English Version


RÉDACTEURS
Richard Saunders, président
Philip Awashish, commissaire

COUVERTURE, MISE EN PAGE ET CONCEPTION
gordongroup marketing + communications

IMPRESSION
Gilmore

TRADUCTION
George Guanish (Naskapi)
Mary Mokoush (Naskapi)
C.I.L.F.O. (Français)
Louise Blacksmith (Cri)

PHOTGRAPHIE
Philip Awashish
Gaston Cooper
Bjorn Olson (Matthew Coon Come, Sr.)

CONTACTEZ
Commission Crie-Naskapie
222, rue Queen, bureau 305
Ottawa (Ontario) K1P 5V9

téléphone : 613 234-4288
télécopieur : 613 234-8102
sans frais : 1 888 236-6603

SITE WEB
www.creenaskapicommission.net

En ce 20e anniversaire des activités de la commission Crie-Naskapie, les commissaires tiennent à remercier les représentants et les dirigeants du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee), les gouvernements locaux des nations crie et naskapie, ainsi que le ministère des Affaires indiennes et du Nord du Canada pour la présentation de leurs exposés lors des Audiences spéciales sur l’exécution de la loi que la Commission a tenues en prévision du présent rapport biennal. Ces exposés se sont avérés essentiels à la production d’un rapport d’information sur les enjeux et les préoccupations des nations eeyou, ainsi que du gouvernement du Canada.

Les commissaires tiennent également à remercier le personnel de la Commission. Le travail et la contribution de Brian Shawana, Gloria Dedam et de Charlotte Kitchen qui ont effectivement permis de concevoir ce rapport.

V
Le 30 juin 2006

L’Honorable Jim Prentice, C.P., député
Ministre des Affaires indiennes et du Nord du Canada
Édifices du Parlement
Ottawa (Ontario) K1A 0H4

M. le ministre,

Nous sommes heureux de vous faire parvenir, sous ce pli, le dixième rapport biennal de la commission
Crie-Naskapie, conformément à l’article 171.(1) de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Le rapport repose sur les audiences et autres consultations et discussions au cours desquelles les Cris et
Naskapis et leurs gouvernements, de même que le gouvernement du Canada, ont présenté leurs points
de vue, leurs préoccupations et leurs suggestions relativement à la mise en oeuvre de la Loi. Nous avons
également examiné les commentaires exprimés par écrit par votre Ministère et diverses autres sources.
Enfin, nous avons également tenu compte des questions plus générales soulevées dans les représentations
particulières que nous avons reçues depuis notre Rapport 2004.

Nous espérons vous rencontrer, de même que vos dirigeants, afin de discuter de quelle façon on peut
faire le suivi de nos constatations et de nos recommandations au profit de tous ceux qui sont concernés.
Après la présentation du Rapport au Parlement, nous en discuterons avec les Cris et les Naskapis, de
même qu’avec les autres parties intéressées.

Je vous pris d’agréer l’expression de mes sentiments respectueux,

La commission Crie-Naskapie


Richard Saunders
Président


Robert Kanatewat
Commissaire


Philip Awashish
Commissaire

Philip Awashish
Commissaire

Philip Awashish a été l’un des
négociateurs cris en chef
représentant la nation crie
d’Eeyou Istchee lors des
négociations qui ont mené à la
signature de la Convention de la
Baie-James et du Nord québécois
.
Pendant une période de 20 ans,
il a occupé divers postes de
haute gestion au sein de la
nation crie d’Eeyou Istchee, par
exemple ceux de chef principal
et de vice-président du Grand
conseil des Cris (du Québec) et
de l’administration régionale
crie, et de chef et conseiller
de la nation crie de Mistissini.
Il agit actuellement à titre
d’expert-conseil au sujet des
affaires et des droits
autochtones. Philip Awashish
est membre de la commission
Crie-Naskapie depuis 1997.
Richard Saunders
Président

Richard Saunders détient des
diplômes universitaires en sciences
politiques et en administration
publique de l’Université
Carleton. Il a travaillé pour
l’Assemblée des Premières
nations, la Indian Association of
Alberta, le gouvernements
fédéral, ainsi que les gouvernements
de l’Ontario et de l’Alberta.
Au cours des trois
dernières années, il a agi comme
directeur des négociations pour
le gouvernement de la
NouvelleÉcosse, qui a
récemment signé une entente
cadre avec les chefs
Mi’kmag et le gouvernement
fédéral. Richard a été membre de
la commission Crie-Naskapie
pendant trois mandats
consécutifs, de 1986 à 1992; il
en est le président depuis 1997.
Robert Kanatewat
Commissaire

Robert Kanatewat, un Eeyou de
Chisasibi, a joué un rôle-clé dans
la promotion de la sensibilisation
aux droits des Eeyous à titre
de membre exécutif de la
Confédération des Indiens du
Québec à la fin des années 1960
et au début des années 1970. Il a
été le principal demandeur dans
l’affaire Kanatewat c. Société de
développement de la Baie James,
lorsque la nation crie a décidé
de s’opposer à l’aménagement
hydro-électrique initial d’Eeyou
Istchee. En sa qualité de cadre
principal, il a participé aux
négociations menant à l’exécution
de la Convention de la Baie-
James et du Nord québécois
.
Pendant de nombreuses années,
il a servi les Eeyous d’Istchee
comme chef exécutif du Grand
Conseil des Cris (du Québec),
chef de la nation crie de Chisasibi
et dirigeant de diverses entreprises
commerciales. À l’exception
d’un mandat, Robert Kanatewat
est membre de la commission
Crie-Naskapie depuis 1986.
VII

MOT DU PRÉSIDENT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3

CHAPITRE UN
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
9

CHAPITRE DEUX
Mandat de la commission Crie-Naskapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
12

CHAPITRE TROIS
Loi Eeyou et gouvernance Eeyou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
15

CHAPITRE QUATRE
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d’Eeyou Istchee . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
24

CHAPITRE CINQ
La nation naskapie de Kawawachikamach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
40

CHAPITRE SIX
Réponse du Ministère des affaires indiennes et du Nord
aux recommandations du Rapport 2004
de la commission Crie-Naskapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
44

CHAPITRE SEPT
Recommandations de la commission Crie-Naskapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
54

CHAPITRE HUIT
Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
58

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               1

La commission Crie-Naskapie est en activité depuis vingt ans. Bien que la Loi sur les Cris et les Naskapis
du Québec
, derrière la création de la Commission, ait été adoptée en 1984, les premiers commissaires
n’ont été nommés qu’en février 1986. Depuis ce temps, la Commission a présenté neuf rapports
semestriels sur l’application de la Loi. Le présent rapport est le dixième. De plus, la Commission a
procédé à des enquêtes sur plusieurs plaintes individuelles, préparé plusieurs documents de discussion,
s’est présenté devant les comités parlementaires et présenté d’innombrables exposés sur divers aspects
de la Loi. Pour placer la période couverte dans un certain contexte, il y a eu dix ministres des Affaires
indiennes et du Nord canadien au cours de la même période. Il s’agit de : MM. Crombie, McKnight,
Siddon, Cadieux, Irwin, Stewart, Nault, Mitchell, Scott et Prentice.

Lorsque l’on fait un retour sur cette période, on ne peut faire autrement que remarquer quatre choses :

1. Des changements très importants sur les plans social, économique et de la gouvernance sont survenus au
sein des communautés cries et naskapies. Ces changements ont pour la plupart été profitables.
Malheureusement, certains problèmes récalcitrants restent non résolus et quelques-uns sont apparus.
2. Malgré certaines percées positives et importantes, les rapports entre les gouvernements cris et naskapis et
les gouvernements fédéral et provincial continuent de se heurter à des problèmes qui demandent les
meilleurs efforts si nous voulons que l’on règle ces questions efficacement, sans confrontation ni litige.
3. La vision des responsables de l’élaboration de traités perdure. En effet, les responsables de l’élaboration de
traités eux-mêmes ont joué des rôles de leader importants dans la transposition de cette vision dans la
réalité. Aujourd’hui cependant, avec la nouvelle génération de leaders qui émergent, la plupart n’ayant
jamais vécu les difficultés survenues à la suite de la signature de la Convention de la Baie-James et du Nord
québécois
et de la Convention du Nord-Est québécois, ces générations ont besoin de trouver le temps de se
réunir et de renouveler la vision à la lumière de leur expérience historique commune et des
circonstances actuelles.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               3
4. Les leçons apprises au cours de l’histoire récente des Cris et des Naskapis constituent une ressource
importante, mais en grande partie non exploitée, pour les autres Premières nations à l’échelle du Canada
qui ont de la difficulté à élaborer et à mettre en oeuvre leur propre vision de la gouvernance et leur propre
méthode de résolution des questions auxquelles elles sont confrontées. On doit trouver des moyens de
partager l’expérience des Cris et des Naskapis sans épuiser indûment des ressources rares.

Cela vaudrait peut-être la peine de réfléchir quelques instants à ces quatre observations avant de se
pencher sur les questions spécifiques abordées dans le présent rapport.

De 1986 à 2006 : Une grande période de changement

Si l’on fait un retour en 1986, ou auparavant, et que l’on compare la vie des communautés cries et
naskapies de l’époque avec la vie de ces mêmes communautés aujourd’hui, les changements sont
évidents et spectaculaires.

De toute évidence, le niveau de vie s’est amélioré sous tous les aspects. La santé en général s’est améliorée
avec, par exemple, une espérance de vie plus longue et une diminution de la mortalité infantile. D’un
autre côté, le diabète est devenu un problème très sérieux. Le suicide et les tentatives de suicide,
particulièrement chez les jeunes, sont devenus une source tragique de préoccupation dans certaines
communautés. Les niveaux de scolarisation ont augmenté de façon spectaculaire. De nombreuses
nouvelles entreprises sont en activité et connaissent du succès sur le plan économique. Donc, les
vingt dernières années ont apporté une très nette amélioration du niveau de vie malgré certaines
difficultés importantes.

Bien que les niveaux de vie soient importants, il y a d’autres indicateurs sociaux d’importance égale,
sinon plus grande. Par exemple les langues cries et naskapies sont bien établies et vivantes, la plupart
des jeunes parlant couramment leur langue tout en ayant pleinement la capacité d’entretenir une
conversation en anglais ou en français. Ce n’est malheureusement pas le cas dans plusieurs autres
communautés au pays. De plus, contrairement à ce que vivent plusieurs autres Premières nations, il n’y
a pas d’exode important de la population vivant dans ces communautés. En fait, il y a eu une relativement
forte croissance de la population au cours des dernières années. Cette croissance ne montre aucun signe
de ralentissement. Le taux élevé de création de nouvelles familles crée des besoins urgents en matière de
logement et d’établissements d’enseignement et de plusieurs autres programmes, mais c’est également
de bon augure pour la solidité et la viabilité à long terme des nations crie et naskapie. Sur le plan de la
gouvernance, les dirigeants cris entreprennent de nouvelles initiatives visant à habiliter le gouvernement
de la nation crie à l’aide de moyens conformes aux valeurs et traditions cries, mais qui répondent
également aux difficultés auxquelles est confrontée la gouvernance d’Eeyou Istchee au 21e siècle. La
nation naskapie se concentre donc sur sa propre autonomie administrative alors que ses voisins inuits
amorcent un nouveau processus de gouvernance régionale.

Les rapports avec les gouvernements fédéral et provinciaux

Les rapports entre les gouvernements cris et naskapis, d’une part, et les gouvernements du Canada et
du Québec d’autre part, continuent d’être une source de préoccupation et de dysfonctionnement
occasionnel, bien qu’ils aient présenté certains signes d’amélioration durable au cours des dernières



4
Mot du président

années. Dans le Rapport de la commission Crie-Naskapie de 1998, nous avions fait état d’un certain
nombre de problèmes génériques qui hantent les gouvernements, particulièrement sur le plan de leurs
rapports avec les Premières nations. Les préoccupations qui avaient été déterminées à l’époque étaient
les suivantes : la prise de conscience collective limitée, la mémoire institutionnelle limitée et l’impuissance
ministérielle. On associe à la question de l’impuissance ministérielle le besoin de mécanismes de
responsabilité bureaucratique dans le domaine de la gestion des politiques aussi forts que ceux en place
dans le domaine de la gestion financière. Enfin, la Commission a souligné, à plusieurs reprises, le besoin
d’outils afin de s’assurer que les conventions et les traités sont appliqués complètement et en temps utile
et que les différends concernant leurs clauses sont résolus sans avoir recours à la confrontation et au litige.

La durée extrêmement courte des mandats des ministres mentionnés ci-dessus met en relief l’une des
raisons qui expliquent pourquoi ils ont eu autant de difficulté à provoquer un changement positif et
pourquoi leurs décisions particulières ont en fait habituellement des répercussions moins qu’optimales
sur le changement de l’orientation stratégique du Ministère. À part quelques exceptions, la tendance a
été que les ministres deviennent ni plus ni moins des « mini gouverneurs généraux », dans le sens où ils
sont la figure de proue d’une bureaucratie lourde et complexe au sein de laquelle la plupart des véritables
décisions sont prises par d’autres. Malgré leur rôle limité dans la prise de décision en tant que telle, ce
sont les ministres qui portent la responsabilité sur leurs épaules à la Chambre des communes, de même
qu’auprès des Premières nations, des médias et du public lorsque ces décisions se révèlent être mauvaises.

Le fait que les véritables décisions soient souvent prises, dans la pratique, par des bureaucrates non élus
et bien trop souvent pas tout à fait réellement responsables représente un défi de plus en plus important
pour notre démocratie. Cela n’a rien de bien surprenant étant donné que pendant les deux années ou à

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               5

peu près que durent les mandats des ministres, ils ne peuvent même pas espérer comprendre le
contexte historique et juridique à partir duquel on élabore les politiques des Affaires indiennes. Les faits
essentiels des nombreux traités et accords sur une revendication territoriale, de l’évolution rapide de la
loi ancestrale, des cultures et des traditions de plus de six cents Premières nations dont ils sont
responsables représentent toutes des questions à propos desquelles même une connaissance rudimentaire
nécessiterait toute leur attention pendant leur mandat d’une durée moyenne de deux ans. Il est rare en
effet que l’on nomme un ministre ayant déjà une connaissance importante de ces questions. Ce n’est
qu’en ayant acquis une vaste connaissance et compréhension formelle qu’un ministre peut commencer
à comprendre la pleine signification des nombreuses décisions relativement aux politiques et aux
programmes qu’on lui demande d’approuver. C’est dans cet environnement que des fonctionnaires
deviennent des preneurs de décision de facto.

Ce qui est regrettable, c’est qu’il est courant d’entendre des hauts fonctionnaires faire des commentaires
comme « le ministre n’a aucune idée de ce qui se passe » ou « c’est difficile de le tenir au courant » ou « le
ministre est un désastre ambulant », etc. Ce problème remarqué est accentué en ayant du personnel des
communications dans tous les ministères qui relèvent de gestionnaires des communications centrales
afin de « s’assurer de l’uniformité des messages traités » à l’échelle de la fonction publique. Les ministres
prononcent rarement un mot qui n’a pas été rédigé ou, à tout le moins, approuvé au préalable par des
« spécialistes des communications » non élus. En général, ces soit-disant spécialistes se voient comme
des gens qui empêchent le ministre de « se mettre dans l’eau chaude ». En fait, ils atténuent les discours,
les communiqués de presse, etc., au point où ils renferment souvent peu de contenu et sont, à tout le
moins, confectionnés de manière à renfermer suffisamment d’ambiguïtés pour pouvoir éventuellement
démentir tout engagement devenu inopportun. Loin « d’empêcher le ministre de se mettre dans l’eau
chaude », de telles insignifiances calculées font souvent passer les ministres pour des gens mal informés,
indécis ou tout simplement menteurs.

Les hauts fonctionnaires s’entendent généralement sur tous les mots que renferme une décision
ministérielle avant même que le ministre en ait pris connaissance. Plus souvent qu’autrement, on
trouvera des raisons pour justifier les erreurs du passé et pour défendre le statu quo. Quoiqu’il en soit,
le document final que l’on dépose devant le ministre reflète souvent uniquement la pensée des hauts
fonctionnaires qui prennent soin de formuler les options qu’ils présentent de manière à ce que seule
l’option qu’ils recommandent soit celle qui sera vraisemblablement approuvée.

Cette approche peut parfois échapper à l’attention du public et des médias parce que c’est presque
devenu la norme dans le contexte d’un discours politique trop souvent orienté vers l’évitement de
débats publics sur les choix difficiles. Les « spécialistes des communications » s’efforceront de créer des
politiques aussi ambiguës que possible et qui nécessitent le minimum de recommandations, d’explications
ou de défense en public. Le cliché actuel fait ressortir la convenance de « passer inaperçu ».

Les Premières nations sont confrontées au double défi d’un contrôle ministériel limité des politiques
et de résultats stratégiques fondés sur les communications dans le contexte de décades de traités non
respectés, de promesses non tenues et de Conventions répudiées en partie ou en totalité. Elles en sont



6
Mot du président

venues à accepter que cette lutte contre les obstacles au changement constitue une partie tout à fait
normale de leur tâche. Un plus grand défi pour les Canadiens, c’est de trouver des moyens pour faire
en sorte que les gouvernements imposants et complexes restent démocratiques autrement que de façon
purement symbolique.

La vision des responsables de l’élaboration de traités

Les leaders qui ont contesté la décision unilatérale du premier ministre Bourassa en 1971 de se lancer
dans le gigantesque projet d’aménagement hydroélectrique à la Baie-James sans se soucier des droits des
peuples qui habitaient ces terres depuis la nuit des temps, les leaders qui ont intenté la poursuite en
justice pour contrer cet aménagement, les leaders qui ont négocié la Convention de la Baie-James et du
Nord québécois
et la Convention du Nord-Est du Québec et, par la suite, les termes de la Loi sur les Cris et les
Naskapis du Québec
étaient des visionnaires. Ils ont vu des nations crie et naskapie qui seraient fortes et
viables, en contrôle de leur propre destinée et dont les valeurs et les traditions continueraient d’être
pratiquées aussi efficacement dans le contexte du 21e siècle, comme elles ont vécu pendant des
millénaires auparavant. Ils ont négocié des conventions en vertu desquelles le Canada et le Québec ont
accepté d’appuyer leurs droits et leurs intérêts en tant que partenaires. Bien que certains anciens leaders
soient partis et qu’une nouvelle génération de leaders prend progressivement leur place, les dirigeants
cris et naskapis poursuivent la lutte afin d’appliquer la lettre et l’esprit des conventions, de même que
le sens intégral de la Loi. On conclut de nouvelles ententes au besoin pour s’attaquer aux réalités
d’aujourd’hui. L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris
d’Eeyou Istchee de 2002 est un exemple de nouvelles ententes semblables. Les négociations actuellement
en cours avec le gouvernement fédéral, dirigées par Bill Namagoose et Raymond Chrétien, en sont un
autre. Les Naskapis se sont maintenant engagés à examiner leurs propres besoins administratifs en vue
de la création d’une administration régionale par les Inuits du Nord du Québec.

Les responsables de l’élaboration de traités avaient des visions rigoureuses de ce que cela signifiait qu’être
la nation crie ou la nation naskapie dans le contexte des pressions engendrées par les décisions unilatérales
du Québec à l’époque. Aujourd’hui, trente-cinq ans plus tard, une nouvelle génération doit relever le défi
de mener l’évolution de la vision des responsables de l’élaboration de traités pour en faire un projet de
plan d’action au 21e siècle. L’ancien concept de « bandes » aux termes de la Loi sur les Indiens n’existe
plus. La « bande », telle que prévue par la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, a besoin d’un
changement fondamental. Les communautés ont apporté plusieurs suggestions précises en vue
d’éventuelles modifications à la Loi ayant fait l’objet de recommandations dans des rapports précédents.
Ce dont nous avons besoin en ce moment, c’est d’un processus nous permettant d’examiner ce que
signifient la vision de la nation crie et la vision de la nation naskapie aujourd’hui et à l’avenir. Ce qu’elles
signifient en termes de structures et de processus de gouvernance, en termes de priorités linguistiques
et culturelles, de même qu’en termes de priorités économiques et sociales. Ce n’est pas aux gens de
l’extérieur de déterminer ce que sera cette vision ou même de décider si un processus de visualisation de
l’avenir est nécessaire. Cette décision appartient aux peuples Cri et Naskapis. Et il appartient aux autres
d’accepter et d’appuyer l’exercice de ces droits fondamentaux d’autodétermination.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               7
Partager les leçons apprises

Une bonne partie de ce qui s’est produit au cours des trente-cinq dernières années de l’histoire des Cris
et des Naskapis peut être d’une valeur inestimable pour des dizaines de Premières Nations à l’échelle du
Canada qui s’efforcent de conclure des ententes justes et équitables pour leurs revendications territoriales
et leurs efforts visant à restaurer les structures et les processus de gouvernance conformes à leurs propres
valeurs et besoins. Il faut trouver des moyens de partager l’expérience des Cris et des Naskapis là où et
lorsqu’elle peut être utile aux autres Premières nations. Bon nombre de leaders actuels et antérieurs ont
partagé leurs points de vue et seraient ravis de le faire à l’avenir. Le soutien à l’autonomie gouvernementale
et aux revendications territoriales qu’apporte le Ministère pourrait accroître son efficacité en donnant
aux Cris et aux Naskapis (de même qu’à plusieurs autres nations) l’occasion de partager leur expérience
dans le cadre d’ateliers, d’exposés et de services d’experts-conseils à court terme auprès des nations
actuellement engagées dans des négociations concernant le territoire ou la gouvernance.



8 Mot du président

La commission Crie-Naskapie existe depuis le 1er décembre 1984 lorsque la Partie XII (commission
crie-naskapie) de la Loi sur les cris et les naskapis du Québec est entrée en vigueur par proclamation du
gouvernement du Canada. Cependant, les premiers commissaires n’ont pas été nommés avant février
1986. Par conséquent, l’année 2006 représente le 20e anniversaire des activités de la Commission
Crie-Naskapie.

La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est la « législation spéciale » prévue aux termes de l’article 9 de
la Convention de la Baie-James et du Nord du Québec (CBJNQ) et de l’article 7 de la Convention du Nord-Est
québécois
(CNEQ). Cette législation spéciale a été promulguée par le Parlement et a obtenu la sanction
royale le 14 juin 1984.

L’article 9 (administration locale dans les terres de catégorie IA) de la Convention de la Baie-James et du
Nord québécois
prévoit qu’ « il est recommandé au Parlement d’adopter une législation spéciale concernant
une administration locale pour les Cris de la Baie James sur les terres de la catégorie IA qui leur sont
attribuées. » 1

L’article 7 (administration locale dans les terres de la catégorie IA-N) de la Convention du Nord-Est
québécois
prévoit des engagements semblables relativement à l’administration locale pour les Naskapis
du Québec sur les terres de la catégorie IA-N qui leur sont attribuées.

La commission Crie-Naskapie, créée en vertu de l’article 158 de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec a
le devoir de « préparer les rapports semestriels relatifs à la mise en oeuvre de cette loi » 2, rapports destinés
au ministre, lequel « en fait déposer un exemplaire devant chacune des chambres du Parlement. » 3

Le présent rapport constitue le dixième rapport semestriel au ministre, conformément au paragraphe
165 (1) et en vertu du paragraphe 171 (1) de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               9


La Commission mène des Audiences spéciales sur l’exécution de la loi dans le but de se préparer en vue
de son présent rapport. Ces audiences, tenues à Montréal du 13 au 16 février 2006, offrent l’occasion
aux représentants des nations crie et naskapie et au gouvernement du Canada d’exprimer leurs
préoccupations et de discuter des points sur lesquels ils s’interrogent. Les conclusions et le ton du
rapport reposent sur la façon dont la Commission comprend et analyse les questions et préoccupations
soulevées lors de ces audiences.

La Commission fait également état de la mise en application de la CBJNQ et de la CNEQ dans ce rapport
étant donné que certains articles de ces Conventions visent particulièrement les pouvoirs et les devoirs
des administrations locales des Premières nations crie et naskapie. La Commission fait était de la mise
en application de ces Conventions dans ce rapport en vertu du paragraphe 21(j) de la Loi qui stipule
qu’une bande a pour objet « d’exercer les pouvoirs et fonctions que les lois fédérales ou leurs règlements
ainsi que les Conventions lui confèrent ou conféraient à la bande antérieure en vertu de la Loi sur
les Indiens
. » 4

En ce qui a trait à son mandat, la Commission a fait d’autres commentaires présentés dans le chapitre II
du présent rapport.

Au cours des dernières années, la Commission a présenté des rapports touchant à des questions et
préoccupations particulières exprimées par les nations crie et naskapie. Des thèmes réguliers ont
évolué à partir de ces préoccupations et questions. Parmi ces thèmes, nous retrouvons des besoins
importants, comme :

a) les ressources adéquates en matière de logement;
b) un processus plus efficace en vue de l’ajustement du financement du fonctionnement et de l’entretien;
c) l’examen et les modifications à apporter à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec;



10
Introduction
d) des améliorations et des mécanismes efficaces quant à la mise en application indiquée de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, de ses ententes connexes et de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec;
e) les ressources en vue du développement communautaire et économique;
f) les améliorations à apporter aux services de police et à l’administration de la justice;
g) la résolution en vue de l’attribution du Bloc D à la nation crie de Chisasibi;
h) l’exercice responsable et efficace des obligations fiduciaires fédérales d’agir dans les meilleurs intérêts des
nations crie et naskapie;
i) l’élaboration et la mise en oeuvre d’un mécanisme efficace de résolution de différends;
j) la reconnaissance de l’existence, de l’importance et de la continuité de la loi et des coutumes
traditionnelles Eeyou.

La Commission répète certains de ces thèmes dans le chapitre IV (Questions et préoccupations de la
nation crie Eeyou d’Eeyou Istchee), le chapitre V (La nation naskapie Eeyouch de Kawawachikamach) et
le chapitre VII (Recommandations de la commission Crie-Naskapie) du présent rapport.

Depuis sa réponse au Rapport 2002 de la Commission, le ministère des Affaires indiennes et du Nord
canadien a présenté une réponse détaillée aux recommandations de la Commission. Les réponses du
Ministère représentent une approche entièrement différente dans sa façon de traiter avec la Commission
(avant qu’il ne présente sa réponse détaillée au Rapport 2002, le Ministère n’a pas traité les
recommandations de la Commission de façon formelle). Il semble que le Ministère veuille améliorer ses
relations avec la Commission, de même qu’avec les communautés cries et naskapies. Par conséquent, la
Commission fait état de ces réponses de la part du Ministère et les commente dans ses rapports semestriels.
Le chapitre VI du présent rapport trace les grandes lignes et commente la réponse du ministère des Affaires
indiennes et du Nord canadien au Rapport 2004 de la Commission. Ainsi, les nations crie et naskapie
prennent connaissance des réponses du Ministère à leurs questions et préoccupations particulières.
La Commission espère que les communautés concernées feront un suivi sur ces questions.

De plus, la Commission présente certains points de vue importants au sujet de la gouvernance crie et
naskapie dans ses rapports semestriels.

Le chapitre III (Loi Eeyou et gouvernance Eeyou) du présent rapport élabore sur l’existence et la continuité
de la loi, des coutumes et des traditions Eeyou et sur le besoin de la reconnaissance formelle de ces lois
traditionnelles par le gouvernement du Canada.

La Commission déclare en conclusion (le chapitre VIII du présent rapport) que le gouvernement du
Canada a une obligation morale et politique d’agir dans les meilleurs intérêts des peuples autochtones.

Notes en fin de chapitre

1 Convention de la Baie-James et du Nord québécois – édition 1991, les Publications du Québec, article 9 (Administration locale des terres de la catégorie IA), paragraphe 9.0.1, page 172.
2 Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, SC 1984, ch. 46, article 165 (1) (a).
3 Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, SC 1984, ch. 46, article 171 (1).
4 Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, SC 1984, ch. 46, article 21 (j).

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               11

La mission de la Commission est décrite dans l’article 165 de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec
comme suit :

« 165. (1) La Commission a pour mission :
(a) d’établir les rapports prévus au paragraphe 171 (1);
(b) sous réserve des paragraphes (2) et (3), d’enquêter sur les réclamations qui lui sont
présentées concernant l’application de la présente loi, notamment l’exercice ou le
défaut d’exercice de pouvoirs ou fonctions conférés sous le régime de cette loi. 1

Depuis la nomination des premiers commissaires en 1986, les communautés cries et naskapies ont
soulevé des questions à presque toutes les audiences, concernant la mise en application soit de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ) ou de la Convention du Nord-Est québécois
(CNEQ). Ces questions s’ajoutent évidemment aux autres questions découlant des dispositions de la Loi
sur les Cris et les Naskapis du Québec
. Ce n’est pas tellement surprenant que ces conventions et cette Loi
puissent faire l’objet (souvent conjointement) de questions portées à l’attention de la Commission, étant
donné que les conventions ont engagé le Canada à adopter la Loi au Parlement et que l’on retrouve
explicitement dans la Loi elle-même l’énoncé suivant :

« 21. La bande a pour mission…
(j) d’exercer les pouvoirs et fonctions que les lois fédérales ou leurs règlements lui
confèrent ou conféraient à la bande antérieure. »
2



12
Le mandat de la commission Crie-Naskapie

Malgré les responsabilités de la Commission en ce qui a trait à « l’exercice ou le défaut d’exercice de
pouvoirs » et à « l’acquittement ou le défaut d’acquittement d’une obligation » en vertu de la Loi, de
même qu’aux pouvoirs et des obligations des bandes, comme le décrit l’article 21. (j) ci-dessus, la position
du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est, depuis 1986, qu’il n’appartient pas à la
Commission, conformément à son mandat, de prendre en considération les questions qui se présentent
en vertu des conventions. Le Ministère a mis ce point de vue en pratique à plusieurs reprises,
particulièrement lorsqu’il a refusé de donner suite aux recommandations de la Commission qui avaient
un lien avec les conventions en s’appuyant sur le fait qu’elles « dépassaient le mandat explicite de la
Commission défini par la loi ».

Tout récemment, cependant, le Ministère a commencé à donner suite à de telles recommandations tout
en refusant toujours d’admettre que la Commission a compétence. La plus récente déclaration du point
de vue du Ministère a été entendue pendant les Audiences spéciales sur l’exécution de la loi de 2006 à
Montréal. Le 13 février 2006, Michel Blondin, directeur du Bureau de la mise en oeuvre de la Baie-James,
a dit :

« …comme vous le savez, le point de vue du MAINC est depuis longtemps que la
Commission n’a pas la compétence pour enquêter et faire des recommandations au
sujet de la mise en application de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois
et de la Convention du Nord-Est Québécois, et la position du gouvernement fédéral n’a
pas changé. »
3

Il s’agit peut-être effectivement de la position du gouvernement fédéral lorsque l’on parle du Canada,
mais il prend cependant la position contraire lorsqu’il fait l’éloge de ses accomplissements aux Nations
Unies. Par exemple, lorsqu’il explique de quelle façon le Canada met ses conventions en application avec
les peuples autochtones et de quelle façon il résoud les différends découlant de ces conventions, le
gouvernement fédéral cite souvent le rôle de la commission Crie-Naskapie. Au cours d’un exposé dans le
cadre du Séminaire des Nations Unies sur les traités, accords et autres arrangements constructifs conclus
entre États et peuples autochtones, qui a eu lieu du 15 au 17 décembre 2003, le représentant du Canada
a déclaré :

« Le premier des traités modernes, la Convention de la Baie-James et du Nord québécois
(CBJNQ), prévoit un mécanisme de surveillance, à savoir la commission
Crie-Naskapie. »
4

Lorsqu’il a été mis au courant de cette contradiction évidente lors de l’audition du 13 février 2006,
M. Blondin a répondu :

« J’ai quelqu’un à assassiner, c’est tout. C’était juste une blague – c’est une blague. » 5

Chose intéressante, le compte-rendu de l’exposé devant les Nations Unies est disparu rapidement du site
Web du Ministère alors qu’il avait été mis à la disposition du public au cours des deux années précédentes.
Les commissaires n’avaient pas indiqué à M. Blondin qu’un énoncé beaucoup plus explicite de la position
du gouvernement se trouvait également sur le site Web officiel du Ministère et qu’il s’y trouve encore au
moment où l’on procède à la rédaction du présent rapport. Cet énoncé se lit comme suit :

« La partîe XII de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec prévoit la création de la
commission Crie-Naskapie qui a pour mandat de mener des enquêtes privées sur les
2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               13
plaintes portant sur l’application ou la non application de la Convention de la Baie-
James et du Nord québécois
, de la Convention du Nord-Est québécois ou de la Loi sur les
Cris et les Naskapis du Québec
. »
6

On ne peut prendre les allégations du Ministère à l’effet que la Commission n’a aucune compétence
relativement aux conventions au sérieux lorsqu’il affirme en même temps aux Nations Unies, de même
qu’au grand public canadien, que la Commission a effectivement une telle compétence. Lorsque le
gouvernement la cite comme un exemple de la façon remarquable dont le Canada met les conventions
en application et résoud les différends découlant de leurs dispositions, sa position devient tout
simplement ridicule.

Quoi qu’il en soit, la Commission continuera d’aborder les questions soulevées par les gens, les
communautés et les gouvernements dès qu’elles auront un lien avec la Loi ou avec les dispositions
applicables des conventions.

Notes en fin de chapitre

1 Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, article 165. (1).
2 Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, article 21. (j).
3 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, 13 février 2006.
(transcription officielle, page 1, lignes 34 à 39).
4 Canada, « Point de vue du gouvernement du Canada sur les traités, accords et autres arrangements constructifs entre États et peubles autochtones », Séminaire des Nations Unies, du 15 au 17 décembre 2003.
5 CommissionCrie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, 13 février 2006 (transcriptions officielles, page 15, lignes 17 et 18).
6 Site Web d’Affaires indiennes et du Nord du Canada, page « Les formules mixtes », 4e paragraphe.



14 Le mandat de la commission Crie-Naskapie

Introduction

Les Eeyouch (Cris) existent en tant que peuple et en tant que nation possédant leur droits ancestraux et
issus de traités, les droits de l’homme fondamentaux et leurs libertés fondamentales.

Les Eeyouch d’Eeyou Istchee (nation crie du territoire cri) se considèrent comme un peuple doté d’un
gouvernement autonome qui était, avant d’être en contact avec des peuples européens, une société
complètement indépendante et organisée occupant et gérant leurs terres comme leurs ancêtres l’ont fait
pendant des siècles. Même si cette autonomie gouvernementale a été grandement réduite par les empiètements
de régimes gouvernementaux extérieurs, elle est parvenue à survivre sous une forme atténuée.

Les prétentions de souveraineté et les régimes coloniaux de puissances européennes ont été établis en ne
tenant virtuellement pas compte du fait qu’Eeyou Istchee (le territoire cri traditionnel et historique) était
déjà occupé et utilisé par un peuple Eeyou autogéré.

Pour les Eeyouch, il n’y a aucun principe qui soit plus de base dans l’histoire et les relations des Eeyous
que le droit d’un peuple de se gouverner lui-même et ses territoires conformément à ses lois, coutumes,
valeurs et aspirations traditionnelles. Par conséquent, en ce qui concerne les Eeyouch, les Eeyouch
d’Eeyou Istchee ont un droit inhérent à la gouvernance Eeyou.

Ce droit est inhérent dans le sens où il puise ses origines ultimes dans les vies collectives des Eeyous, de
même que dans leurs traditions et leur loi et histoire plutôt que dans la Couronne ou le Parlement. Le

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE              15

droit inhérent à l’autonomie gouvernementale Eeyou découle particulièrement de l’occupation originale
et actuelle d’Eeyou Istchee par les Eeyouch. À cet égard, Eeyou Tapay-tah-jeh-souwin (la gouvernance
Eeyou) n’est pas quelque chose qui va se produire à l’avenir. C’est quelque chose qui s’est déjà produit,
qui se produit et qui continuera de se produire conformément à la loi, aux droits et aux aspirations
Eeyou. Après tout, les Eeyouch d’Eeyou Istchee ont toujours formé un peuple qui se gouverne lui-même.

Le droit à la gouvernance Eeyou est inhérent au sein de la nation Eeyou. Par conséquent, c’est par
l’entremise de la nation que les Eeyouch expriment leur autonomie personnelle et collective.

En 1982, les droits ancestraux et issus de traités ont été concrétisés dans la constitution écrite du
Canada pour la première fois de son histoire. Il est particulièrement énoncé dans l’article 35 de la Loi
constitutionnelle de 1982
que « les droits existants – ancestraux ou issus de traités – des peuples
autochtones du Canada sont reconnus et confirmés. »

Dans son Rapport de 1996, la Commission royale sur les peuples autochtones a conclu « que le droit
inhérent à l’autonomie gouvernementale compte parmi les droits existants – ancestraux ou issus de
traités – » que reconnaît et confirme l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Les droits ancestraux évoluent à partir de l’époque avant l’occupation des terres par des peuples
autochtones et avant l’organisation sociale et les cultures distinctes des peuples autochtones. Dans
l’arrêt Van der Peet 1, le juge en chef de la Cour suprême du Canada a déclaré :

À mon avis, la doctrine des droits ancestraux existe et elle est reconnue et confirmée par le
paragraphe 35(1), et ce pour un fait bien simple : quand les européens sont arrivés en Amérique du
Nord, les peuples autochtones s’y trouvaient déjà, ils vivaient en collectivités sur ce territoire et
participaient à des cultures distinctives, comme ils l’avaient fait pendant des siècles. C’est ce fait,
par-dessus tout, qui distingue les peuples autochtones de tous les autres groupes minoritaires du
pays et qui commande leur statut juridique – et maintenant constitutionnel – particulier.
2


16
Loi Eeyou et gouvernance Eeyou
Les droits ancestraux découlent non seulement de l’occupation antérieure du territoire, mais aussi
de l’organisation sociale antérieure et des cultures distinctives des peuples autochtones habitant ce
territoire. Pour déterminer si le bien-fondé d’une revendication à un droit ancestral a été établi, les
tribunaux doivent examiner la relation qu’entretient un demandeur autochtone avec le territoire et
les pratiques, coutumes et traditions de la société et de sa culture distinctive à laquelle il appartient.
Les tribunaux ne doivent pas se concentrer si strictement sur les rapports qu’entretiennent les
peuples autochtones avec le territoire au point de négliger les autres facteurs pertinents à la
détermination et à la définition des droits ancestraux.
3

La Cour suprême a confirmé dans l’arrêt Adams 4 que ces pratiques, coutumes et traditions ne
nécessitaient pas la reconnaissance formelle des européens pour qu’elles soient protégées :

Le fait qu’une pratique, coutume ou tradition particulière se soit poursuivie après l’arrivée des
Européens, quoique en l’absence du lustre formel que lui aurait donné sa reconnaissance juridique
par les colonisateurs européens, ne doit pas saper la protection accordée aux peuples autochtones. Le
noble visé par le paragraphe 35 (1), à savoir la préservation des caractéristiques déterminantes qui
font partie intégrante des sociétés autochtones distinctives, ne saurait être réalisé si cette
disposition ne protégeait que les caractéristiques déterminantes qui ont été reconnues légalement
par les colonisateurs français et britanniques.
5

Lorsque Madame la juge McLachlin a expliqué, par écrit, les motifs de son jugement concernant l’affaire
Van der Peet 6, elle a mentionné la reconnaissance des lois et coutumes ancestrales des peuples
autochtones par la common law.

L’histoire de ces rapports entre les Européens et la common law, d’une part, et les peuples
autochtones, d’autre part, s’étale sur une longue période. Comme on peut s’y attendre, les principes
régissant ces rapports n’ont pas toujours été appliqués uniformément durant cette longue histoire.
Et pourtant, cette histoire, depuis les tout débuts jusqu’à nos jours, est illuminée par un fil d’or : la
reconnaissance par la common law des lois et coutumes ancestrales des peuples autochtones qui
occupaient le territoire avant la colonisation européenne.
7

De plus, Madame la juge L’Heureux-Dubé a parlé de la doctrine de la continuité dans le contexte d’une
approche visant à interpréter la nature et l’étendue des droits ancestraux. Mme la juge L’Heureux-Dubé a
écrit le passage suivant : 8

... Au lieu d’être perçue comme le point tournant pour la culture autochtone, la souveraineté
britannique serait plutôt considérée comme ayant reconnu et confirmé les pratiques, traditions et
coutumes qui sont suffisamment importantes et fondamentales pour l’organisation sociale et la
culture des Autochtones. Cette idée se rattache à la « doctrine de la continuité », fondée sur le droit
constitutionnel impérial britannique et selon laquelle, en cas d’acquisition de nouveaux territoires,
la lex loci des sociétés organisées, en l’occurrence les sociétés autochtones, continue de s’appliquer en
vertu de la common law.
9

Il ne pouvait s’agir uniquement du maintien des lois traditionnelles particulières, mais plutôt de la
compétence des gouvernements autochtones d’établir, de promulguer et d’appliquer les lois. 10

Il est clair que la Cour suprême du Canada confirme et reconnaît l’existence et la continuité de la loi et
des coutumes traditionnelles ancestrales.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               17

La gouvernance Eeyou a évolué à partir des pratiques de longue date fondées sur les lois, traditions et
coutumes Eeyou. Cependant, la gouvernance Eeyou a aussi évolué à partir de la mise en application de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois et de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

En vertu des modalités de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ), les terres d’Eeyou
Istchee ont été divisées en trois (3) catégories. Les terres qualifiées de catégorie IA, relevant de la
compétence fédérale, et de catégorie IB, relevant de la compétence provinciale, ont été gardées en
réserve et attribuées aux Cris à leur seul usage et à leur seul profit et sont administrées et contrôlées
par les gouvernement locaux cris.

Conformément aux obligations fédérales à l’endroit des Eeyouch (nations crie et naskapie) en vertu de la
CBJNQ et de la CNEQ, une loi spéciale fédérale – la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, promulguée
par le Parlement et sanctionnée le 14 juin 1984 – prévoit, pour les Cris et les Naskapis, un régime
d’administration locale organisé et efficace, ainsi que l’administration, la régie et le contrôle des terres
communautaires locales par les Premières nations crie et naskapie. La Loi sur les Cris et les Naskapis du
Québec
remplace la Loi sur les Indiens pour ce qui est de la nation crie d’Eeyou Istchee et la nation
naskapie de Kawawachikamach. Au cours des négociations qui ont mené à la signature de la CBJNQ, les
Eeyouch d’Eeyou Istchee ont rejeté le régime d’administration locale restreint, supervisé et imposé en
vertu de la Loi sur les Indiens. Par conséquent, la Loi sur les Indiens ne s’applique aux Premières nations
crie et naskapie ou aux termes de leurs terres communautaires que pour déterminer lesquels des
bénéficiaires cris et naskapis sont des « Indiens » au sens de cette loi.

De plus, la Loi sur les Indiens ne tient pas compte des lois, des coutumes et des pratiques traditionnelles
en matière de gouvernance.

Nonobstant le régime légal de l’administration locale en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du
Québec
et des autres pouvoirs et responsabilités des Eeyous en ce qui concerne leur gouvernance en
vertu de la CBJNQ, de ses Conventions connexes et de ses mesures législatives subséquentes, les
Eeyouch continuent d’incorporer leur loi, leurs traditions et leurs coutumes dans l’exercice et la pratique
de l’autonomie gouvernementale et de la gouvernance de la nation Eeyou (en dehors des dispositions
relativement à la Partie XIII : Successions, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec ne mentionne pas
l’existence et la continuité de la loi, des coutumes et des traditions Eeyou).

Ce chapitre examine l’origine et la nature de la loi, des traditions et des coutumes Eeyou.

Eeyou Weesou-wehwun, Eeyou Eedou-wun et Eeyou Kas-jeh-hou-wun
(Loi Eeyou, coutumes et traditions Eeyou et droits Eeyou)

Les Eeyouch ont exercé et continueront d’exercer leur droit d’autodétermination que l’on appelle
« Weesou-way-tah-moo-wun » dans la langue des Eeyouch d’Eeyou Istchee. La meilleure façon de
décrire les mots « Eeyou weesou-way-tah-moo-wun » est la suivante : « détermination par les Eenous »
ou autodétermination des Eeyous, ce qui représente le pouvoir du choix en action.

L’exercice et la pratique de l’Eeyou Tapay-tah-jeh-souwin (la gouvernance Eeyou) a évolué à partir du
pouvoir d’exercer l’Eeyou weesou-way-tah-moo-wun (l’autodétermination Eeyou).



18
Loi Eeyou et gouvernance Eeyou

Le peuple cri, comme l’appelle la société contemporaine, a le droit individuel et collectif de maintenir et
de développer son identité et ses caractéristiques distinctes. Le peuple cri a particulièrement le droit de
se déclarer volontairement et ses membres se déclarent eux-mêmes, comme ils le font depuis des
millénaires, Eeyou/Eeyouch et Eenouch/Eenou. De plus, les Eeyouch ont le droit individuel et collectif à
une nationalité et d’être reconnus en tant que nation distincte. Les Eeyouch ont le droit d’appartenir à
une communauté Eeyou et à une nation Eeyou au sein de leur patrie traditionnelle et historique, que les
Eeyouch appellent Eeyou Istchee. Par conséquent, les soi-disant Cris de la Baie-James sont des Eeyouch
d’Eeyou Istchee (le mot « Cri » prend ses origines à partir des peuples français et anglais).

Eeyou Istchee, c’est l’ensemble de la communauté et des territoires de chasse traditionnels et historiques
des Eeyouch. Eeyou Istchee, c’est le territoire que les Eeyouch ont utilisé et occupé pendant des millénaires.
Par conséquent, Eeyou Istchee est essentiel et au centre du « meeyou pimaat-tahseewin » ou le bien-être
holistique des Eeyouch. Le rôle central d’Eeyou Istchee constitue la fondation de la gouvernance Eeyou,
de la culture, de l’identité, de l’histoire, de la spiritualité et du mode de vie traditionnel Eeyou. Cette
relation unique et spéciale entre les Eeyouch et Eeyou Istchee fait partie de la nature de ce qu’est « être
Eeyou/Eenou ».

Les Eeyouch d’Eeyou Istchee appellent le droit des Eeyous à l’autonomie gouvernementale, ou tout autre
droit, « Eeyou Kas-jeh-hou-wun », ce qui veut dire pouvoir ou capacité des Eeyous donné par une
autorité humaine ou par une source divine. Ce droit inhérent (à l’autonomie gouvernementale) est exercé
par et grâce aux Eeyouch qui représentent l’autorité historique et traditionnelle en matière de gouvernance.
C’est par l’entremise de la nation ou du peuple que les Eeyouch expriment leur autonomie personnelle et
collective. Les Eeyouch d’Eeyou Istchee décrivent cet exercice ou pratique de la gouvernance par l’entremise
de la nation ou du peuple Eeyou dans leur langue de la façon suivante : « Eeyou Tapay-tah-jeh-souwin ».
De plus, les Eeyouch ont établi, conformément à la loi Eeyou, leur système Eeyou de tenure des Eeyou
Indoh-hoh Istchee (territoires de chasse Eeyou) et de l’autorité compétente du Indoh-hoh Ouje-Maaoo

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               19

(gouverneur de chasse ou pointeur). Ce système de tenure Eeyou a été déterminé et établi selon la
« Eeyou Weesou-wehwun » (la confection des lois Eeyou).

Dans la langue des Eeyous, « Eeyou Kas-jeh-hou-wun » signifie « capacité ou pouvoir Eeyou ». Les
dirigeants Eeyou/Eenou emploient les mots « Eeyou Kas-jeh-hou-wun » pour exprimer le principe
fondamental des droits des Eenous/Eeyous.

« Eeyou Eedou-wun », dans la langue des Eeyous, signifie « la manière (de faire les choses) des
Eeyous/Eenous ». Les Eeyouch emploient les mots « Eeyou Eedou-wun » pour exprimer le concept des
coutumes et des pratiques traditionnelles.

« Eeyou Weesou-wehwun » veut dire « la loi Eeyou » dans la langue des Eeyous (à la suite du résultat
direct de la prise de décision des Eeyous). Les dirigeants Eeyou/Eenou emploient les mots « Eeyou
Weesou-wehwun »
pour exprimer le concept de la loi Eeyou inhérente à la société Eenou/Eeyou.
Par conséquent, la Eeyou Weesou-wehwun, assujettie à la loi et à la philosophie du droit canadiennes
influençant la loi ancestrale « coutumière/traditionnelle », se distingue de la loi ancestrale (la loi
contemporaine qui touche les peuples autochtones). Il faut remarquer la similarité des mots
Eeyou « Eeyou Weesou-wehwun » (loi Eeyou) et « Eeyou Weesou-way-tah-moo-wun »
(autodétermination Eeyou).

Dans l’exercice du Eeyou Tapay-tah-jeh-sou (gouvernement Eeyou) Kas-jeh-hou-wun (juste) ou
du droit inhérent à l’autonomie gouvernementale, les Eeyouch d’Eeyou Istchee ont déterminé et
continueront de déterminer la Eeyou Weesou-wehwun ou loi Eenou. Les Eeyouch ont également
déterminé et continueront de déterminer les Eeyou Eedou-wun ou coutumes et traditions. De cette
manière, les Eeyouch continueront de modeler la culture Eeyou.

La loi Eeyou est la primauté du droit inhérent chez les Eeyous. Il s’agit d’une primauté du droit transmise
de génération en génération. La loi Eeyou manifeste la valeur commune de la société Eeyou. Pour les
Eeyouch, la loi, la coutume et la tradition Eeyou ne consistent pas en des principes, des pratiques et des
institutions statiques provenant d’un passé lointain. Elles constituent un ensemble de modes de vie
s’adaptant à plusieurs situations en évolution en intégrant aisément des attitudes et pratiques nouvelles.
Par conséquent, la loi Eeyou n’est pas une primauté du droit, mais plutôt un ensemble de principes et de
normes qui évoluent dans la vie de la société Eeyou.

Les Eeyouch, à l’instar d’autres peuples contemporains, remodèlent continuellement leurs institutions
afin de s’adapter à des circonstances et à des exigences nouvelles. Ce faisant, ils empruntent librement et
adaptent des traits culturels qu’ils trouvent utiles et attrayants. À cet égard, la loi Eeyou peut être perçue
comme un processus continu visant à tenter de résoudre les problèmes d’une société changeante, plutôt
qu’un ensemble de règles. Ce n’est pas l’imitation servile de pratiques démodées qui rend une loi Eeyou
efficace et une tradition vigoureuse, mais le vif sentiment d’être lié à un passé vivant, particulièrement
le vif sentiment d’avoir un lien étroit et vivant avec les terres, c.-à-d. Eeyou Istchee.

On répète souvent « la coutume crée la loi ». Aux yeux des Eeyouch, la loi Eeyou peut découler des
coutumes et des pratiques traditionnelles des Eeyous. Cependant, les traditions font appel aux valeurs
et aux actes qui maintiennent les coutumes. En fait, les valeurs Eeyou sont ce sur quoi s’appuient les
principes d’éthique qui forment le fondement de la loi et de la tradition Eeyou. Par conséquent, la loi
et la tradition Eeyou découlent des valeurs et des principes Eeyou.



20
Loi Eeyou et gouvernance Eeyou

De plus, la culture Eeyou peut être définie simplement comme étant le mode de vie adopté par les
Eeyouch. En fait, les Eeyouch décrivent la culture Eeyou comme étant le « Eeyou pimaat-seewun »
(le mode de vie Eenou). Pour ce qui est des Eeyouch, la culture est déterminée par l’Eeyou Eedou-wun –
la façon Eeyou de faire les choses – et englobe l’ensemble complexe des croyances, des valeurs, des
principes, des pratiques, des institutions, des attitudes, des moeurs, des coutumes, des traditions et de la
connaissance. Ces éléments influencent la détermination de la loi Eeyou étant donné que les Eeyouch
connaissent les valeurs et les principes de la loi Eeyou.

En résumé et en considération du système juridique Eeyou, il faut s’attarder sur les aspects importants
suivants de la société et de la loi contemporaine Eeyou :

a) Le droit Eeyou à l’autodétermination, ou Eeyou weesou-way-tah-moo-wun;
b) Le Eeyou Tapay-tah-jeh-sou (gouvernement Eeyou) Kas-jeh-hou-wun, ou le droit inhérent à
l’autonomie gouvernementale;
c) La souveraineté des Eeyous;
d) L’Eeyou Weesou-wehwun, ou loi Eeyou, telle que déterminée et établie au moyen du processus de prise
de décision Eeyou;
e) La primauté du droit Eeyou;
f) L’Eeyou Eedou-wun, ou la façon Eeyou de faire les choses (c.-à-d. les pratiques et coutumes);
g) L’Eeyou Pimaat-seewun (le mode de vie ou culture Eeyou);
h) Le rôle central et fondamental d’Eeyou Istchee;
i) La spiritualité Eeyou;
j) Le système de tenure Eeyou, ou le système d’Indoh-hoh Istchee;
k) L’application des institutions traditionnelles;
l) L’autonomie, les responsabilités et les pouvoirs de l’Indoh-hoh Ouje-Maaoo (gouverneurs de chasse ou
pointeurs eeyous);
m) Les pouvoirs, obligations et responsabilités des Eeyou Ouje-Maaooch (dirigeants et autorités Eenou/Eeyou);
n) Les pouvoirs, obligations et responsabilités des Eeyouch Tapaytahchehsouch (les administrations locale et
de la nation Eeyou (régionale));
o) L’autonomie et la responsabilité individuelle;
p) Le respect de l’autorité;
q) Les rôles des femmes et des aînés;
r) Les rôles et responsabilités de la famille et du clan;
s) Les dirigeants et le processus de leadership;
t) La Convention de la Baie-James et du Nord québécois et d’autres conventions et traités connexes, y compris
les lois fédérales et provinciales;
u) La loi ancestrale;

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               21
v) Le processus et consensus Eeyou dans la prise de décision;
w) L’application d’autres valeurs, droits et principes Eeyou.

En résumé, la loi Eeyou est :

a) conventionnelle, coutumière et non écrite;
b) incorporée dans les traditions orales et les observances communautaires;
c) transmise d’une génération à l’autre;
d) un ensemble de principes et de normes malléables sur la vie Eeyou;
e) axée sur les valeurs et principes de base Eeyou et manifeste ensuite la valeur commune de la
société Eeyou.

Conclusion

La gouvernance Eeyou a évolué de façon spectaculaire au cours des trente dernières années, principalement
en fonction des changements fondamentaux dans l’environnement politique, social et économique
d’Eeyou Istchee. Cette évolution de la gouvernance Eeyou est coutumière et naturelle puisque la puissance
politique est universelle et inhérente à la nature humaine. Après tout, l’autodétermination Eeyou est le
pouvoir des choix en action. Dans plusieurs cas, les Eeyouch d’Eeyou Istchee ont adopté une approche
« faisons-le, tout simplement ».

Par conséquent, la signification et la pratique de la gouvernance Eeyou ont évolué et ont été redéfinies
par les Eeyouch en se fondant sur la loi, les droits, les libertés, les valeurs, la culture, les coutumes et les
traditions Eeyou, la loi ancestrale et l’intention et l’esprit de la Convention de la Baie-James et du Nord
québécois
et de ses accords connexes, comme l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement
du Québec et les Cris du Québec
et la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

La gouvernance Eeyou a manifestement évolué de façon spectaculaire au cours du dernier quart du
siècle dernier de façon à aller plus loin que la Loi sur les Indiens, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec
et la Convention de la Baie-James et du Nord québécois.

La réconciliation entre les droits Eeyou existants et inhérents à la suite de la souveraineté de la Couronne et la loi Eeyou a été et continue d’être un défi politique, juridique/constitutionnel et socioéconomique important.

Pour que les Eeyous et le Canada collaborent, le Canada doit reconnaître formellement le droit inhérent
de la gouvernance Eeyou, de même que l’existence et la continuité des lois et traditions Eeyou dans ses
lois constitutionnelles et fondamentales. Les tribunaux ont déjà reconnu l’existence et la continuité des
lois, traditions et coutumes des peuples autochtones, y compris leur prise de décision, leurs règlements
et, effectivement, la gouvernance autochtone.

En ce qui concerne les Eeyouch d’Eeyou Istchee, la reconnaissance mutuelle de peuples et de nations
coexistants et dotés d’un gouvernement autonome est essentielle et fondamentale au maintien des
relations et des partenariats des Eeyous avec le Canada et le Québec.



22
Loi et gouvernance Eeyou
Notes en fin de chapitre

1 R. c. Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507.
2 R. c. Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507.
3 R. c. Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507, paragraphe 74; R. c. Adams, [1996] 3 R.C.S. 101, paragraphe 29.
4 R. c. Adams, [1996] 3 R.C.S. 101.
5 R. c. Adams, [1996] 3 R.C.S. 101, paragraphe 33.
6 R. c. Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507.
7 R. c. Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507, paragraphe 263. [Soulignement ajouté]
8 Peter W. Hutchins et Kalmakoff. « The Golden Thread of Continuity, the Federalism Principle and Treaty Federalism – Where’s the Gap? ». Document présenté à la Canadian Aboriginal Law 2005: The Shifting Paradigm, pages 13 et 14.
9 R. c. Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507, paragraphe 173. [Souligné dans l’original]
10 Peter W. Hutchins et Kalmakoff. « The Golden Thread of Continuity, the Federalism Principle and Treaty Federalism – Where’s the Gap? ». Document présenté à la Canadian Aboriginal Law 2005: The Shifting Paradigm, page 14.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               23

En prévision de son rapport 2006, la commission Crie-Naskapie a mené ses Audiences spéciales sur
l’exécution de la loi du 13 au 16 février 2006 à Montréal, Québec. Les représentants des nations Eeyou
(cries et naskapies) et du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ont présenté leurs
observations par écrit et verbalement devant la Commission lors de ces audiences spéciales.

Le Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee)

Le 16 février 2006, M. Bill Namagoose et le chef Billy Diamond, représentants du Grand conseil des
Cris (d’Eeyou Istchee) ont déposé une présentation auprès de la Commission sur les questions et
préoccupations suivantes :

1. Mise en application de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ)

Selon les représentants du Grand conseil des Cris, l’application de la CBJNQ (un traité des temps
modernes) a été, jusqu’ici, un processus long, difficile et acrimonieux, occasionnant des examens, des
négociations, des litiges et de la médiation en ce qui concerne certaines dispositions de la Convention.
Certains articles de la CBJNQ n’ont toujours pas été dûment appliqués. Par exemple, l’article 22
(Protection environnementale et sociale) n’a toujours pas été dûment appliqué par le gouvernement du
Canada qui a décidé d’appliquer unilatéralement le régime fédéral de la Loi canadienne sur l’évaluation
environnementale. Le régime établi par et conformément à l’article 22 de la CBJNQ est le régime



24
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee
applicable au territoire de la CBJNQ. Cependant, le gouvernement du Canada a appliqué unilatéralement
son régime d’examen et d’évaluation environnementaux et sociaux. 1

En 2002, la nation Eeyou d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec ont négocié et accepté l’Entente
concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec
, également appelée la
Paix des Braves. Selon cette Entente, la nation Eeyou d’Eeyou Istchee assumera certaines obligations
du Québec en vertu de la CBJNQ pendant une période de cinquante (50) ans avec financement annuel
indexé. Cet arrangement particulier, représentant une façon novatrice d’appliquer certains articles de
la CBJNQ, a permis aux gouvernements et aux leaders de la nation Eeyou de prendre des décisions
relativement aux programmes et services qui répondent à leurs besoins et priorités tels que déterminés
par les autorités Eeyou. Dans le passé, les programmes et priorités ont souvent été débattus par des
autorités autres qu’Eeyou. 2

Depuis l’exécution de la CBJNQ, signée par les gouvernements Eeyou, canadien et québécois en 1975,
la nation Eeyou d’Eeyou Istchee tente d’obtenir de la part du gouvernement du Canada l’application
indiquée de la CBJNQ. Certaines ententes comme l’Accord d’exploitation et de maintenance et la Convention
relativement au perfectionnement des ressources humaines cries
ont été conclues entre la nation Eeyou et le
Canada. Cependant, la nation Eeyou d’Eeyou Istchee recherchait une nouvelle relation avec le Canada –
une nouvelle relation qui aurait dû évoluer si le gouvernement du Canada avait dûment respecté et
honoré l’esprit, l’intention et la lettre de la CBJNQ.

2. Nouvelle relation entre la nation Eeyou (crie) et le Canada

Dans le cadre des pourparlers entre MM. Chrétien et Namagoose, les négociateurs eeyous et fédéraux
ont récemment réalisé certains progrès dans la négociation d’une convention en vue d’une nouvelle
relation entre la nation Eeyou d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Canada, d’une manière qui présente
une façon acceptable d’appliquer les obligations du Canada à l’endroit des Cris en vertu de la CBJNQ.

En août 2004, les négociateurs eeyous et fédéraux ont signé une déclaration d’intention commune
présentant les intentions des parties de négocier une convention dans laquelle il était question des
éléments suivants :

a) la mise sur pied d’un gouvernement régional cri;
b) la résolution des questions en suspens et des instances judiciaires dans la mesure du possible;
c) l’établissement d’un processus de résolution. 3

En juin 2005, les négociateurs eeyous et fédéraux ont signé un document intitulé : Ébauche de convention
entre le gouvernement du Canada et la nation crie du Québec. Ce document brosse un tableau des progrès
réalisés sur les questions suivantes :

a) l’établissement d’une nouvelle relation entre le Canada et la nation crie;
b) l’amélioration de la mise en application de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois;
c) l’engagement d’aller de l’avant vers un gouvernement de la nation crie ayant les moyens de fonctionner et
une constitution crie, reconnue par le Canada, servant à orienter ses activités;
d) la prise en charge du gouvernement cri de certaines obligations du Canada en vertu de la CBJNQ et de
certains programmes du gouvernement du Canada, pendant la durée de la convention;

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               25
e) l’accroissement des responsabilités de la nation crie visant à favoriser son propre développement
économique et de la capacité à maintenir ses rapports avec les autres gouvernements;
f) la résolution des litiges et des différends devant les tribunaux et l’établissement d’un processus de
résolution de différend. 4

En décembre 2005, les négociateurs de la nation Eeyou et du gouvernement fédéral étaient parvenu à
conclure une entente définitive. Cette Convention a été approuvée par le Comité directeur fédéral qui
supervisait les négociations du côté du gouvernement du Canada et par le Conseil d’administration du
Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee).

Cependant, il y eu la chute du gouvernement de Paul Martin au Canada et une élection fédérale a été
déclenchée. C’est pourquoi les parties ont décidé de remettre la signature de cette Convention jusqu’à ce
que les élections fédérales aient eu lieu (les élections fédérales ont eu lieu en janvier 2006 et se sont
soldées par l’élection d’un nouveau gouvernement dirigé par le premier ministre Stephen Harper).

Selon M. Bill Namagoose, le négociateur représentant la nation Eeyou, « la convention proposée
est l’aboutissement de plusieurs années d’efforts de la part des trois grands chefs précédents et de
l’administration actuelle. J’appuie fermement cette convention et j’espère que le nouveau gouvernement
du premier ministre Harper s’engagera dans cette nouvelle relation Canada-Cris avec nous. » 5

Le Grand conseil des Cris demande à la commission Crie-Naskapie de « surveiller les pourparlers
relativement au traitement de cette question au cours des prochains mois jusqu’à ce que les conventions
connexes soient signées. » 6



26
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee

3. Logement cri

La création de logement a toujours été une priorité pour les nations cries et naskapies. La commission
Crie-Naskapie a fait état de la situation des communautés cries et naskapies dans ses rapports
antérieurs.

Le Chef Billy Diamond, représentant du Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee) a présenté un exposé
les faits énoncés ci-dessous concernant la situation du logement devant les communautés Eeyou :

La situation du logement cri est la plus difficile à résoudre et elle se trouve actuellement en état de crise.

Dans une enquête réalisée en 1999 sur la situation du logement cri, voici les constatations qui avaient
été faites :

a) 2 423 unités de logement existaient, mais 1 403 unités de plus, soit 58 p. 100, étaient nécessaires;
b) 60 p. 100 des unités étaient surpeuplées selon les normes canadiennes;
c) 1 297 unités avaient un taux d’occupation supérieur à une personne par pièce;
d) Les Cris avaient le pire rapport de personnes par foyer (5,2) parmi les nations autochtones au Québec,
comparativement à 4,0 dans les autres communautés des Premières nations et 4,1 au Nunavik. 7

Le ministères des Affaires indiennes a toujours utilisé une moyenne de 4,0 personnes comme mesure
de planification idéale. L’étude crie indique que le rapport idéal de personnes par foyer aux fins de
planification devrait être de 3,5 en se fondant sur les données démographiques sur les Cris.

Le nombre de maisons que les communautés cries ont bâties au cours des cinq dernières années n’a pas
suivi le rythme de la hausse des constitutions d’unités familiales, donc l’arriéré et le surpeuplement des
maisons ont augmenté.

Les nouvelles constitutions de famille se chiffrent environ à 120 par année en ce moment. Les
communautés cries ont construit environ 55 unités par année avec l’aide du SCHL. On a augmenté le
nombre à 78 unités en 2005-2006 et 2006-2007 à la suite du nouveau financement unique. Cependant,
en raison d’une nouvelle méthode de répartition, la part des Cris de l’enveloppe régulière du SCHL
chutera de 78 à 26 unités pour les prochaines années. La nation crie d’Eeyou Istchee conteste cette
nouvelle méthode de répartition à cause des résultats inéquitables qu’elle produit. 8

Dans une lettre adressée au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et datée du 11 juillet
2005, le Grand chef à ce moment, Ted Moses, mentionne que la nouvelle méthode de répartition est
« inacceptable parce qu’elle est contraire à nos conventions et à nos protocoles d’entente existants, de
même qu’à nos pratiques antérieures et qu’elle va complètement à l’encontre de l’esprit et de la portée
des pourparlers sur nos nouvelles relations. »

La méthode de répartition et ses conséquences doivent toujours être résolues auprès du gouvernement
du Canada.

L’arriéré d’unités de logement actuellement nécessaires dans les communautés cries continue de
s’accroître, ce qui accentue le surpeuplement de ces unités de logement. Cette situation a eu des
répercussions négatives sur le bien-être social des individus et des familles.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               27

Contrairement à une tendance nationale chez les communautés autochtones, les Cris ne quittent pas
leurs communautés et leurs territoires pour devenir membres d’une population toujours croissante
vivant hors-réserve en quantités augmentant de façon considérable. C’est un fait important puisque les
responsables de l’élaboration des politiques ont tendance à se fier sur des tendances nationales pour
déterminer la répartition du logement chez les Premières nations. La nouvelle méthode de répartition
du logement ne tient pas compte de la réalité d’une population crie qui augmente et qui reste dans les
réserves. Par conséquent, les Cris croient qu’ils n’ont pas reçu leur juste part du financement de la part
des Affaires indiennes et du SCHL au cours des 20 dernières années dans le cadre du programme de
logement. Cette répartition inéquitable des logements de la part du gouvernement canadien n’a toujours
pas été résolue puisqu’elle se solde par un arriéré des unités de logement des communautés cries qui
continue d’exister et qui ne cesse de croître. Le nombre de logements n’a pas été suffisant pour répondre
à la demande à la hausse. 9

En ce qui concerne la nation crie d’Eeyou Istchee, le développement communautaire, comprenant le
logement et la construction de l’infrastructure et de la nation crie, représente l’une des promesses
fondamentales faites aux Cris dans la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. Le gouvernement
du Canada a toutefois adopté la position que la CBJNQ n’a pas créé d’obligation pour le Canada de
fournir des logements aux Cris autres que ceux qui sont disponibles dans les programmes
d’application générale. 10

De plus, le représentant du gouvernement du Canada a déclaré que la CBJNQ crée une obligation de
créer du logement pour la partie inuite. La nation crie d’Eeyou Istchee met en doute la logique derrière
le fait que deux parties autochtones retirent des avantages différents en matière de logement en vertu
de la même Convention. 11

De plus, la nation crie considère la signature et l’application indiquée de la CBJNQ comme la définition
d’une nouvelle relation entre les Cris et le Canada comprenant la promotion du développement
communautaire, y compris le logement. La création de logement, au moyen de programmes d’application
générale, ne constitue pas en elle-même un élément d’une nouvelle relation entre les Cris et le Canada.

En plus des dispositions de la CBJNQ, la Commission considère que la nation crie d’Eeyou Istchee,
comme les autres Premières nations du Canada, est admissible à tirer profit de programmes
d’application générale.

Le 3 novembre 2005, la table de négociation accessoire sur le logement cri pour la nation crie d’Eeyou
Istchee a déposé une proposition intitulée « Proposition crie visant à résoudre la crise du logement à la
Baie-James » à l’équipe de négociation fédérale. Les Cris considèrent que leur proposition est bien
équilibrée et justifiée, puis expliquent qu’ils sont prêts à engager une somme importante de leurs fonds
publics et privés pour résoudre le problème de logement et créer de nouvelles possibilités économiques.

Selon les Cris, l’arriéré actuel en matière de logement est de 1 548 unités, comparativement au parc de
logements existants total de 3 001 unités, soit un taux d’insuffisance de 52 p. 100. Cet arriéré constitue
la cause primaire d’un surpeuplement important des foyers dans les communautés cries. Dans le parc de
logements total actuel, 213 unités, soit 7 p. 100, sont inférieures aux normes dans la mesure où elles
devraient être condamnées et remplacées, puis 913 autres unités, soit 30 p. 100, nécessitent des
rénovations importantes en raison du surpeuplement. 12



28
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee

La proposition crie sur le logement déposée auprès du gouvernement du Canada comprend les éléments
et les points à examiner suivants :

1) Des administrations du logement régionales cries seraient mises sur pied sous les auspices de
l’administration régionale crie et seraient dirigées en bout de ligne par le gouvernement de la nation crie.
2) Le Canada garantit le financement des immobilisations en vertu des programmes existants du MAINC
pour les Cris. Cette garantie prévoit que des fonds des services votés seraient assurés pendant toute la
durée de la Convention, soit vingt (20) ans, et que l’indice de cette dernière serait modifié.
3) Le financement de la SCHL sera transféré à l’administration régionale du logement crie et majoré au
montant de 10 millions de dollars, indexés en fonction du prix et de la population. Pour ce qui est de la
situation du logement cri, le rôle de la SCHL serait transféré à l’administration régionale du logement cri.
4) Les Cris fourniront de leurs propres budgets du financement de l’ordre de 310 millions de dollars, répartis
sur une période de vingt (20) ans, afin d’assumer une partie des coûts de logement et de développement.
5) Le gouvernement du Canada s’engagera à retirer toutes les dettes de logement qu’il a contractées et
indirectes relativement à tous les projets de logement de la SCHL.
6) La somme de 450 millions de dollars sera versée au départ à l’administration régionale du logement crie
(ou à un bénéficiaire du financement à désigner) pour financer le coût des immobilisations pour le
logement, la rénovation et le développement de l’infrastructure relativement aux nouveaux lots aménagés.
7) Un principe clé de la proposition de logement crie est qu’il n’y aura pas de logements gratuits d’offerts;
il n’y aura que des logements à prix abordables et cette incitation à la propriété privée sera prise en
considération dans tous les aspects de la conception et de l’exécution du programme (prendre note de la
référence ci-contre). 13

La nation crie d’Eeyou Istchee espère que la Commission encouragera le ministre des Affaires indiennes
à étudier et à appuyer la proposition de logement crie.

4. Autres questions

En plus des questions et préoccupations concernant l’application de la CBJNQ, les représentants du
Grand conseil des Cris a soulevé des questions en suspens comme l’application de la Convention
d’Oujé-Bougoumou
, le déménagement des communautés de Nemaska et Waswanipi, les questions en
suspens concernant les routes d’accès, les questions de lignes de transport d’énergie, de même que les
questions relatives aux nations cries de Washaw Sibi et de MoCreebec.

La nation crie de Washaw Sibi

Le chef Billy Katapatuk Sr et M. Kenneth Weistche ont présenté un exposé, au nom de la nation crie de
Washaw Sibi, devant la Commission reposant sur les questions et préoccupations suivantes :

La mise en application de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et la nation Eeyou
de Washaw Sibi

Les représentants de la nation Eeyou de Washaw Sibi considèrent que leur situation représente une
question fondamentale relativement à la mise en application de la Convention de la Baie-James et du Nord
québécois
. Les Cris de Washaw Sibi sont les bénéficiaires de la CBJNQ, mais ils ne reçoivent pas la pleine
étendue des avantages prévus par la Convention. Puisqu’ils ne résident pas sur des terres de catégorie 1,

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               29

ils ne retirent pas pleinement les avantages de la CBJNQ. Ils prétendent « que le gouvernement du
Canada a déménagé nos membres de force dans une réserve qui n’a jamais eu aucune possibilité de
devenir une terre de catégorie 1. Le gouvernement du Canada a manqué l’occasion de respecter son
obligation fiduciaire à notre endroit. » 14

Ils considèrent que le Canada a l’obligation morale, sinon juridique, de prendre les mesures qui
s’imposent pour garantir que les Eeyous de Washaw Sibi puissent jouir de la totalité des avantages
de la CBJNQ.

Les Eeyous de Washaw Sibi prétendent être un groupe distinct possédant ses propres territoires de chasse
historiques et traditionnels dans le bassin hydrographique de la rivière Harricana. Cette allégation est
appuyée par des constatations anthropologiques préliminaires et des preuves linguistiques.

Les représentants de la nation Eeyou de Washaw Sibi ont déclaré qu’ils continuent « de vivre en tant que
membres d’une minorité au sein de la communauté algonquine d’Abitibiwinni. Nous avons continué
d’être les derniers à recevoir les avantages des maigres programmes et services offerts aux bandes
habituellement assujetties à la Loi sur les Indiens. Des dirigeants de la communauté d’Abitibiwinni ont
affirmé à certains de nos membres que puisque nous sommes des bénéficiaires cris, nous devrions
obtenir des services éducatifs et de santé de la part des institutions cries indiquées. Évidemment, de tels
services offerts par des institutions cries ne sont pas disponibles pour nous puisque nous ne résidons
pas sur des terres de catégorie 1. Cette situation non résolue a eu comme conséquences que les gens de
notre communauté n’obtiennent ni la totalité des avantages d’être membre de la Première nation
d’Abitibiwinni, ni la gamme complète des avantages auxquels ont droit les bénéficiaires de la CBJNQ.
Nous avons souffert de ce vide administratif et, dans certains cas, il a été responsable de conséquences
tragiques alors que des membres de notre communauté n’ont pas été en mesure de recevoir des soins
médicaux d’urgence. » 15

Les Eeyous de Washaw Sibi prétendent également que cette injustice historique « provient de l’incapacité
du gouvernement du Canada de respecter son obligation solennelle consistant à protéger et à défendre
les intérêts des Eeyous de Washaw Sibi en participant à la décision contraignant les membres de notre
communauté à vivre à l’extérieur de nos territoires traditionnels et à se retrouver ainsi en position de
minorité à l’intérieur de la Réserve d’Abitibiwinni. » 16

Au cours de l’été 2006, les Eeyous de Washaw Sibi ont prouvé leur engagement et leur détermination
d’améliorer leur situation en effectuant une randonnée de 120 kilomètres afin de retourner sur leurs
terres traditionnelles où ils se sont installés dans un village rudimentaire. Ils font appel au gouvernement
du Canada pour obtenir son aide dans la création d’un nouveau village pour leur communauté.

La nation crie d’Eeyou Istchee a entamé de sérieuses discussions avec le gouvernement du Canada, dans
le cadre des pourparlers entre MM. Chrétien et Namagoose, afin de trouver une façon acceptable
d’appliquer les obligations du Canada envers les Cris en vertu de la CBJNQ. Dans le contexte de ces
discussions, les questions et préoccupations des Eeyous de Washaw Sibi ont été soulevées. Les
représentants eeyous de Washaw Sibi ont participé à ce processus afin de mettre certaines questions
soulevées les concernant au clair. Les Eeyous de Washaw Sibi ont déclaré qu’une résolution des questions
qu’ils revendiquent nécessiterait un engagement financier du Canada dans le but de construire un
nouveau village.



30
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee

Les Eeyous de Washaw Sibi « considèrent qu’il serait de mise que la Commission :

1. utilise le bureau de la commission Crie-Naskapie pour continuer à porter à l’attention du gouvernement
du Canada son incapacité de respecter ses obligations fiduciaires envers les Eeyous de Washaw Sibi et de
lui rappeler qu’il s’agit d’une obligation à la fois morale et juridique;
2. conseille vivement au gouvernement du Canada, de façon formelle et informelle, de tirer profit de l’occasion
offerte par les pourparlers avec M. Chrétien de reconnaître la communauté de Washaw Sibi comme étant
la dixième Première nation crie et de s’engager immédiatement à financer la construction d’un village
Washaw Sibi dans le cadre de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. » 17

La nation crie d’Oujé-Bougoumou

La sous-chef Sophie Bosum et d’autres représentants de la nation crie d’Oujé-Bougoumou ont parlé des
questions suivantes :

Financement du fonctionnement et de l’entretien (F et E)

La nation crie d’Oujé-Bougoumou est encore très préoccupée par le financement de son fonctionnement
et entretien. La nation d’Oujé-Bougoumou continue de se préoccuper du montant et du fondement de
l’ajustement aux niveaux de financement en matière de F et E.

À la suite du financement obtenu en vertu de la convention sur une nouvelle relation avec Québec,
la nation d’Oujé-Bougoumou a construit de nouvelles installations pour sa communauté. Mais le
gouvernement du Canada n’a pas reconnu, jusqu’ici, ses obligations et sa responsabilité de financer le
fonctionnement et l’entretien de ces nouvelles immobilisations. Selon les responsables de la nation
d’Oujé-Bougoumou, il est clair que « le gouvernement du Canada a l’obligation, en vertu de la Loi sur les
Cris et les Naskapi du Québec
d’offrir du financement du F et E aux communautés pour ses répondre à ses
besoins en matière de fonctionnement. » 1
8

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               31
Par conséquent, le Canada n’a pas maintenu le même rythme que ces aménagements en ce qui concerne
l’octroi de financement en matière de F et E en vue de la construction de nouvelles immobilisations.

De plus, la nation d’Oujé-Bougoumou est préoccupée par l’insuffisance des niveaux de financement
actuels pour répondre aux besoins immédiats et éventuels de la communauté, comme « l’informatisation
accrue dans les bureaux, les communications (p. ex., l’Internet), les soins pour les aînés, l’élaboration de
programmes pour les jeunes, le fonctionnement et l’entretien des installations récréatives, les besoins
urgents en matière de nouveaux programmes culturels, les travaux juridiques sur le plan local afin de
défendre les droits des Cris et les structures locales afin d’administrer la justice. » 19

La nation crie d’Oujé-Bougoumou recommande encore une fois « un examen de la formule de financement
du F et E en vue d’incorporer éventuellement une capacité financière visant à répondre aux nouveaux
besoins au sein des communautés qui n’avaient jamais été pris en considération lorsque la
Loi sur les Cris
et les Naskapis du Québec
est entrée en vigueur en 1984. » 20

Financement des projets d’immobilisations

La Convention Oujé-Bougoumou/Canada stipule que l’on ne diminuera pas le financement disponible
aux autres communautés cries à la suite du financement qui serait disponible pour les projets
d’immobilisations de la communauté d’Oujé-Bougoumou. Le MAINC maintient qu’il n’est pas obligé de
rembourser les Cris pour le financement reçu par la communauté Oujé-Bougoumou pour ses projets
d’immobilisations depuis 1994-1995. Une somme totale de 1,7 millions de dollars avait été transférée
de la nation crie d’Eeyou Istchee à la nation d’Oujé-Bougoumou pour ses projets d’immobilisations
depuis 1994-1995.

Les demandes de la nation d’Oujé-Bougoumou en suspens

En ce qui a trait aux fonds transférés en vertu de la Convention Oujé-Bougoumou/Canada, la nation crie
d’Oujé-Bougoumou maintient sa demande d’une somme de 2 952 000 $ représentant la perte de gains
provenant du paiement tardif des montants convenus en vertu de la Convention Oujé-Bougoumou/Canada
et des coûts indirects. Selon la nation crie d’Oujé-Bougoumou, cette somme est due à la nation
d’Oujé-Bougoumou et devrait être payée par le gouvernement du Canada.

Mise en application de la Convention Oujé-Bougoumou/Canada

Environ quinze (15) ans se sont écoulés depuis la signature de la Convention Oujé-Bougoumou/Canada
et les Cris et le Canada n’ont pas conclu de convention complémentaire modifiant la CBJNQ. Cette
convention complémentaire incorporerait la nation crie d’Oujé-Bougoumou à la CBJNQ, tel que
prévu et souhaité dans la Convention Oujé-Bougoumou/Canada. Cette situation laisse la nation crie
d’Oujé-Bougoumou dans un vide juridique relativement à la légalité de leurs règlements et à leur
capacité d’agir à titre de bande crie.

Selon la nation crie d’Oujé-Bougoumou, « on ne peut décrire les discussions à venir jusqu’ici que comme
étant frustrantes, en apparence sans fin et coûteuses. » 21

La nation crie d’Oujé-Bougoumou continue toutefois d’espérer que cette question et d’autres questions
puissent être résolues à l’intérieur du contexte des présents pourparlers entre les Cris et le Canada.



32
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee

La nation crie de Wemindji

Le sous-chef Arden Visitor a parlé des questions et des préoccupations suivantes :

Mécanisme d’application

Plusieurs recommandations de la Commission reflètent les aspirations des communautés cries d’obtenir
le plein exercice indiqué du droit inhérent à l’autonomie gouvernementale. Cependant, ce qui manque à
ces recommandations est un processus ou un mécanisme d’application. La nation crie de Wemindji
déclare qu’il « est primordial que chacun des gouvernement locaux des nations cries et naskapies, et
particulièrement le Grand conseil des Cris, collaborent pour établir l’ordre des priorités dans l’élaboration
du mécanisme d’application de la commission Crie-Naskapie. » 22 La Commission devrait faciliter, en
collaboration avec les gouvernements locaux eeyous et le Grand conseil des Cris, le processus en vue
de l’élaboration et de la mise en oeuvre du mécanisme d’application.

Administration de la justice

La Cour de circuit du Québec ne vient que périodiquement à Wemindji pour entendre et administrer les
procès. À part quelques procès, le juge coordonnateur a suspendu, depuis septembre 2004, toutes les
audiences relativement à des infractions aux règlements. Cette suspension s’est poursuivie pendant
toute la durée du rôle d’audience 2004-2005. Les visites périodiques et la suspension de certaines
audiences ont provoqué de longs délais dans l’administration de la justice à Wemindji. La règle de droit
et une administration efficace de la justice sont essentiels au bien-être social de la communauté et de la
nation cries de Wemindji. Par conséquent, la nation crie de Wemindji recommande l’examen de l’article
18, particulièrement en ce qui concerne l’application du paragraphe 18.0.37 de la Convention de la Baie-
James et du Nord québécois
afin de se charger de l’administration de la justice actuelle. 23

Première nation crie de Waswanipi

Le chef Robert Kitchen, M. Allan Happyjack, directeur exécutif, et M. Sam Gull, directeur général, de la
Première nation crie de Waswanipi, ont présenté un exposé devant la Commission. Le chef Kitchen a
parlé des questions et des préoccupations de la Première nation crie de Waswanipi suivantes :

Mise en valeur des ressources et des Waswanipi Iinuuch

Les Waswanipi Iinuuch, comme ils se font appeler, et leurs territoires historiques et traditionnels ont été
sujet à la mise en valeur des ressources et à ses répercussions depuis 1930. Les Waswanipi Iinuuch ont
particulièrement subi des répercussions depuis les cinquante (50) dernières années avec l’exploitation
minière, la foresterie commerciale et l’aménagement hydroélectrique. Les Waswanipi Iinuuch prétendent
que « les terres waswanipies… et leur intégrité territoriale, leur souveraineté, leur compétence, leur contrôle
et leur gestion continuent toujours de faire l’objet de préjudices, d’exploitation et de surexploitation
forestière au moyen de la violation de propriété, de la coupe à blanc et des activités illégales en l’absence
d’une entente globale les concernant et de la délivrance d’un permis ou d’une autorisation légitime de la
part de la nation crie de Waswanipi. » 24 Par conséquent, la Première nation crie de Waswanipi « désire
exprimer son intention, son objectif et sa détermination de négocier une entente globale avec les
gouvernements du Canada et du Québec pour ses générations futures. » 25

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               33

La mise en valeur des ressources effectuée dans le passé et à l’heure actuelle a eu et continue d’avoir des
répercussions pour les chasseurs, les trappeurs et les pointeurs de la communauté Waswanipi Iinuuch.
Par conséquent, la Première nation crie de Waswanipi demande au gouvernement du Canada de lui
accorder un financement suffisant de manière à ce que la communauté de Waswanipi puisse effectuer
une vérification complète, une évaluation des répercussions et une évaluation des besoins. Les
constatations, les recommandations et les conclusions de cette vérification et de ces évaluations
aideront la Première nation crie de Waswanipi à déterminer les plans et l’orientation en vue d’un
dialogue sérieux et des négociations relativement à la mise en valeur des ressources et à ses répercussions. 26

De plus, la Première nation crie de Waswanipi « invite le gouvernement du Canada à exercer ses
autorités et pouvoirs législatifs en annonçant officiellement qu’une enquête publique exhaustive devra
être menée sur l’état des Iinuuch, de la culture crie et des Eeyou Istchee de Waswanipi » à la suite de la
mise en valeur des ressources et de ses répercussions et conséquences. 27

Pour appuyer leur position, leurs revendications et leurs demandes, le chef Robert Kitchen a
présenté une copie de la Résolution du Conseil no 2004 – 05 CR/144, adoptée le 15 décembre 2004,
concernant la vision du Waswanipi Ndoho Istchee (le territoire de chasse Waswanipi) comprenant
les éléments suivants :

1. Une demande d’enquête publique;

2. Le plan directeur;

3. Le processus de négociation;

4. L’entente globale;

5. Le plan de suivi.

Une copie de cette Résolution est disponible auprès du bureau de la Commission.



34
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee

Imputabilité et transparence

Les Waswanipi Iinuuch ont exprimé le besoin d’améliorer les niveaux d’imputabilité et de transparence
du gouvernement et de l’administration locale de la Première nation crie de Waswanipi. Par conséquent,
les Waswanipi demandent une affectation de fonds spéciale de la part du Canada et du Québec pour
mener des consultations publiques et élaborer un modèle local d’une éventuelle Loi sur l’imputabilité. 28

Demande d’indemnité de déménagement

La Première nation crie de Waswanipi prétend qu’elle a été forcée de quitter, déménagée ou déplacée
du poste de Waswanipi en raison des aménagements hydroélectriques prévus sur leurs territoires. Ils
prétendent aussi que « le gouvernement n’a jamais concédé de terres, n’a jamais aidé et n’a jamais offert
d’indemnité aux membres de la communauté de Waswanipi pour les inconvénients, les déménagements
et les déplacements survenus entre 1960 et 1975... » 29 Par conséquent, la Première nation crie de
Waswanipi demande au gouvernement du Canada de déclarer le vieux poste de Waswanipi comme étant
un lieu patrimonial officiel et d’affecter les fonds nécessaires à Waswanipi pour sa restauration et sa
reconstruction en tant que lieu patrimonial historique.

Projets d’immobilisations

La Première nation crie de Waswanipi espère que les projets d’immobilisations comme de nouvelles
unités de logement, un nouveau projet d’école primaire, un nouvel immeuble administratif et un nouveau
centre communautaire constitueront un élément intégral de toute entente éventuelle sur une nouvelle
relation avec le gouvernement du Canada. La communauté de Waswanipi considère que ces projets
d’immobilisations constituent une priorité. 30

Développement économique

Waswanipi aura besoin du financement, des contributions et de commandites des secteurs privés et de
nouveaux partenaires pour leurs industries, entreprises, coentreprises ou partenariats, ainsi que pour
d’autres possibilités de développement économique. 31

Jeunesse

La Première nation crie de Waswanipi considère que les jeunes représentent la pierre angulaire et le
fondement essentiels pour bâtir une nation. Les jeunes ont besoin d’éducation et de formation en vue de
leur perfectionnement professionnel et de leur organisation de carrière. 32

Les Cris de Senneterre

La situation des Cris de Senneterre devrait être examinée pour être en mesure de déterminer les options
en vue de la résolution de cette question en suspens. 33

Suivi concernant les questions et préoccupations de la communauté de Waswanipi

Le chef Robert Kitchen a conclu son exposé devant la Commission en demandant que le Canada lui
accorde du financement pour que Waswanipi puisse s’engager dans une nouvelle relation avec la
commission Crie-Naskapie afin d’assurer un suivi adéquat de leurs questions et préoccupations. 34

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               35

La nation crie de Chisasibi

La sous-chef Violet Pachanos et le représentant des jeunes, Kevin House, de la nation crie de Chisasibi
ont soulevé les préoccupations suivantes :

Modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

La nation crie de Chisasibi a éprouvé certaines difficultés à adopter quelques règlements en particulier
(p. ex., le règlement visant les emprunts de la Bande à long terme) en raison des exigences de quorums
élevés de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. La communauté a dû avoir recours à des référendums
en vue de l’adoption de ces règlements parce qu’il est très difficile de répondre aux exigences de la Loi en
matière de quorum avec une simple assemblée générale des membres. 35

Règlements concernant les élections

Les règlements concernant les élections des communautés cries devraient être normalisés étant donné
qu’ils sont différents d’une communauté à l’autre.

Logement

La nation crie de Chisasibi fait face à un très sérieux problème relativement au besoin de remplacer les
maisons qui se détériorent en ce moment et au besoin d’unités de logement supplémentaires en raison
de sa population qui augmente sans cesse puis de l’arriéré qui en découle.

À cause de l’état de détérioration des unités de logement qui ont été déplacées de Fort George, on a dû
en démolir et rebâtir certaines. On a procédé à une étude sur l’état des unités de logement de Chisasibi.
La conclusion de cette étude était que les unités de logement comme les maisons de cèdre fournies par
les Affaires indiennes se sont détériorées à cause de la moisissure. Ces unités étaient devenues trop
insalubres pour que des familles cries y vivent. En 1994, la nation crie de Chisasibi a lancé le Programme
d’urgence du logement lorsque les mauvaises conditions des logements est devenue une urgence en
matière de santé publique. La nation crie de Chisasibi a particulièrement décidé de remplacer les unités
qui se détériorent à cause de la moisissure et qui ont été déclarées impropres à l’occupation humaine par
la nation crie de Chisasibi. Cette dernière a par ailleurs investi plus de onze millions de dollars
(11 600 496 $) de ses fonds communautaires entre 1994 et 1998 pour réagir à qu’elle considérait être
une situation d’urgence sanitaire liée à des habitations dangereuses. Le ministre des Affaires indiennes a
pris l’engagement de financer le remplacement de ces unités de logement. Chisasibi a reçu, en 1998, la
somme de 1 975 630 $ en financement de la part du MAINC. Par conséquent, le ministre a partiellement
rempli son engagement. Les membres de la nation crie de Chisasibi attendent toujours que le ministre
des Affaires indiennes respecte leurs attentes, c.-à-d. son engagement à financer l’intégralité du projet
visant à remplacer les unités qui se détériorent. En raison de l’urgence de la situation et pour des raisons
de santé, la nation crie de Chisasibi a avancé une partie des fonds, mais les unités de logement qui se
détériorent n’ont pas toutes été remplacées à l’heure actuelle. 36

En novembre 2005, la nation crie de Chisasibi est toujours aux prises avec des maisons envahies par
la moisissure et le Programme d’urgence du logement a coûté 24 millions de dollars à venir jusqu’ici
(la contribution totale du MAINC se chiffre à 4 075 000 $). Selon les autorités de Chisasibi,
122 maisons doivent toujours être remplacées au cours de l’exécution de leur plan quinquennal,
ce qui représente un coût de 35 millions de dollars. 37



36
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee

Il semble que les pourparlers qui se tiennent actuellement avec le Canada ne traitent pas de ces questions
essentielles précises concernant le logement dans la nation crie de Chisasibi. 38

À cause de cette situation particulière, la nation crie de Chisasibi n’a pas été en mesure d’engager les
fonds nécessaires à de nouvelles unités de logement. Le surpeuplement et l’arriéré des unités de logement
ont été causés par l’accroissement de la population et cette situation se poursuit.

De plus, la nation crie de Chisasibi n’est pas d’accord avec l’estimation actuelle de l’arriéré des unités de
logement pour la communauté de Chisasibi. L’estimation actuelle de 69 unités faite par l’Administration
régionale crie n’est pas exacte. L’arriéré réel d’unités de logement pour la communauté de Chisasibi est de
325 unités. On s’affaire actuellement à mettre cette estimation à jour du côté de Chisasibi. 39

Expansion de Chisasibi

En raison de l’accroissement de la population, la communauté de Chisasibi doit être agrandie. La route et
son couloir, qui ne font pas partie des terres de catégorie 1A, constituent un obstacle à l’expansion de la
communauté. Par conséquent, la communauté de Chisasibi ne peut pas être agrandie vers la voie
publique en ce moment à cause du statut actuel des couloirs routiers. 40

Bloc D

Le « transfert » du Bloc D à la nation crie de Chisasibi n’a pas encore été fait (le « transfert » du Bloc D
est envisagé dans la Convention concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les
Cris du Québec
). La communauté de Chisasibi reconnaît que l’on a découvert qu’une partie du
Bloc D était contaminée et qu’elle devrait être nettoyée par les autorités compétentes. Cette question
de contamination a retardé la désignation du Bloc D au titre de terre de catégorie IA en vue de l’usage
et du bénéfice exclusifs de la nation crie de Chisasibi. 41

On a néanmoins construit un aérogare sans l’aide du ministère fédéral du transport. On a récemment
officiellement inauguré cet aérogare. Cependant, l’aéroport et le bâtiment restent des terres de catégorie
III puisque le Bloc D n’a pas encore été transféré à la nation crie de Chisasibi.

Procédures judiciaires en vertu des règlements

La cour itinérante a séparé les procédures judiciaires : celles intentées en vertu de règlements locaux ou
celles intentées en raison d’une affaire criminelle. Les procédures en vertu des règlements locaux de la
nation crie n’ont pas été entreprises et continuent de représenter un problème non seulement pour la
communauté de Chisasibi, mais peut-être également pour les autres communautés cries. 42

La Première nation de Whapmagoostui

Le chef David Masty de la Première nation de Whapmagoostui a parlé des questions suivantes :

Étude d’expansion de la communauté et plan de développement communautaire

La Première nation de Whapmagoostui planifie actuellement l’expansion de la communauté de
Whapmagoostui à l’intérieur des zones limitées propices à l’installation de l’infrastructure, y compris les
services d’aqueduc et d’égout. D’ici une période de dix (10) ans, la superficie de la communauté de

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               37

Whapmagoostui devra s’étendre davantage, possiblement jusque de l’autre côté de la rivière. Cette
possibilité nécessitera le réexamen et la renégociation de l’état actuel de la terre qui est de catégorie 1B
en ce moment en vertu de la CBJNQ. 43

Notes en fin de chapitre

1 Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee) – Présentation devant la commission Crie-Naskapie – le 16 février 2006, page 4.
2 Ibid., page 5.
3 Ibid., page 9.
4 Ibid., page 10.
5 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 16 février 2006 (transcription officielle, page 134, lignes 10 à 16).
6 Ibid., page 134, lignes 17 à 20.
7 Exposé sur la situation du logement dans les communautés cries présenté devant la commission Crie-Naskapie, le 16 février 2006, par le chef et Dr Billy Diamond, page 2.
8 Ibid., page 3.
9 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 16 février 2006 (transcription officielle, page 138, lignes 20 à 37).
10 Exposé présenté devant la commission Crie-Naskapie (AINC), page 4.
11 Exposé sur la situation du logement dans les communautés cries présenté devant la commission Crie-Naskapie, le 16 février 2006, par le chef et Dr Billy Diamond, page 6.
12 Annexe B de l’exposé sur la situation du logement dans les communautés cries présenté devant la commission Crie-Naskapie, le 16 février 2006, par le chef et Dr Billy Diamond – Proposition crie visant à résoudre la crise du logement à la Baie-James, page 2.
13 Ibid., page 12.
14 Exposé de la nation crie Washaw Sibi présenté devant la Commission crie-naskapie lors d’une audience spéciale tenue le 14 février 2006 à Montréal, page 1.
15 Ibid., pages 3 et 4.
16 Ibid., page 4.



38
Questions et préoccupations de la nation crie Eeyou d'Eeyou Istchee
17 Ibid., page 6.
18 Exposé de la nation crie de Oujé-Bougoumou présenté devant la Commission crie-naskapie lors d’une audience spéciale tenue le 14 février 2006 à Montréal, page 2.
19 Ibid., page 2.
20 Ibid., page 3.
21 Ibid., page 4.
22 Rapport de la nation crie de Wemindji présenté à la commission Crie-Naskapie, février 2006, page 4.
23 Ibid., page 4.
24 Déclaration de la Première nation crie de Waswanipi, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, commission Crie-Naskapie, le 14 février 2006, Hôtel Delta du centre-ville, Montréal, Québec, page 3.
25 Ibid., page 3.
26 Ibid., page 5.
27 Ibid., page 8.
28 Ibid., page 3.
29 Ibid., page 4.
30 Ibid., page 5.
31 Ibid., page 6.
32 Ibid., page 7.
33 Ibid., page 8.
34 Ibid., page 9.
35 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 14 février 2006 (transcription officielle, page 79, lignes 35 à 43).
36 Ibid., page 80, lignes 14 à 45.
37 Lettre de Mme Violet Pachanos, sous-chef, Nation crie de Chisasibi, datée du 13 juin 2006, à l’intention du commissaire Philip Awashish.
38 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 14 février 2006 (transcription officielle, page 80, lignes 51 et 1 respectivement).
39 Ibid., page 81, lignes 14 à 19.
40 Ibid., page 81, lignes 29 à 40.
41 Ibid., page 82, lignes 3 à 8.
42 Ibid., page 82, lignes 35 à 42.
43 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 13 février 2006 (transcription officielle, page 22, lignes 17 à 45).

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               39

Le 18 février 2006, à Montréal, Québec, le Chef Jimmy James Einish, Philip Einish Jr., John
Mameanskum, Wayne Nattawappio et leurs conseillers ont comparu aux audiences spéciales de la
Commission sur l’exécution de la loi au nom de la nation naskapie de Kawawachikamach. Le Chef Einish
et John Mameanskum ont exprimé leurs préoccupations au sujet des questions suivantes :

1. La fonction gouvernementale

Modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

La nation naskapie de Kawawachikamach désire que l’on apporte des modifications à la Loi sur les Cris et
les Naskapis du Québec
en ce qui concerne les revendications suivantes :

a) la réduction de certains quorums;
b) que l’on permette aux agents de la paix d’émettre des contraventions aux contrevenants aux règlements
naskapis, plutôt que des sommations en vertu du Code Criminel;
c) que l’on permette au Conseil de diriger ses affaires sans que l’on aie à convoquer une réunion dans
certaines circonstances.

La nation naskapie souhaite cependant parvenir à un accord avec la nation crie d’Eeyou Istchee à propos
des modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et présenter ensuite une proposition
conjointe au gouvernement du Canada. 1



40
La nation naskapie Eeyouch de Kawawachikamach

Commission du Nunavik

Nonobstant les préoccupations soulevées par la nation naskapie de Kawawachikamach, la société
Makivik, le Canada et le Québec ont négocié une entente de principe qui propose une table de négociation
spéciale dans le but d’aborder la question des préoccupations de la nation naskapie.

Les Naskapis ont eu une réunion, le 26 juillet 2005, avec les parties afin d’évaluer la création d’un groupe
de travail comportant des représentants naskapis, inuits, canadiens et québécois.

Cependant, avant de répondre à cette proposition, la nation naskapie tient à ce que le gouvernement du
Canada réponde aux questions concernant la politique d’autonomie gouvernementale des Autochtones
du Canada. À venir jusqu’ici, le Canada n’a pas encore fourni de réponse satisfaisante aux questions de la
nation naskapie. 2

À la suite d’une représentation de la nation naskapie, la commission Crie-Naskapie a décidé de mener
une enquête, en vertu de l’article 165 (1) (b) de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Cependant,
des représentants du ministère des Affaires indiennes ont refusé de se présenter à une audience de la
Commission à ce sujet en invoquant l’article 167 de la Loi. De plus, les Services juridiques du ministère
des Affaires indiennes ont informé la Commission qu’elle n’était « pas autorisée à enquêter sur le processus
de négociation en cours avec les Inuits du Québec visant à établir une nouvelle forme de gouvernement
au Nunavik. » 3

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               41
La nation naskapie de Kawawachikamach a conclu que « le manquement du Canada à paraître devant la
Commission est entièrement en harmonie avec notre point de vue à l’effet que, depuis 15 ans, le Canada
a négligé son obligation de protéger nos droits et malgré l’effort soutenu de la société Makivik, un
organisme ethnique, pour négocier ce qui serait effectivement un gouvernement ethnique ayant
compétence sur une bonne partie de nos terres traditionnelles et sur plusieurs aspects de nos vies. » 4

Au cours de l’exposé du Canada lors des audiences spéciales sur l’exécution de la loi à Montréal, M.
Michel Blondin, directeur du Bureau de la mise en oeuvre de la Baie-James, a déclaré qui fournirait des
renseignements supplémentaires à la Commission à ce sujet avant la fin du mois de février 2006. 5
La Commission espère que ces renseignements lui seront communiqués sous peu.

2. Service de police

Depuis le 1er avril 2000, la nation naskapie n’a plus d’entente tripartite concernant le service de police
puisque le différend sur le partage des coûts entre le Canada et le Québec n’a pas été résolu. La nation
naskapie, pendant ce temps, continue à dépenser des sommes plus élevées qu’elle le devrait uniquement
pour assurer le financement des gouvernements. 6 Toutefois, l’exposé du MAINC aux audiences spéciales
de l’exécution de la loi de la Commission mentionne que « les ententes pour les exercices 2004-2005 et
2005-2006 ont été signées et que les budgets déterminés dans les ententes avaient été pleinement
accordés à la nation naskapie. » 7 Selon des représentants de cette dernière, les ententes « sont des
ententes bilatérales entre le Canada et le village naskapi de Kawawachikamach concernant le partage
fédéral du financement pour le service de police naskapi. » 8

3. Problèmes communautaires

Logement

La situation du logement au sein de la communauté naskapie s’est grandement améliorée depuis son
exposé devant la Commission en février 2004.

Cependant, les attributions du logement pour la communauté naskapie à partir de 2007-2008 sont
toujours inconnues en ce moment à cause du processus d’attribution du logement de la SCHL. 9

L’eau potable à Kawawachikamach

Ce projet avance bien et la nation naskapie de Kawawachikamach est satisfaite des relations de
travail établies entre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour faire progresser
ce projet important. 10

Notes de fin de chapitre

1 Mémoire présenté à la commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 15 février 2006, par la nation naskapie de Kawawachikamach, page 4.
2 Ibid., pages 4 et 5.
3 Lettre de M. Martin Lagasse, Services juridiques, AINC, datée du 1er février 2006 et adressée à M. Brian Shawana, directeur
général, commission Crie-Naskapie.



42
La nation naskapie Eeyouch de Kawawachikamach
4 Mémoire présenté à la commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 15 février 2006, par la nation naskapie de Kawawachikamach, page 5.
5 Commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 13 février 2006 (transcription officielle, page 17, lignes 1 à 22).
6 Mémoire présenté à la commission Crie-Naskapie, Audiences spéciales sur l’exécution de la loi, Montréal, le 15 février 2006, par la nation naskapie de Kawawachikamach, page 6.
7 Présentation à la commission Crie-Naskapie, le 13 février 2006, page 6.
8 Lettre du chef de la nation naskapie de Kawawachikamach, Jimmy James Einish, datée du 2 juin 2006 et adressée à M. Brian Shawana, directeur général, commission Crie-Naskapie.
9 Ibid., page 8.
10 Ibid., page 9.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               43

Contexte

La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec exige que la Commission présente, aux deux ans, un rapport
sur la mise en oeuvre de la Loi. Ces rapports biennaux doivent être soumis au ministre des Affaires
indiennes et du Nord canadien, lequel voit à déposer les rapports devant chacune des chambres du
Parlement. La Commission a toujours pris très au sérieux cette responsabilité imposée par la loi. Aux
deux ans, pour préparer le rapport, la Commission organise une série d’audiences spéciales sur la mise
en oeuvre. Ainsi, cette année, les audiences ont eu lieu à Montréal au milieu du mois de février. Pour les
années au cours desquelles les audiences ont lieu à un emplacement central, la Commission s’arrange
pour faire venir le chef ou un représentant, un représentant des aînés et des jeunes de chaque collectivité.
En outre, certaines collectivités décident de faire participer des personnes supplémentaires qui désirent



44 Réponse du Ministère des affaires indiennes et du Nord aux recommendations
du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie

faire des présentations. En plus des collectivités, le Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/l’Administration
régionale crie présente aussi un exposé. Ainsi, cette année, le chef Billy Diamond a fait une présentation
spéciale sur le logement. Par l’entremise du ministère des Affaires indiennes et du Nord (AINC), le
Canada était représenté en 2004 et à nouveau cette année par M. Michel Blondin, directeur du Bureau
de mise en oeuvre de la Baie James.

Étant donné qu’une grande partie des présentations sont déposées à la Chambre des communes et au
Sénat, pratiquement tous les intervenants effectuent des recherches soigneuses et présentent en détail
les questions qui, selon eux, sont importantes. Lorsque les commissaires veulent une explication
supplémentaire ou jugent que d’autres détails sont nécessaires, ils posent des questions. Pour préparer
les rapports, afin d’avoir une référence aisée à ce qui est dit, la Commission conserve des enregistrements
audio des audiences. Les transcriptions de ces enregistrements font ensuite partie intégrante des
dossiers officiels de la Commission.

Lorsque les transcriptions des audiences spéciales sur la mise en oeuvre ainsi que le matériel imprimé
présenté lors des audiences ont fait l’objet d’un examen, la Commission procède à l’analyse des questions
soulevées. Cette analyse, jumelée à l’information découlant des présentations officielles faites en vertu
de la loi ainsi que des autres observations reçues au cours des deux années précédentes constituent le
fondement des recommandations présentées dans le rapport biennal.

Au cours des dernières années, le ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada a préparé des
réponses assez détaillées par écrit au sujet des recommandations présentées.

Comme partie intégrante du suivi à ses rapports, la Commission utilise la pratique d’inclure, dans chaque
section, une partie qui résume la réponse du ministère afin que les personnes ayant soulevé des questions
et présenté des suggestions au cours des audiences et ailleurs soient au courant du travail réalisé.
Ci-après, nous présentons un résumé des réponses d’AINC au sujet des recommandations contenues
dans le Rapport 2004 de la Commission.

Recommandations et réactions

Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec

(Pour que les références soient plus faciles, les recommandations du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie sont présentées en italiques. La réponse du ministère est résumée dans le deuxième paragraphe et tous les commentaires au sujet de la réaction sont présentés dans un troisième paragraphe.)

1. Une assemblée extraordinaire des nations cries et naskapies sur la mise en oeuvre de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec serait tenue conformément aux termes du présent rapport. En l’absence de
mécanismes adéquats pour la mise en oeuvre de la loi, cette assemblée serait financée par le ministère des
Affaires indiennes et du Nord canadien, car c’est le gouvernement fédéral qui s’est porté responsable de la
mise en oeuvre correcte de la loi.*

La réponse du ministère confirme qu’une assemblée extraordinaire devrait être organisée et que sa
portée devrait être élargie pour inclure les questions de gouvernance s’étendant au-delà des amendements
à la Loi, surtout à la lumière du travail réalisé à la table de négociations entre les Cris et le Canada. On
suggère que les Naskapis assistent à cette réunion à titre d’observateurs. Le ministère offre de soutenir
cette assemblée si monsieur Chrétien et le GCC(EI)/ARC jugent que la réunion serait utile pour appuyer
leurs propres négociations.**

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               45

La Commission a porté cette question à l’attention du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee)/
l’Administration régionale crie.

2. Les administrations fédérales et Eeyou (Cris et Naskapis) devraient établir, par le biais de négociations, un
mécanisme approprié au service de la mise en oeuvre correcte de la
Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.

Le ministère a confirmé que cette question fait maintenant partie intégrante des négociations entre les
Cris et le Canada et qu’elle pourrait aussi être abordée au cours de l’assemblée extraordinaire proposée.

3. Le chapitre 9 de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et le chapitre 7 de la Convention
du Nord-Est québécois de même que la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec devraient être amendés
de manière à prévoir, entre autres choses, les dispositions suivantes

a) une reconnaissance entière et explicite du droit inhérent des Eeyou à l’autonomie gouvernementale;

b) la reconnaissance de l’existence et de l’application des lois, coutumes et pratiques dans l’exercice du droit des Eeyou à l’autonomie gouvernementale.

Le ministère confirme son point de vue suivant : « Même si le gouvernement du Canada reconnaît le
droit inhérent à l’autonomie gouvernementale comme droit existant en vertu de la section 35 de l’Acte
de l’Amérique du Nord britannique, 1982, il a établi une approche pour la mise en oeuvre qui se concentre
sur l’aboutissement à des ententes pratiques et réalisables sur la façon dont l’autonomie gouvernementale
sera exercée, plutôt que de tenter de la définir en termes abstraits ».

La Commission n’a pas de problème avec la négociation d’ententes pratiques et réalisables pour assurer
l’exercice de l’autonomie gouvernementale. Toutefois, les commissaires sont préoccupés par le fait que la
reconnaissance actuelle du Canada en ce qui a trait au ‘droit inhérent’ est simplement une politique sur
la façon dont le gouvernement du jour choisit d’interpréter la section 35. Bien que la politique soit
louable, elle demeure quand même seulement une politique et ne fait pas partie des ententes et ne fait



46 Réponse du Ministère des affaires indiennes et du Nord aux recommendations
du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie

pas non plus partie de la Constitution ni des lois fédérales. C’est pourquoi, tout comme pour les autres
politiques, elle peut être transformée en simple question administrative. En outre, l’exercice du droit
inhérent à l’autonomie gouvernementale ne devrait pas dériver du pouvoir fédéral.

La commission Crie-Naskapie continue de croire que le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale
devrait être reconnu explicitement et être enchâssé dans la Constitution. Comme mesure de remplacement,
pour Cris et les Naskapis, ce droit devrait être reconnu et enchâssé dans la Convention de la Baie-James et
du Nord québécois
et dans la Convention du Nord-Est québécois.

4. Les administrations fédérales et Eeyou devraient prendre les mesures adéquates quant aux ressources
humaines nécessaires pour l’administration correcte de l’autonomie gouvernementale locale, et le Canada
devrait assurer la prestation des ressources financières adéquates nécessaires pour la satisfaction de
ces besoins.

Le ministère a répondu que Ressources humaines et Développement des compétences Canada finance et
continuera de financer la formation. La réponse fait aussi référence au processus Chrétien-Namagoose
comme source possible de solution pour les problèmes actuels de financement. Dans une mise à jour le
13 février 2006, le ministère a rapporté que RHDCC et l’ARC ont signé une prolongation d’un an de
l’accord actuel et qu’une évaluation du programme a fait ressortir des résultats réussis.

La Commission a confiance que les négociations actuelles entre les Cris et le fédéral résoudront cette
question à plus long terme. À l’occasion, des prolongations d’une année sont nécessaires. Par contre, le
long terme est certainement nécessaire pour les programmes de formation efficaces. Nous continuerons
de surveiller les progrès afin d’assurer que les questions soulevées au cours de nos audiences et abordées
au début en référence au processus cri-fédéral, ne seront pas simplement négligées au cours des deux
processus. En outre, cette approche n’aborde pas l’effet de cette question sur la nation naskapie. Bien que
les Cris et les Naskapis possèdent la Loi en commun, ils ont des accords distincts et les Naskapis ne font
pas partie du processus Chrétien-Namagoose. Il est important d’examiner les circonstances et les besoins
de la nation naskapie et de ne pas présumer que leurs préoccupations n’existent pas ou qu’elles sont,
d’une manière ou d’une autre, abordées par différents processus entre les Cris et le Canada.

5. Le gouvernement du Canada devrait négocier, de bonne foi, une nouvelle entente sur le financement du
fonctionnement et de l’entretien avec la nation Eeyou, conformément à l’esprit et à la lettre de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois, au protocole d’entente de 1984 et à la Loi sur
les Cris et les Naskapis du Québec.

Le ministère a répondu comme ci-après : « À la fin mars 2005, AINC et les Cris ont signé une nouvelle
entente de cinq ans qui se poursuivra jusqu’à 2009-2010. Les points de vue très différents d’AINC et de
l’Administration régionale crie sur la façon de mettre cette entente en oeuvre ne sont pas encore résolus.
Nous proposons donc de tenir compte du financement fourni dans le cadre de cette entente afin de
l’inclure dans l’entente globale de mise en oeuvre qui fait l’objet de discussion à la table Chrétien-
Namagoose. Si cette suggestion n’est pas acceptable, nous proposons alors que les deux parties s’engagent,
dès le début, à un examen du fondement complet de cette entente, afin de réussir à mieux comprendre
les besoins communautaires et de travailler, on l’espère, en collaboration à l’avenir pour répondre à ces
besoins. » Le ministère conclut donc en demandant à la Commission de consulter l’Administration
régionale crie et de fournir des commentaires au sujet de ses suggestions.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               47
Mise en oeuvre de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et de la Convention du
Nord-Est québécois

6. Le gouvernement du Canada devrait adopter de nouvelles mesures législatives, politiques et administratives
en vue de garantir la mise en oeuvre correcte de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois et
de la
Convention du Nord-Est québécois. Les mesures qui devraient être prises en considération pour la
mise en oeuvre correcte des accords sur les revendications territoriales, comme la CBJNQ et la CNEQ, sont
esquissées dans les documents de travail intitulés « Proposal for a Policy Management Accountability Act »
et « Proposal for an Aboriginal Treaty Implementation Act » de la Commission ainsi que dans la proposition
intitulée « A New Land Claims Policy » de la Coalition sur les accords sur les revendications territoriales.

Le ministère a répondu qu’il était d’avis qu’il ne serait pas pratique de tenter de répondre à la
recommandation à ce moment-ci et que la recommandation devrait être présentée aux négociateurs
du processus Chrétien-Namagoose pour leur permettre d’aborder ces questions.

Tout comme pour plusieurs autres problèmes, on suggère que celui-ci soit abordé dans le cadre des
négociations entre les Cris et le Canada. La seule préoccupation de la Commission est à savoir si les parties
de ce processus sont capables d’inclure ces éléments à leur programme et de les aborder le plus tôt possible.
En tenant compte de cette situation, la Commission continuera d’assurer la liaison avec les Cris à la table
étant donné que la plupart des recommandations proviennent des préoccupations ou des suggestions
soulevées par les représentants de cette collectivité. La Commission se doit de souligner à nouveau que la
nation naskapie n’est pas représentée à la table et que, dans la mesure où nos recommandations reflètent
ses priorités, cette nation doit aussi être impliquée dans tout processus de suivi.

Préoccupations de la nation Eeyou (crie)

7. Les autorités fédérales et Eeyou devraient déterminer les besoins futurs des collectivités cries concernant le
logement, les projets d’immobilisations et les infrastructures ainsi qu’élaborer et mettre en place un plan
directeur stratégique, à court et à long terme, afin de répondre à ces besoins conformément à l’esprit et à la
lettre du Protocole d’entente de 1974 et de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois ainsi que
des conventions connexes. Les revendications en cours des Eeyou concernant le remboursement du fonds des Cris pour les projets d’immobilisations passés devraient être traités en même temps que ce projet.

Le ministère a répondu en affirmant que les besoins futurs en immobilisations et les revendications non
résolues devraient être abordés dans le cadre du processus Chrétien-Namagoose. On a aussi noté que
le ministère avait, comme mesure provisoire, augmenté la subvention annuelle en immobilisations de
10 millions de dollars à 15 millions de dollars. Dans le cas des Naskapis, le ministère a simplement dit
qu’il poursuivrait sa pratique actuelle.

La Commission continue d’être sérieusement inquiète des problèmes de financement pour le logement,
les immobilisations et les infrastructures et elle assurera un suivi avec les parties pour déterminer s’il
serait possible de trouver des approches plus satisfaisantes. Ces problèmes sont litigieux presque chaque
année depuis que la Commission a commencé à organiser des audiences spéciales de mise en oeuvre en
1986. Il faut trouver une meilleure solution.

8. Le gouvernement du Canada devrait négocier, de bonne foi, avec la nation crie d’Eeyou Istchee, une entente
qui établit une nouvelle relation de nation à nation et contribue de façon innovatrice à mettre en oeuvre les
obligations du Canada envers les Cris en vertu de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois et
des conventions connexes.



44 Réponse du Ministère des affaires indiennes et du Nord aux recommendations
du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie

Le ministère a répondu en affirmant que la question de la relation entre la nation crie et le Canada devrait
être discutée dans le contexte du processus Chrétien-Namagoose ainsi qu’au cours de l’assemblée
extraordinaire proposée.

9. Comme la gouvernance de la nation Eeyou a évolué au cours des trois dernières décennies pour les Eeyou
d’Eeyou Istchee, le gouvernement du Canada devrait négocier de bonne foi, avec les autorités Eeyou une
entente sur la gouvernance Eeyou et les questions afférentes conformes aux présents principes et pratiques
de la gouvernance Eeyou.

Le ministère est d’avis que la gouvernance est un autre domaine d’intérêt pour le processus Chrétien-
Namagoose et qu’il s’agit d’une question pour laquelle les commentaires de l’assemblée extraordinaire
proposée seraient particulièrement cruciaux.

10. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et les autorités Eeyou devraient réexaminer le
plan de développement de la communauté de Whapmagoostui afin qu’il tienne compte des besoins et des
circonstances spéciales de la communauté tels que les coûts plus élevés à cause de son isolement et des
caractéristiques physiques du territoire de la bande.

Le ministère a répondu en expliquant qu’il confirmerait auprès de la communauté de Whapmagoostui
qu’il s’agit d’une question pour la table de négociation Chrétien-Namagoose. Le ministère a aussi
souligné que l’engagement du ministère à l’égard de cette question avait été illustré lorsqu’AINC a financé
une étude sur l’élargissement de la collectivité en 2004-2005.

11. Alors que la Convention sur une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du
Québec promet un branchement par Hydro-Québec dans les cinq (5) années suivant la signature de ladite
convention (laquelle a été signée le 7 février 2002), le gouvernement du Canada doit exercer ses responsabilités eu égard à la fourniture d’électricité à la collectivité de Waskaganish en veillant à l’installation d’infrastructures adéquates et en les finançant afin de répondre aux besoins de la collectivité.

Le ministère s’est dit confiant que la ligne de transport d’énergie serait en place au plus tard en décembre
2006 et qu’AINC assurerait qu’un réseau de distribution selon les normes adéquates serait lié à la
nouvelle ligne de transport d’énergie. Le ministère s’est aussi engagé à financer le déclassement et
l’assainissement du site des installations actuelles.

12. Le gouvernement du Canada doit participer à la planification des immobilisations et au développement de
Waskaganish et il doit prendre en considération les besoins particuliers de la collectivité, besoins déterminés
par les circonstances matérielles inhabituelles (médiocrité du sol, nature des étendues aquatiques
environnantes) du territoire de cette communauté.

Le ministère a répondu qu’il confirmerait, avec la collectivité, que ces questions feraient partie du
processus Chrétien-Namagoose. Il a reconnu que le problème est une question importante et a souligné
qu’il avait augmenté, de 50 p. cent, la subvention d’équipement accordée à Waskaganish. Le ministère a
aussi noté qu’il travaille activement avec l’Administration régionale crie à la table technique.

13. Le gouvernement du Canada et les autorités Eeyou doivent décider de la viabilité des objectifs des Eeyou de Washaw Sibi eu égard à leurs droits en vertu de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et
des conventions connexes.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               49

14. Le gouvernement du Canada, les autorités Eeyou, entre autres celles des Washaw Sibi, doivent entamer des discussions et des négociations à propos de l’éventuelle reconnaissance des Eeyou de Washaw Sibi à titre de dixième nation autochtone crie et de l’établissement du village de Washaw Sibi.

Le ministère a abordé ces deux recommandations en notant la complexité créée par le fait que le territoire
en question est partagé avec les Algonquins Pikogan. Le Canada espère établir sa position dans un délai
de quelques mois et a accepté de fournir l’information en temps voulu.

La Commission surveillera ce processus étant donné que le dossier est en suspens depuis plusieurs
années. Les problèmes deviennent plus difficiles au fil du temps et un progrès rapide est nécessaire.

15. Les autorités canadiennes et Eeyou devraient réexaminer le présent système de tribunal itinérant afin de
prendre les mesures adéquates pour les impacts de la récente décision judiciaire selon laquelle le juge de
paix n’entendra plus de causes à compter du 31 janvier 2004 (la Commission reconnaît les intérêts du
gouvernement du Québec dans cette affaire).

16. Les autorités canadiennes et Eeyou devraient discuter et négocier un système juridique particulier, qui
tiendrait compte des valeurs et principes des Eeyou, conformément au chapitre 18 (Administration de la
justice – Cris) de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois (la Commission reconnaît les
intérêts du Québec dans l’administration de la justice).

Le ministère a noté le rôle de la province et le fait que les discussions entre les Cris et le Québec sont en
cours. Le Canada était particulièrement intéressé à la façon dont des mécanismes informels de règlement
des différends pourraient être utilisés, par exemple, pour prévenir les litiges en relation avec les désaccords
entre les Cris et le Canada. On était d’avis qu’un « Forum supérieur Cris-Canada » pourrait discuter et
résoudre les problèmes avant qu’ils ne dégénèrent en véritable dispute. Si ce processus échoue, les problèmes
pourraient être référés à un organisme de règlement des différends qui aurait aussi la responsabilité de
régler les différends locaux.

La Commission trouve que ces suggestions sont des options intéressantes qui pourraient être portées à
l’attention des autorités cries pour une évaluation supplémentaire. (La Commission note que des mécanismes
semblables existent maintenant en vertu de l’entente sur la nouvelle relation entre le gouvernement du
Québec et les Cris du Québec).

17. Étant donné la présente situation et les besoins actuels en matière d’agents de police dans les collectivités
Eeyou, les autorités canadiennes et Eeyou devraient réexaminer l’adéquation et l’application du rapport,
lequel est actuellement fixé à un agent de police par 1 000 habitants, tel que le prévoit le chapitre 19
(Police-Cris) de la
Convention de la Baie-James et du Nord québécois (ici également, la Commission
reconnaît les intérêts du Québec dans cette question).

Le ministère a rapporté qu’on a signé une nouvelle entente Canada-Québec-Cris qui sert à élever le
nombre d’agents de police de 55 à 65. On a suggéré que toute autre question relative au maintien de
l’ordre soit référée à la table Chrétien-Namagoose.



50 Réponse du Ministère des affaires indiennes et du Nord aux recommendations
du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie

18. Comte tenu des retards excessifs occasionnés par les autorités fédérales, le gouvernement du Canada doit
discuter et négocier, de bonne foi, avec les autorités Eeyou, la mise en oeuvre entière, opportune et correcte
de l’Entente Oujé-Bougoumou/Canada signée par les parties intéressées en mai 1992.

Le ministère conteste que le gouvernement fédéral a causé les retards, en notant son point de
vue voulant que d’autres parties, la complexité de la question et le temps normal nécessaire pour
l’administration de la bureaucratie, etc., étaient la cause des retards. AINC a aussi rapporté que le
ministère travaillait avec Québec pour évaluer des moyens de rechange en vue de faire des progrès sur
la question et qu’il demeure engagé à trouver une solution.

La Commission se doit de rappeler que cette question est en souffrance depuis de nombreuses années.
Elle continue de présenter des problèmes pour la nation d’Oujé-Bougoumou. Il est nécessaire que les
parties déploient un effort concerté pour résoudre cette question dans un avenir rapproché.

19. Les autorités canadiennes et Eeyou doivent régler les réclamations de la nation crie d’Oujé-Bougoumou
concernant le versement d’une somme de 2 952 000 $ due relativement aux fonds transférés à
Oujé-Bougoumou en vertu de l’Entente Oujé-Bougoumou/Canada, laquelle correspond au paiement
en souffrance de sommes convenues et de manque à gagner associé à cette somme.

Le ministère a expliqué que des discussions avec la nation d’Oujé-Bougoumou étaient en cours et qu’on
espère que les progrès seront apparents sous peu.

20. Étant donné l’importance du site en tant que piste d’atterrissage pour les institutions de Chisasibi et des
Cris, le Bloc D doit être transféré sans délai par le ou les gouvernements à la nation crie de Chisasibi, de
même que pris en charge le nettoyage environnemental du site, afin que les installations nécessaires à la
piste d’atterrissage puissent être mises en place.

Le ministère a expliqué qu’un rapport environnemental préliminaire a indiqué qu’une partie du site
pourrait être transféré d’ici l’hiver 2005-2006 mais qu’environ 20 p. cent de l’endroit demeurerait
propriété de la province jusqu’à ce que l’assainissement soit terminé. Ce processus pourrait prendre
‘quelques années, à cause de l’étendue du travail à faire’. Lors de la mise à jour du 13 février 2006,
aucune autre information n’a été fournie.

La Commission note qu’une nouvelle aérogare a été construite et fonctionne maintenant. Ceci exige que
des arrangements administratifs soient conclus entre le Canada et le Québec le plus rapidement possible.

21. Compte tenu des intérêts des gouvernements fédéral et provincial, notamment en ce qui concerne les impacts environnementaux de l’incinérateur, les gouvernements devraient assurer un financement à la nation crie de Wemindji pour le suivi des impacts de ce projet.

Le ministère a expliqué que Raymond Chrétien et Bill Namagoose ont rencontré le Conseil de la bande
Wemindji en septembre 2004 et ont discuté de la question de l’incinérateur à ce moment-là. Dans une
lettre du 15 juillet 2005, AINC a expliqué à la Commission que le ministère espérait pouvoir fournir des
renseignements supplémentaires ‘sous peu’. Presque une année plus tard, AINC n’a fourni aucun autre
renseignement au sujet de l’état d’avancement.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               51

22. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait prendre toutes les mesures adéquates pour
garantir le financement du remboursement à la nation crie de Wemindji des coûts associés au chemin d’accès
à la communauté.

Le ministère a indiqué qu’il avait reçu le mandat de résoudre la question et que des négociations
devraient être amorcées rapidement.

Préoccupations et questions de la nation Eeyou Naskapi de Kawawachikamach

23. Comme la convention complémentaire concernant le ou les amendement(s) à l’article 10 (Santé et services
sociaux) de la C
onvention du Nord-Est québécois a été exécutée par la Naskapi Landholding Corporation,
les représentants du Canada et du Québec devraient procéder à l’exécution de ladite convention
complémentaire.

Le ministère a rapporté que le Canada et le Québec avaient récemment signé l’entente. Le 30 septembre
2004, le gouverneur en conseil a déclaré que l’entente était valide. Elle a ensuite été déposée à la
Chambre des communes le 21 mars 2005.

24. Le ou les gouvernement(s) concernés et les autorités naskapies devraient examiner la mise en oeuvre de
l’article 11 (Éducation) de la
Convention du Nord-Est québécois.

En juillet 2005, le ministère a rapporté que le Québec avait entamé le processus de nomination d’un
négociateur. Lors de la mise à jour de février 2006, le ministère a précisé que le processus de nomination
d’un négociateur par le Québec n’était pas encore terminé. Par contre, entre-temps, un négociateur
intérimaire s’occupait de mettre certains dossiers à jour.

La Commission note que ce genre de retard bureaucratique et administratif était et continue d’être une
excuse pour la non-exécution du travail.

25. Le gouvernement du Canada doit assumer ses responsabilités adéquatement et prendre des mesures
opportunes et adéquates en consultation avec la nation naskapie pour garantir les droits et intérêts des
Naskapis dans les actuelles négociations concernant l’établissement d’un gouvernement du Nunavik.

Le ministère a répondu en affirmant qu’un processus impliquant quatre parties (Inuits, Naskapis,
Québec et Canada) avait été établi pour évaluer les questions. Dans la mise à jour subséquente, le
ministère a rapporté qu’il était en train de fournir des renseignements détaillés aux Naskapis. AINC
avait confiance que ce processus entraînerait des résultats positifs.

Plus tard, les Naskapis ont indiqué à la Commission que le processus ne produisait pas les résultats
désirés et qu’ils avaient ensuite présenté une observation à de la Commission en vertu des dispositions
de la section 165 (1)(b) de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. À l’heure actuelle, le Canada
affirme que la Commission n’a pas le pouvoir d’entendre l’argument. Comme nous le notons dans la
partie ‘Conclusions’ du présent rapport, la Commission est d’avis que le Canada a l’obligation légale
d’agir dans les meilleurs intérêts de la nation naskapie dans ce dossier. La Commission a l’intention
de poursuivre l’observation de la nation naskapie en dépit de la position du Canada.



52 Réponse du Ministère des affaires indiennes et du Nord aux recommendations
du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie
26. Puisque le Canada et le Québec ont assuré à la nation naskapie qu’ils étaient disposés à signer une entente
tripartite concernant les services policiers, les gouvernements devraient ratifier ladite entente.

Le ministère a rapporté que l’entente avait été signée. Dans sa mise à jour, AINC a confirmé que le
ministère prévoyait des problèmes avec le Québec pour en venir à une entente sur la répartition du
financement entre les deux gouvernements.

27. Les autorités canadiennes et naskapies devraient discuter et négocier les mesures adéquates pour assurer
l’approvisionnement en électricité de la collectivité de Kawawachikamach.

Le ministère a précisé que cette question doit être réglée entre les Naskapis, le Québec et Hydro-Québec.
Dans sa mise à jour, AINC a expliqué qu’Hydro-Québec et la Newfoundland Hydro avaient acquis le
barrage Menihek de la minière IOC et que la continuité des services d’électricité était assurée.

28. Les autorités canadiennes et naskapies devraient déterminer et s’entendre sur les besoins actuels et futurs
de la collectivité de Kawawachikamach eu égard à l’habitation, ainsi qu’élaborer et mettre en oeuvre un plan
directeur stratégique, pour le court et le long terme, en vue de répondre à ces besoins, en conformité avec
l’esprit et la lettre de la
Convention du Nord-Est québécois et des conventions connexes.

Le ministère a rapporté qu’il était engagé à ce que les collectivités autochtones ‘aient accès aux programmes
et fonds pertinents du gouvernement fédéral’. Il a aussi indiqué que des représentants avaient rencontré
la SCHL et l’APN pour discuter des moyens à prendre pour améliorer la situation du logement. Dans une
mise à jour subséquente, AINC a expliqué que les Naskapis avaient reçu quatre unités de logement de la
SCHL et une unité du ministère.

L’utilisation actuelle de la formule établie pour le pays, en ce qui a trait à l’affectation des unités de
logement parmi les premières nations, joue contre les intérêts de certaines premières nations
individuelles, notamment la nation naskapie (et les Cris).

* Chaque paragraphe en italique est une citation directe de la recommandation correspondante comprise dans le Chapitre 6 du Rapport 2004 de la commission Crie-Naskapie.

** Les réponses du ministère des Affaires indiennes ont été prises dans une lettre de Michel Blondin, du Bureau de la mise en oeuvre de la Baie-James, reçue en juillet 2005. Les réponses décrites comme des « mises à
jour » ont été faites en personne par M. Blondin lors des Audiences spéciales sur l’exécution de la loi en février 2006.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               53


Après un examen et une analyse des exposés, des présentations et des commentaires des
représentants des autorités cries, naskapies et fédérales, la commission Crie-Naskapie présente
les recommandations suivantes :

Mise en application de la Convention de la Baie-James et
du Nord québécois

1. Le gouvernement du Canada et la nation crie d’Eeyou Istchee doit s’engager dans une nouvelle relation qui
reflète la mise en application de l’esprit, de l’intention et de la lettre de la Convention de la Baie-James et du
Nord québécois
. Les présents pourparlers entre MM. Chrétien et Namagoose devraient se conclure par une
entente sur une nouvelle relation entre les Eeyous d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Canada d’une
manière qui expose une façon acceptable de mettre les obligations du Canada à l’endroit des Cris à exécution
en vertu de la CBJNQ.

Logement Cri

2. Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait étudier et appuyer la proposition sur le
logement cri présentée par les Cris au gouvernement du Canada le 3 novembre 2005. De plus, le Canada et
les Cris devraient négocier une entente sur le logement cri qui respecte les conventions et les arrangements
existants et en harmonie avec l’esprit et l’intention affichés dans les présents pourparlers au sujet d’une
nouvelle relation.



54
Recommendations de la commission Crie-Naskapie

Financement du fonctionnement et de l’entretien

3. Le gouvernement du Canada et la nation crie d’Eeyou Istchee devraient examiner et réviser, par le biais de
pourparlers et d’une éventuelle entente, le montant et le fondement de l’ajustement aux niveaux de financement
du fonctionnement et de l’entretien afin d’assurer une capacité financière suffisante pour répondre aux besoins
des communautés qui n’avaient pas été pris en considération en 1984 lorsque la Loi sur les Cris et les Naskapis
du Québec
est entrée en vigueur.

Mécanisme d’application de la commission Crie-Naskapie

4. Le Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee) devrait élaborer, en collaboration avec les gouvernements
locaux des communautés Eeyou, un mécanisme de mise en oeuvre des constatations, des conclusions et
des recommandations des rapports bisannuels de la commission Crie-Naskapie.

Administration de la justice

5. Comme une règle de droit et une administration efficace de la justice sont essentiels au bien-être social des
communautés Cries, des représentants de la nation Eeyou, du Canada et du Québec devraient réviser l’article 18
de la CBJNQ, particulièrement l’application du paragraphe 18.0.37 de la CBJNQ, afin de s’attaquer aux
questions et problèmes courants liées à l’administration de la justice au sein des communautés cries.

Application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec
et modifications

6. Les autorités fédérales et Eeyou devraient établir une table de discussion sur les pourparlers en ce qui concerne
l’application de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et les modifications à apporter à celle-ci.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               55

La nation crie de Washaw Sibi

7. Le gouvernement du Canada, le Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee) et les Eeyous de Washaw Sibi
devraient établir une table de discussion formelle sur les questions suivantes :

a) la reconnaissance des Eeyous de Washaw Sibi comme dixième Première nation crie dans le cadre de
la CBJNQ;
b) la pleine jouissance des avantages et des droits pour les Eeyous de Washaw Sibi, en vertu de la CBJNQ;
c) l’aide fédérale en vue de la création d’un nouveau village pour les Eeyous de Washaw Sibi.

La nation crie d’Oujé-Bougoumou

8. Dans le cadre des pourparlers entre MM. Chrétien et Namagoose, les représentants du Canada, de la nation
crie d’Eeyou Istchee et de la nation crie d’Oujé-Bougoumou devraient discuter des questions et des
préoccupations des Cris d’Oujé-Bougoumou suivantes et les préciser :

a) Une demande de remboursement de 1,7 millions de dollars qui avaient été transférés à Oujé-Bougoumou
pour ses projets d’immobilisations depuis 1994-1995 (le MAINC maintient qu’il n’est pas obligé de
rembourser les Cris pour le financement qu’Oujé-Bougoumou a reçu pour ses projets d’immobilisations
depuis 1994-1995).
b) Une demande d’une somme de 2 952 000 $ représentant la perte de gains provenant du paiement tardif
des montants convenus en vertu de la Convention Oujé-Bougoumou/Canada et des coûts indirects.
c) La mise en application complète et indiquée de la Convention Oujé-Bougoumou/Canada.



56
Recommendations de la commission Crie-Naskapie
La nation crie de Waswanipi

9. Le Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee) et la Première nation crie de Waswanipi devraient formuler et
présenter conjointement une déclaration et/ou une demande au gouvernement du Canada au sujet des
questions des Waswanipi suivantes :

a) L’état des territoires Waswanipi Indoho (de chasse) et les répercussions de la mise en valeur
des ressources;
b) Le déplacement et le déménagement des Cris Waswanipi de leur communauté originale – le vieux poste
de Waswanipi;
c) La désignation du poste de Waswanipi comme lieu patrimonial officiel par le gouvernement du Canada;
d) La situation et les besoins des Cris de Senneterre;
e) Les besoins en matière d’éducation et de formation des jeunes de Waswanipi en vue de leur
perfectionnement professionnel et de leur organisation de carrière;
f) L’élaboration de lois relativement à l’imputabilité des gouvernements locaux.

10. Dans le cadre des présents pourparlers entre MM. Chrétien et Namagoose, le gouvernement du Canada, le
Grand conseil des Cris (d’Eeyou Istchee) et la Première nation crie de Waswanipi devraient discuter des besoins
des Waswanipis en matière de développement économique et de projets d’immobilisations et les préciser.

La nation Crie de Chisasibi

11. Les besoins immédiats et éventuels de la nation crie de Chisasibi en matière de logement et d’expansion
devraient faire l’objet de discussions et être précisés dans le cadre des présents pourparlers entre MM. Chrétien
et Namagoose.

12. Étant donné que la construction d’une aéroport à la bande d’atterrissage de Chisasibi est terminée et qu’il est
actuellement en activité, le Bloc D devrait être immédiatement désigné par le gouvernement du Canada au
titre de terre de catégorie IA à l’usage et au bénéfice exclusifs de la nation crie de Chisasibi.

La Première nation de Whapmagoostui

13. Le Canada et la Première nation de Whapmagoostui devraient déterminer les questions et les besoins des Cris
de Whapmagoostui relativement à l’expansion de leur communauté.

La nation naskapie de Kawawachikamach

14. Le gouvernement du Canada, la nation naskapie de Kawawachikamach et d’autres parties concernées devraient
déterminer sans délai le mandat du groupe de travail Naskapi-Inuit-Canada-Québec qui devrait commencer à
s’attaquer aux préoccupations de la nation naskapie relativement aux présentes négociations entourant la mise
sur pied d’un gouvernement Nunavik.

15. Le gouvernement du Canada devrait régler son différend avec Québec sur la question du partage des coûts des
services de police offerts aux Naskapis de Kawawa-chikamach.

16. Le gouvernement du Canada et la nation naskapie de Kawawachikamach devraient régler la question du
processus d’attribution de logements du SCHL et déterminer les besoins immédiats et éventuels des Naskapis
en matière de logement.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               57

Lors des Audiences spéciales de la Commission sur l’exécution de la loi, certains représentants des
communautés cries et le représentant du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ont
exprimé un certain espoir que les présents pourparlers entre MM. Chrétien et Namagoose vont résoudre
une partie des questions et des préoccupations soulevées par les autorités cries. La Commission surveillera
et suivra les discussions et les résultats de ces pourparlers avec énormément d’intérêt.

Cependant, la nation naskapie de Kawawachikamach et la communauté des Eeyous de Washaw Sibi ont
invoqué l’obligation et la responsabilité du gouvernement du Canada d’agir en qualité de fiduciaire à leur
égard. Les deux nations autochtones prétendent que le Canada a été négligent vis-à-vis son obligation de
protéger leurs droits et leurs intérêts à la lumière de leur situation actuelle, telle qu’elle est décrite dans
les rapports antérieurs et présents de la Commission.

À la suite de la décision marquante dans l’affaire Guérin c. La Reine 1 (1984), la Cour suprême du Canada
a confirmé que le gouvernement du Canada a l’obligation d’agir dans les meilleurs intérêts des peuples
autochtones.

Selon les tribunaux, le fondement de cette obligation fiduciaire prend racine :

a) dans les rapports historiques entre la Couronne et les peuples autochtones;

b) dans la relation unique et spéciale que les peuples autochtones entretiennent avec leurs terres.

Dans l’affaire R.v. Sparrow 2, la Cour suprême du Canada a déclaré :

La nature sui generis [unique] du titre indien, de même que les pouvoirs et les responsabilités
historiques de Sa Majesté, constituent la source de cette obligation fiduciaire. À notre avis, l’arrêt
Guérin, conjugué à l’arrêt R. c. Taylor et Williams (1981), 34 O.R. (2d) 360, justifie un principe


58
Conclusions
directeur général d’interprétation du par. 35 (1) [de la Loi constitutionnelle de 1982 qui reconnaît
et confirme les droits des autochtones et issus des traités existants], à savoir, le gouvernement a
la responsabilité d’agir en qualité de fiduciaire à l’égard des peuples autochtones. Les rapports entre
le gouvernement et les autochtones sont de nature fiduciaire plutôt que contradictoire et la
reconnaissance et la confirmation contemporaines des droits ancestraux doivent être définies en
fonction de ces rapports historiques.

Le professeur Brian Slattery explique ces « rapports historiques » dans un article cité par la Cour
suprême du Canada. Le professeur Slattery mentionne que : 3

La Couronne a une obligation générale de fiduciaire envers les Autochtones de protéger la jouissance
de leurs droits autochtones et, en particulier, la possession et l’utilisation de leurs terres. Cette
obligation générale de fiduciaire prend source dans l’engagement historique de la Couronne de
protéger les Autochtones contre les incursions des colons britanniques, en échange de l’engagement
autochtone de renoncer au recours à la force pour se défendre et à plutôt accepter la protection de la
Couronne en tant que sujets britanniques. En offrant sa protection, la Couronne était moins
animée par la philanthropie ou le sentiment moral que par le besoin d’établir des rapports pacifiques
avec des peuples avec qui des rapports amicaux constituaient une source d’avantages militaires et
économiques, et avec qui des rapports hostiles représentaient une menace pour la sécurité et la
prospérité des colonies. Les sources de l’obligation générale de fiduciaire ne reposent donc pas sur
une préoccupation paternaliste visant à protéger un peuple « plus faible » ou « primitif », comme on
l’a déjà laissé entendre, mais plutôt sur la nécessité de convaincre les peuples autochtones, à une
époque où ils avaient encore des capacités militaires considérables, que leurs droits seraient mieux
protégés en faisant confiance à la Couronne plutôt qu’en ne dépendant que d’eux-mêmes.

L’existence d’un rapport de fiduciaire entre le Canada et les peuples autochtones a également été reconnu
par la Commission royale sur les peuples autochtones dans son rapport de 1996 : 4

Le gouvernement ne peut traiter les Autochtones comme des adversaires. Au contraire, il doit prendre
soin de respecter la relation de type fiduciaire qui le lie à eux et reconnaître et protéger leurs droits
comme le ferait tout fiduciaire.

Par conséquent, la Commission conclut que le gouvernement du Canada a une obligation juridique, de
même que morale et politique, d’agir dans les meilleurs intérêts des peuples autochtones. Le Canada doit
particulièrement exercer, de façon responsable et positive, son obligation de fiduciaire dans l’entretien de
ses rapports avec les nations cries et naskapies du Québec.

Notes en fin de chapitre

1 Guérin c. La Reine, [1984] 3 R.C.S., page 335.
2 R.v. Sparrow, [1990] 3 R.C.S., pages 1075 à 1108.
3 Brian Slattery, « Comprendre les droits autochtones » (1987) 66 R. du B. can., page 753.
4 Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones : Une relation à redéfinir, vol. 2 (Ottawa : Approvisionnement
et Services, 1996), pages 24 et 25.

2006 RAPPORT DE LA COMMISSION CRIE-NASKAPIE               59