussi une inquiétude majeure pour l’indépendance des CCT. Bien que le Parlement doive assurer le contrôle des dépenses, les gouvernements doivent respecter leurs obligations en vertu des traités et conventions ainsi que leurs obligations fiduciaires. Comme l’a observé la Cour suprême du Canada dans l’affaire Badger, « Ils (les traités) créent des obligations exécutoires, fondées sur le consentement mutuel des parties. » 2 Le juge Heald de la Cour fédérale du Canada (Division des appels) a affirmé à peu près la même chose dans l’affaire Kruger lorsqu’il a écrit : « Le gouverneur en conseil ne peut pas cesser sa relation fiduciaire avec les Indiens en se basant sur d’autres considérations. » 3

Les mécanismes actuels, surtout en ce qui a trait au coût des fonctions de gouvernance pour lesquels les Cris d’Eeyou Istchee ont accepté les responsabilités d’autres gouvernements, comportent des transferts pluriannuels importants qui ne sont plus assujettis à la gestion et au contrôle des bureaucrates. Cette approche, qui traite les fonds basés sur les obligations issues des traités comme s’ils étaient analogues à « des recettes propres » doit être élargie pour permettre aux CCT autochtones d’être complètement la responsabilité des Premières nations dans le cadre des structures et processus de gouvernance et de responsabilité.

La question des mécanismes de financement pour la Commission Crie-Naskapie, ainsi que les questions de son indépendance doivent être envisagées par les Cris et les Naskapis au cours de leur étude des fonctions de la Commission ou d’un organe similaire.

Problèmes des CCT autochtones relatifs aux processus

Même si la nécessité d’assurer l’indépendance des CCT autochtones est cruciale, il est important de se souvenir que pour qu’ils soient pertinents comme partie intégrante de la structure de gouvernance d’une nation, ils doivent aussi travailler en fonction des valeurs, principes et méthodes préférées de faire les choses dans la nation en question. Ceci veut dire que l’approche normale euro-canadienne du « droit administratif » devra, dans certains cas, être remplacée par une approche axée sur la nation. En pratique, c’est ce que la Commission Crie-Naskapie a fait en appliquant des concepts comme l’idée que le droit et les coutumes traditionnels cris ou naskapis font partie intégrante des droits autochtones des Cris et des Naskapis et donc, qu’ils sont protégés par la Constitution. Toutefois, en évaluant le développement à venir de la gouvernance, il sera nécessaire d’assurer que tous les CCT auront l’habileté de réaliser leurs tâches, tant de façon indépendante que conformément à la « façon de faire les choses des Cris », « la façon de faire les choses des Naskapis », etc.

Exemples de problèmes de principes et de pratiques

L’équité est une valeur fondamentale tant pour les CCT « traditionnels » que pour les CCT autochtones. La façon d’en arriver là est le domaine de différence critique. Voici certains exemples pour expliquer la question :

Les lois et les règlements sur les élections, que ce soit pour une Première nation, des élections fédérales, provinciales ou municipales, fournissent en général un ensemble de dates précises pour convoquer des élections, pour ouvrir et mettre fin aux dates des candidatures et (après un nombre précis de jours) pour la tenue du vote. Si ces dates ne sont pas respectées, l’élection n’aura pas été organisée conformément à la loi et elle pourra être contestée. Ceci peut être très raisonnable dans le cadre des élections fédérales, provinciales ou municipales. Dans les collectivités autochtones, la coutume pourrait dicter que s’il y a un décès dans la communauté, toutes les fonctions peuvent être reportées d’une journée ou deux (y compris l’élection d’un chef et du conseil). En général, le droit électoral normalisé ne reconnaîtra pas cette situation. Par contre, le droit traditionnel reconnaît ce droit.

Le fonctionnement de la plupart des CCT dicte que si un panel composé de plusieurs membres prend une décision qui n’est pas unanime, on passera au vote et l’opinion majoritaire prévaudra. En général, les CCT autochtones prendront le temps et feront un effort supplémentaire pour en arriver à un consensus.

Dans pratiquement tous les CCT à travers le Canada, la valeur d’équité, qui englobe le concept de ne pas pouvoir agir comme juge dans sa propre cause, exige qu’aucune relation substantielle n’existe entre les membres du CCT et les parties qui apparaissent devant le groupe. En général, ceci inclut les relations de sang, le mariage, les ententes commerciales, les amitiés, etc. Dans les situations où l’instance a une grande population, la probabilité d’une relation existante est faible. Dans les panels qui comprennent de nombreux membres, s’il y a une relation existante, le membre du panel touché peut se retirer. Dans une collectivité de quelques centaines de personnes ou même de quelques milliers de personnes, ceci peut ne pas être une possibilité pratique. Il faut trouver d’autres voies pour assurer l’équité.

Une question semblable est celle des individus « qui portent plusieurs chapeaux » dans des situations où la perception crée l’impossibilité d’équité. Une petite communauté pourrait avoir une seule personne ou seulement quelques personnes qui sont expertes ou intéressées, disons à la planification. Donc, si un appel est déposé concernant une décision en matière de planification, il pourrait être difficile de trouver les membres nécessaires pour créer un organe responsable des appels.

À un niveau plus large, les CCT autochtones, contrairement à leurs collègues « traditionnels », fonctionnent au quotidien à l’intérieur du cadre de la loi sur les droits des Autochtones et les droits issus des traités, de la législation spécifique des Premières nations, des dispositions des règlements des traités et des revendications territoriales ainsi que des connaissances du droit traditionnel et coutumier. On commence seulement à comprendre les répercussions de cette situation.

La Commission soulève quelques considérations et il est possible d’en trouver de nombreuses autres. Ce qu’il faut, c’est un ensemble de solutions qui fonctionnent pour la collectivité touchée. Ce qui est clair est que l’approche à « taille unique » ne fonctionnera pas. La culture, le droit traditionnel et les coutumes, la langue et « la façon dont nous faisons les choses autour d’ici » varieront grandement parmi les Cris, les Mi’kmaqs, les Haidas et les Inuits tout comme ces éléments varient parmi les nations d’Europe ou d’Asie ou de partout ailleurs. Un élément commun est le respect mutuel du droit de chaque nation de se gouverner conformément à ses propres valeurs. Certaines collectivités pourraient opter pour utiliser plusieurs éléments du droit administratif « traditionnel ». Plusieurs pourraient choisir des approches traditionnelles. Un mélange des deux pourrait souvent être la bonne solution. La clé est de trouver des solutions au niveau communautaire ou au niveau de la Première nation.

Prochaines étapes

Au fur et à mesure que la Nation crie d’Eeyou Istchee envisage le développement d’une constitution pour la Nation crie et l’officialisation du gouvernement de la Nation crie, elle pourrait vouloir tenir compte de certains éléments soulevés dans le présent chapitre. L’expérience de la Commission au cours des vingt-six dernières années pourrait très bien être utile dans le cadre de ce processus. Nous continuons de discuter des questions d’intérêt commun avec les autres CCT autochtones, selon les besoins. Enfin, la Commission continue de vouloir obtenir les commentaires de la Nation naskapie à ce sujet.

NOTES DE LA FIN

Recommandations de la Commission Crie-Naskapie

Chapitre huit

Après avoir étudié et analysé les présentations, soumissions et commentaires des représentants des Cris, des Naskapis et du gouvernement fédéral, la Commission Crie-Naskapie présente les recommandations et commentaires suivants :

Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux (projet de loi S-2)

La société crie change étant donné que les Cris dans les collectivités possèdent des biens à valeur plus élevée comme des résidences privées et il y a plus de relations conjugales entre les Cris et les non-Cris. Ces changements soulèvent des questions au sujet des droits et des intérêts liés à l’utilisation, l’occupation et la possession des résidences familiales et la division des biens et de ces résidences familiales situées sur les terres de la catégorie IA.

1. Les négociations actuelles entre le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) et le Canada devraient se pencher sur le pouvoir législatif du gouvernement de la Nation crie d’adopter des lois en ajoutant des règles qui s’appliqueraient uniformément dans toutes les collectivités cries et qui gouverneraient les situations familiales comme certains aspects des biens immobiliers matrimoniaux dans les terres de la catégorie IA.

Interprétation et application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Un représentant du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) a soulevé plusieurs problèmes et questions sur l’interprétation et l’application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Ces problèmes et questions sont décrits dans le chapitre 5 du présent rapport.

2. Le Canada et le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) devraient établir un groupe de travail dont le mandat serait de produire un document sur l’interprétation et l’application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Selon les représentants du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee), des négociations sont en cours avec le Canada pour discuter des modifications possibles à la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ) et à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec concernant un gouvernement de la Nation crie envisagé dans l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee. Toutefois, les représentants du gouvernement fédéral ont indiqué qu’ils n’ont pas le mandat de discuter des modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec autres que celles décrites ou requises dans ladite Entente sur la nouvelle relation.

3. Le gouvernement du Canada devrait confier un mandat élargi à son négociateur dans le cadre des discussions actuelles entre le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) et le Canada pour que les intervenants puissent discuter d’autres modifications à la Loi afin de répondre aux préoccupations actuelles et aux besoins des gouvernements locaux et des administrations locales cries.

Ancien poste de traite de Waswanipi

La Première nation crie de Waswanipi a établi les bases de son premier gouvernement local à « l’ancien poste de traite » de Waswanipi. La Première nation crie de Waswanipi demande donc au gouvernement du Canada et au gouvernement du Québec de reconnaître le site de « l’ancien poste de traite » comme site patrimonial historique et de le déclarer ainsi. La Première nation crie de Waswanipi développerait ensuite ce site comme lieu à des fins culturelles et éducatives.

4. Les représentants du gouvernement du Canada, du gouvernement du Québec et les Eeyou d’Eeyou Istchee (Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) et la Première nation crie de Waswanipi) devraient entamer des discussions pour la reconnaissance et la désignation de « l’ancien poste de traite » de Waswanipi à titre de site historique ou patrimonial.

Groupe de travail sur les problèmes et inquiétudes des Eeyous

Les représentants de Waswanipi veulent l’établissement d’un groupe de travail tripartite composé de représentants de Waswanipi, de la Commission Crie-Naskapie et du Canada dont le mandat serait de se pencher sur les questions et préoccupations, passées et présentes de Waswanipi comme les représentants de Waswanipi l’ont demandé à la Commission au cours des années antérieures. Toutefois, les autres collectivités eeyoues et le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) ont aussi soulevé plusieurs problèmes et inquiétudes passés et actuels.

5. Un groupe de travail composé de représentants du Canada, des Eeyous d’Eeyou Istchee et de la Commission Crie-Naskapie devrait être établi pour examiner et s’occuper des questions et préoccupations passées et actuelles soulevées par les collectivités eeyoues et le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) dans les rapports de la Commission.

Logement

Le logement est continuellement une question urgente soulevée par les collectivités eeyoues. Les besoins en matière de logement et les problèmes liés au logement dans les collectivités cries et naskapies de Kawawachikamach sont rapportés par la Commission Crie-Naskapie depuis qu’elle a commencé à produire ses rapports bisannuels en 1986.

À cause de la population à la hausse, de l’expansion continuelle des communautés et autres facteurs, les autorités locales et régionales eeyoues font face à des demandes relatives à de nouveaux logements et à des rénovations aux logements actuels.

6. Par l’intermédiaire de leurs autorités locales et régionales, les Cris d’Eeyou Istchee devraient produire un plan d’action et des stratégies pour régler les besoins actuels et à venir en matière de logement pour les communautés cries d’Eeyou Istchee.

7. Par l’intermédiaire de leurs autorités locales et régionales, les Cris d’Eeyou Istchee devraient mener des négociations et discussions pour régler les besoins actuels et à venir en matière de logement pour les collectivités eeyoues d’Eeyou Istchee dans le cadre de leurs nouvelles relations actuelles avec le Canada et le Québec.

La Nation naskapie, tout comme les collectivités cries, ont des problèmes et préoccupations semblables en matière de logement pour ses membres qui habitent à Kawawachikamach.

8. La Nation naskapie de Kawawachikamach devrait produire un plan d’action et des stratégies pour régler les besoins actuels et à venir en matière de logement.

9. La Nation naskapie de Kawawachikamach devrait entamer des négociations et discussions pour régler ses besoins actuels et à venir en matière de logement avec le Canada et le Québec.

Changements proposés aux limites des terres de catégorie I et II de Waswanipi

À cause de l’annulation du projet hydroélectrique Nottaway-Broadback-Rupert (NBR), il n’est plus nécessaire de maintenir la configuration actuelle des terres de catégorie I et de catégorie II de Waswanipi. De plus, le corridor actuel de cinq cents (500) pieds qui est parallèle des deux côtés de la route 113 (autoroute provinciale) constitue un obstacle pour le développement communautaire de Waswanipi. Plus particulièrement, le corridor directement de l’autre côté de la communauté empêche l’expansion communautaire et le développement à cause du statut et de sa catégorie actuelle en vertu du régime foncier de la Convention de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ).

10. La configuration actuelle des terres des catégories I et II de la Première nation crie de Waswanipi devrait être changée à la suite de négociations avec le Québec et le Canada pour refléter les besoins et aspirations des peuples de Waswanipi. (Ces négociations sont envisagées dans l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement le du Québec et les Cris du Québec.)

Modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

Les gouvernements locaux eeyous et naskapis éprouvent d’énormes difficultés à se conformer aux dispositions et exigences sur le quorum de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec qui ont des répercussions financières. Les représentants des Eeyous et des Naskapis ont soulevé plusieurs autres problèmes et préoccupations concernant l’application et les modifications de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

11. Les Cris d’Eeyou Istchee et la Nation naskapie de Kawawachikamach devraient conjointement produire un document sur les problèmes et préoccupations concernant l’application et les modifications de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. (La Commission serait disposée à participer à ce processus.)

12. Le Canada, les Cris d’Eeyou Istchee et la Nation naskapie de Kawawachikamach devraient établir une table pour la révision et les négociations subséquentes au sujet des problèmes et préoccupations concernant l’application et les modifications de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec afin de faciliter et d’améliorer le gouvernement local et l’administration.

Jeunes d’Eeyou Istchee

Des représentants des jeunes eeyous de différentes collectivités ont expliqué l’absence de programmes et de services pour les jeunes des collectivités.

13. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie et le Conseil des jeunes de la Nation crie d’Eeyou Istchee devraient produire un rapport sur les besoins des jeunes eeyous dans les collectivités.

14. Le Canada et le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie devraient mener des négociations et discussions pour s’occuper des besoins des jeunes eeyous en matière de programmes et services dans les collectivités eeyoues.

Bloc « D »

« Conformément à l’Annexe D de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec, le Québec transférera l’administration, la gestion et le contrôle des terres dites du Bloc « D », y compris la piste d’atterrissage, au gouvernement du Canada pour l’usage et le bénéfice exclusif de la Nation crie de Chisasibi, conformément à certaines conditions. (Le Bloc « D » fera alors partie des terres de la catégorie IA de Chisasibi.) Les parties déploieront tous les efforts nécessaires pour faire en sorte que le transfert final par le Québec soit complété au plus tard le 30 septembre 2002. »

Le chef de Chisasibi a précisé que dix (10) ans après la signature de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec, le Bloc « D » n’a pas encore été transféré pour l’usage et le bénéfice exclusif de la Nation crie de Chisasibi.

On ne peut pas justifier le long délai qui dure encore en ce qui a trait au transfert du Bloc « D » à la Nation crie de Chisasibi. La Commission considère que le Québec et le Canada sont en violation de l’Annexe D de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec.

15. La Commission formule à nouveau la recommandation de son Rapport 2010 voulant que le Bloc « D » soit transféré à la Nation crie de Chisasibi sur-le-champ.

Traitement des eaux usées (Kawawachikamach)

La Nation naskapie de Kawawachikamach dépasse la capacité de traitement des eaux usées de la collectivité et a besoin de financement pour augmenter sa capacité de traitement. Toutefois, le Canada traite la Nation naskapie comme communauté de l’Entente et répond donc qu’il n’a pas de fonds liés à ses programmes à mettre à la disposition d’autres Premières nations.

En conséquence, la Nation naskapie ne semble pas obtenir sa part équitable ni aucune part du financement des programmes réguliers à la disposition des Premières nations.

16. Le Canada et la Nation naskapie de Kawawachikamach devraient discuter et négocier le financement pour le traitement des eaux usées de la collectivité en se basant sur la lettre, l’intention et l’esprit des dispositions de la Convention du Nord-Est québécois.

Association des trappeurs cris, gouvernance eeyoue et autres questions

Les Eeyous d’Eeyou Istchee traversent une période intéressante à l’heure actuelle alors que la gouvernance eeyoue avance à un niveau régional avec l’officialisation d’un gouvernement de la Nation crie et ses institutions. L’Association des trappeurs cris (ATC) a l’intention de participer à ce développement important et cherchera activement à trouver des façons d’assurer que les intérêts des chasseurs eeyous seront adéquatement pris en compte. L’ATC croit fermement que le droit traditionnel eeyou, au coeur duquel les activités et valeurs de chasse figurent, est un élément fondamental de la gouvernance eeyoue à Eeyou Istchee. L’ATC a aussi soulevé d’autres questions et préoccupations qui constituent des défis sérieux pour les Cris d’Eeyou Istchee comme :

17. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie et l’Association des trappeurs cris devraient conjointement aborder ces problèmes, inquiétudes et défis pour les régler entre les deux autorités eeyoues et dans le but de soumettre les questions en souffrance aux autres autorités concernées comme l’Office de la sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris.

Droit de chasse traditionnel eeyou

L’Association des trappeurs cris a produit un document écrit sur le droit de chasse traditionnel et coutumier eeyou concernant la gouvernance des territoires de chasse eeyous et la gestion des ressources fauniques de ces territoires. L’ATC travaille activement à :

L’ATC a besoin d’un soutien financier et politique fort pour la poursuite de ces entreprises importantes.

18. Le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie devrait fournir un soutien financier et politique à l’Association des trappeurs cris pour la poursuite de ces entreprises importantes.

Exercice des pouvoirs de réglementation des gouvernements eeyous

Les autorités locales et régionales ou les gouvernements locaux et régionaux eeyous ont des pouvoirs de réglementation définis au sens large dans l’article 24 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois en ce qui a trait à l’utilisation et à la gestion des ressources fauniques à l’intérieur des terres des catégories I et II et dans une certaine mesure, dans les terres de la catégorie III. Selon ce qu’en a conclu l’Association des trappeurs cris, les gouvernements eeyous n’ont pas utilisé ces pouvoirs de réglementation.

19. Les autorités locales et régionales ou les gouvernements locaux et régionaux Eeyou devraient exercer, de façon proactive, leurs pouvoirs de réglementation qui sont définis au sens large, dans l’article 24 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois en ce qui a trait à l’utilisation et à la gestion des ressources fauniques à l’intérieur des terres des catégories I et II et dans une certaine mesure, dans les terres de la catégorie III.

Gouvernance eeyoue à Eeyou Istchee

20. À la lumière des discussions actuelles entre les Eeyous, le Canada et le Québec sur la gouvernance du Territoire envisagé dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois et les nombreux défis posés aux Eeyous pour établir différentes structures de gouvernement comme ordre de gouvernement à Eeyou Istchee et pour exercer une bonne gouvernance efficace, les gouvernements locaux et nationaux (régionaux) eeyous devraient :

21. Plus particulièrement, il faut élaborer des stratégies et les mettre en œuvre, afin de renforcer les capacités de gouvernance des Eeyous aux fins d’une gouvernance efficace et concrète. La Commission Crie-Naskapie propose que ces stratégies comprennent les suivantes :

22. Afin d’assurer la responsabilisation, les gouvernements eeyous devraient prendre les mesures suivantes:

Commission Crie-Naskapie

Les discussions et négociations actuelles entre le Canada et les Eeyous d’Eeyou Istchee sur l’officialisation du gouvernement de la Nation crie et la constitution de la Nation crie fournissent la possibilité aux parties de réviser les tâches et pouvoirs ainsi que le fonctionnement de la Commission Crie-Naskapie.

23. La Commission recommande que le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie tiennent compte des idées et suggestions sur l’avenir de la Commission Crie-Naskapie ou d’un organe semblable qui sont présentées dans le chapitre 2 du présent rapport.

Conclusion

Chapitre neuf

Au début de ses relations avec les gouvernements non-Cris, les représentants de la Nation crie d’Eeyou Istchee étaient surtout des administrateurs et gestionnaires qui s’occupaient des programmes et services conçus par des gouvernements de l’extérieur. C’est donc dire que l’administration plutôt qu’un gouvernement caractérisait les relations.

Toutefois, les Eeyous d’Eeyou Istchee ont changé ce modèle par la mise en œuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et les conventions connexes comme les ententes sur la nouvelle relation avec le Canada et le Québec. Les Nations cries (et naskapies) ont acquis plus de pouvoirs. Les Cris ont aussi exercé leur mode de gouvernance de la nation par l’intermédiaire du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration régionale crie. En outre, à l’heure actuelle, les Eeyous mènent des discussions et des négociations avec le Canada et le Québec pour l’officialisation d’un gouvernement de la Nation crie et l’établissement d’un gouvernement régional public.

Les Cris et les Naskapis font valoir leurs droits en matière d’autogouvernance et ont édifié leurs nations conformément à leurs désirs et aspirations. Par ces gestes, les Nations cries et naskapies ont choisi de passer de l’autoadministration à l’autonomie gouvernementale. Cette transition est un aspect fondamental de la construction d’une nation étant donné que les Nations cries et naskapies ont récupéré la gouvernance à titre de droit et activité autochtone.

Mais la construction d’une nation et donc l’autonomie gouvernementale sont des activités continuelles qui doivent établir des sociétés qui fonctionnent sur le plan économique, social, culturel et politique en plus d’être durables.

À cet égard, l’aspiration de la Nation crie voulant une plus grande responsabilité pour le développement économique et communautaire des Cris caractérisée par une autonomie accrue, conformément aux modalités et dispositions de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec et de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee, améliorera la gouvernance et l’administration des Cris.

En outre, l’Entente cadre entre les Cris d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec sur la gouvernance dans le Territoire de la Baie-James d’Eeyou Istchee envisage la participation concrète des Cris dans la gouvernance des terres de la catégorie III à l’intérieur du territoire, en partenariat avec les autres résidents du territoire.

Ce sont des mesures positives et prometteuses pour l’avancement et l’exercice de la gouvernance eeyoue.

Toutefois, au cours des vingt-huit (28) dernières années, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec n’a pas gardé la cadence ni évolué au même rythme que l’exercice et la pratique du gouvernement local des Cris et des Naskapis et l’état du droit autochtone et contemporain. En fait, certaines dispositions et modalités actuelles ainsi que l’absence de dispositions essentielles dans la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec constituent des obstacles sérieux et des restrictions sévères pour le gouvernement local et l’administration des Cris et des Naskapis.

Le rapport actuel et les rapports précédents, les documents de discussion et les leçons retenues au cours des enquêtes de la Commission Crie-Naskapie présentent des conclusions, constatations et recommandations qui ont trait à l’examen et à la révision de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec afin de la transformer dans le but de refléter la réalité actuelle et la dynamique en évolution du gouvernement local des Eeyous (et des Naskapis) et l’état du droit autochtone et contemporain.

Il est donc aussi important pour le gouvernement du Canada et la Nation crie d’Eeyou Istchee de trouver, dans leur nouvelle relation, des façons d’avancer et d’améliorer le gouvernement local des Cris (et des Naskapis) en déterminant les amendements appropriés à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.